Pourquoi les entreprises du Cac rachètent leurs actions

En 2007, les sociétés du Cac 40 ont racheté pour près de 19 milliards d'euros de leurs propres actions. Un chiffre en large progression par rapport à l'année précédente. Voici l'intérêt et l'impact boursier de cette pratique.

Racheter ses propres actions est une pratique qui se répand depuis une dizaine d'années parmi les gros groupes cotés. Souvent présentés en même temps que les versements de dividendes, les rachats d'actions ont des finalités pourtant bien moins évidentes.

Une fois acquises, les actions peuvent être stockées - pour être distribuées aux salariés par exemple - ou annulées. Il y a alors réduction et donc "relution" (par opposition à dilution) du capital.

Les 10 plus gros rachats d'actions du Cac 40 en 2007
Société Rachat net d'actions en millions d'euros Rachat net d'actions en pourcentage du capital
Source : lettre Vernimmen n° 63
Mittal-Arcelor 2.604 4,4 %
BNP Paribas 2.139 2,8 %
Axa 2.126 3,3 %
Sanofi-Aventis 1.787 2,0 %
Total 1.526 1,2 %
Société Générale 1.288 2,2 %
Accor 1.240 8,5 %
Suez 1.150 2,2 %
L'Oréal 1.002 1,9 %
Vinci 937 3,6 %

Pourquoi racheter ses actions ?

 L'entreprise peut tout simplement disposer de capitaux excédentaires par rapport à ses besoins en investissement. Elle souhaite alors rendre une partie de son fonds à ses actionnaires car elle anticipe qu'ils sauront les employer avec une meilleure rentabilité.

 Si l'entreprise est mature et stable, elle n'a plus besoin d'autant de capitaux propres qu'à ses débuts ou en pleine période d'expansion car ses investissements sont moins risqués. Elle peut donc décider de recourir davantage à l'endettement afin d'adapter son mode de financement  à l'évolution de son actif économique. Concrètement, elle s'endette pour réaliser son rachat d'actions puis annule ces dernières. Elle a ainsi transformé son financement par fonds propres en dette.

Outre ses deux raisons stratégiques, des explications plus accessoires peuvent justifier des rachats d'actions.

Offrir une porte de sortie à ses actionnaires, en particulier si l'action n'est pas très liquide. Cette stratégie peut d'ailleurs initier une sortie de bourse.

Renforcer le poids d'un actionnaire non-cédant. Une fois la réduction de capital réalisée, l'actionnaire qui n'a pas vendu ses parts se retrouve mécaniquement avec une détention du capital plus élevée qu'avant l'opération.

Conserver des actions en vue de la mise en place d'un plan d'attribution de stock-options.

Minimiser le coût fiscal pour les actionnaires en leur proposant une plus-value (imposée à 27 %) plutôt qu'un dividende (taxé dans le cadre de l'impôt sur le revenu). Ce mode de rémunération devrait cependant perdre de son intérêt puisque la Loi de finances 2008 prévoit une réforme de la fiscalité des dividendes qui permettrait aux actionnaires d'opter pour le prélèvement libératoire, taxé à 27 %.

C'est aussi un moyen de rémunérer les actionnaires (lorsque l'action est à la hausse) de façon ponctuelle sans infléchir la politique de versement des dividendes.

Quelles conséquences pour la valeur de l'entreprise ?

En modifiant la structure de l'actionnariat et le mode de financement de l'entreprise, le rachat d'actions a des effets sur la valeur de l'action. On remarque globalement que l'annonce d'un rachat d'actions suffit à faire légèrement grimper le cours de bourse. Pourquoi ? Parce que l'entreprise envoie un message positif au marché : d'une part elle estime que son action est sous-évaluée ou tout du moins qu'elle va continuer de monter dans l'avenir (elle ne va racheter des titres si elle anticipe une baisse du cours). D'autre part, ce peut être interprété comme une logique d'investissement (ou plutôt de non-investissement) responsable de la part des dirigeants qui privilégient l'intérêt de leurs actionnaires aux dépends d'investissements à faible rentabilité. Il faut cependant apporter une nuance : le rachat d'action étant généralement réalisé grâce à l'endettement, l'impact de cette modification de la structure de financement doit être prise en compte car elle augmente le risque pour l'entreprise.