Grâce aux MOOC, étudiez à Harvard depuis votre salon Les amphis, bientôt ringards ?

 Pourquoi payer des sommes astronomiques pour un cursus à Princeton si les cours sont disponibles gratuitement sur Internet ? Même si, comme le reconnaissent Andrew Ng et Sebastian Thrun, obtenir le privilège d'étudier dans une université de renom ne se résume pas au simple contenu. L'interaction avec les autres étudiants, une relation privilégiée avec le professeur constituent aussi des éléments essentiels d'un enseignement supérieur de qualité.

ben nelson, fondateur du projet minerva.
Ben Nelson, fondateur du projet Minerva. © Minerva

En règle générale, les universités considèrent les MOOC avec circonspection ne sachant réellement ce que l'avenir leur réservera. Ainsi, l'université de Stanford ne met pas tous ses œufs dans le même panier de Coursera. "Nous sommes encore au stade d'expérimentation, avertit John Mitchell. Parallèlement aux cours disponibles sur Coursera, nous explorons la possibilité de gérer nous-mêmes ce type de plateforme avec notre programme Class2Go. Par ailleurs, nous avons établi un partenariat avec un autre site, VentureLab, dont la spécificité consiste à proposer des MOOC axés sur les projets de groupe. Notre principal objectif est avant tout de mieux comprendre l'utilisation de ce nouveau media."  

Un rapport de Moody's prédit que la hausse des MOOC pourrait aider les grandes universités à atteindre davantage d'étudiants, renforcer leur réputation et éventuellement générer des revenus en distribuant du contenu ou en délivrant des certifications.  "Les MOOC nous permettent d'évaluer différents types d'apprentissage, analyse Andrew Ng. Ils permettent aussi d'aborder la salle de cours différemment. Ainsi, au lieu de rester passif devant un cours magistral, les étudiants peuvent le visionner chez eux puis utiliser le temps en classe pour débattre avec leurs pairs et le professeur."  Ou comment renforcer l'intérêt des cours physiques grâce aux cours numériques.

Le projet Minerva

D'autres, plus révolutionnaires, proposent tout simplement de réinventer l'enseignement supérieur, loin des institutions traditionnelles. Le projet Minerva, une université virtuelle américaine, ambitionne ainsi de former les élites à travers le monde en ligne.

 "Nous partons du principe que le savoir de base propre à l'enseignement supérieur sera disponible gratuitement pour tous, explique Ben Nelson, fondateur du projet Minerva et ex-PDG du site de partage de photos Snapfish. Nous anticipons un monde où la dissémination pure et simple du savoir, quel qu'il soit, se fera par les MOOC et autres outils en ligne. Nous fournirons du développement intellectuel. Si, de votre propre initiative, vous n'avez pas pris des cours d'économie, vous ne parviendrez pas à suivre notre cours de politique économique.  Nous voulons fournir la meilleure éducation du monde." Rien que ça !

"Nous anticipons un monde où la dissémination pure et simple du savoir se fera par les MOOC et autres outils en ligne"

Les cours du projet Minerva qui débuteront en automne 2014, se dérouleront exclusivement en ligne. "Un programme permettra d'évaluer les progrès, les lacunes des étudiants." Mais les campus, bien réels, seront disséminés à travers le monde, "dans 20 à 30 pays" et les étudiants changeront de ville chaque semestre. "Notre méthode de sélection sera très exigeante mais, grâce à l'enseignement en ligne, les places seront illimités contrairement aux universités telles que Harvard ou Princeton. Mais attention, le projet Minerva n'est pas pour tout le monde. Nous formons les élites de demain." Ben Nelson estime que le coût pour chaque étudiant s'élèvera à 20 000 dollars (contre près de 35 000 dollars aujourd'hui pour Princeton par exemple).

"Que du vent", serait-on tenté de penser. Mais le projet convainc. Séduit, Larry Summers, ancien secrétaire au Trésor et président de Harvard, a intégré le conseil d'administration. Et, Benchmark Capital, la société de capital-risque derrière Twitter, eBay ou Instagram a investi 25 millions de dollars dans le projet, l'investissement de démarrage le plus important de la firme en 17 années d'existence !

"Je pense qu'en définitive universités et cours en ligne se complémenteront", résume Sebastian Thrun. "Désormais, les professeurs auront le loisir d'enseigner à 200 étudiants en classe de cours et à 200 000 via Internet, renchérit John Mitchell. Quel professeur n'en serait pas heureux ?"