Après Vivendi,
après BOL, Fabrice Cavarretta est depuis deux ans immergé
dans iPropi.fr, un site de petites annonces et de mise en
relation directe. Aujourd'hui, ses six années d'expérience
dans l'économie Internet lui procurent un regard acéré
sur l'état du capital-risque, le mythe de la start-up
ou la situation de la France face au Web. Pendant une heure,
Fabrice Cavarretta a répondu aux questions très
variées des lecteurs du JDNet. Retour sur ce dialogue
en direct.
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Invité
: Fabrice Cavarretta, PDG d'iPropi.fr (voir
sa fiche Carnet) |
Date :
Mercredi 26 Juin, 18h-19h10 |
Nombre
de questions posées : 102 |
Nombre de questions
retenues : 28 |
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Fabrice Cavarretta :
Bonjour à tous !
A quoi sert
iPropi ?
Fabrice Cavarretta : iPropi permet de publier n'importe
quelle type d'annonce (achat, vente, etc.) ...et mettre à
profit son réseau relationnel pour la résoudre.
Je ne vois
vraiment pas quel peut être le business modèle de iPropi.
C'est un joli concept, mais gagner de l'argent avec me semble
un peu utopique. Quelles sont vos lignes de revenus ?
Le business modèle est très simple : nous aidons les internautes
à faire des transactions entre eux et nous avons une indication
de la valeur de celle-ci. Nous allons donc tout simplement
facturer en prenant une commission. Ce modèle est très
similaire à celui d'eBay qui a fait ses preuves !
Comment financez-vous
i-Propi ?
Nous avons effectué une levée de fonds en début 2001 auprès
d'angels et d'un fond d'amorçage.
Combien de
personnes travaillent pour iPropi ?
Nous sommes actuellement 6 personnes à Paris et nous avons
en plus une relation avec une web-agency à l'étranger qui
intervient dans les développements quand nécessaire.
J'imagine
que vous avez re-fréquenté les VC's pour iPropi. Quelle est
l'ambiance ?
Réponse courte : comme pour ma première levée de fonds en
1991 ! Plus concrètement, le marché est très très refroidi
et il est difficile de trouver des VC's qui sont prêts à prendre
le risque de financer un projet de dotcom innovant. Ceci est
aggravé par le fait que beaucoup de petits VC's ont pratiquement
arrêté tout investissement, et ceux qui restent sont parfois
à une taille telle que les petits projets (moins de 1 M)
ne les intéressent pas. Globalement, comme cela a été le cas
historiquement (en regardant sur 20 ans), il ne faut pas négliger
toutes les sources alternatives de financement: angels, fonds
publics, amis/famille, et même ... générer du cash au plus
tôt.
Qui a trouvé
le nom iPropi ? Vous pouvez décoder ?
Traduction 1: cela signifie "qu'il est très difficile
de trouver un nom disponible en .com, qui se décline correctement
dans plusieurs langues, et qui ait un rapport avec le service"
!
Traduction 2: iPropi a été choisi car il permet d'illustrer
dans le logo le dialogue entre personnes (les deux "i") grâce
au "prop" qui signifie propagation ou proposition. Ainsi,
on voulait évoquer la fluidité d'un outil qui met les gens
en relation.
Mais après
iBazar en France personne n'a réussi a constitué une communauté
suffisante en France (cf Aucland, QXL...) malgrés les sommes
dépensées en com... Comment pensez-vous faire décoller iPropi
?
Nous sommes actuellement en phase de lancement, et nous nous
sommes focalisés sur la manière dont le public réagit à notre
produit (et la conclusion est positive). Effectivement, nous
allons devoir passer à une phase plus active de marketing.
Au niveau marketing, il est difficile de donner un mix précis,
mais cet outil peut être promu facilement en travaillant l'aspect
viral, le bouche à oreille plus un bonne dose de relations
publiques. De la communication classique (achat d'espace)
peut être envisagée de manière opportuniste.
Pour quel
projet avez-vous levé des fonds en 1991 ?
En revenant de Californie en 1990, j'ai aidé un ami qui montait
une entreprise de base de données orientée objet. Ce fut très
instructif de voir comment se comportait le marché quand tout
va mal (la guerre du Golfe à l'époque avait été un choc aussi
gros que la fin de la bulle Internet).
Que faites-vous
dans une start-up ? Pourquoi n'opérez vous pas une place de
marché B to B, ça a plus d'avenir, non ?
Je ne suis pas persuadé que tout le monde doit faire la même
chose en même temps, non ? Je ne connais pas très bien le
marché que vous évoquez, donc je n'ai pas regardé dans cette
direction là à l'époque du lancement d'iPropi.
Avez-vous
le sentiment d'avoir loupé le virage de la net-économie
qui a permis de faire fortune à des gens comme Grimaldi, Roos,
Simoncini, blanc... ?
Quelques personnes ont fait fortune en effet. Entre le fait
que nous sommes 60 millions de Français, plus le fait que
ces excès financiers dont vous parlez n'ont pas a posteriori
tant la côte que cela, j'essaie de ne pas penser au fait que
j'aurai pu gagner à la "loterie de la nouvelle économie".
Je fais des technologies de l'information depuis tout petit
(appris à programmer en 1976) et cela me plaît, tout
simplement, et je vis bien. Bon, enfin, si vous insistez,
je n'ai rien contre le fait de gagner beaucoup d'argent au
Loto, mais ce n'est pas mon métier !
Que vous inspirent
les déboires boursiers actuels de Vivendi, votre ancien employeur,
et rétrospectivement la stratégie Internet du groupe ?
Je ne peux pas trop commenter la situation de Vivendi étant
toujours lié à un devoir de réserve vis-à-vis de cette entreprise
; par ailleurs, Vivendi étant une entreprise cotée qui traverse
des difficultés, ceci interdit de se laisser à toute confidence
en supposant même que l'on connaît des informations non publiques.
Ce que je peux dire, c'est que Vivendi, dans la période où
j'y ai été actif (1996-2000), a été un acteur très dynamique
dans le domaine des nouvelles technologies et que JM Messier
avait été très en avance dans le domaine Internet. Ceci m'a
permis de manager ou de démarrer des activités Internet fort
intéressantes, et avec de grosses responsabilités à un âge
où ceci n'est normalement pas possible dans un tel grand groupe.
Quel est le
principal point positif de votre passage dans un grand groupe
(Vivendi..) avant les start-up ? Le principal point négatif
? (ce n'est pas un entretien d'embauche... ! )
On a des moyens pour "faire des choses" ; c'est personnellement
plus confortable d'un point de vue financier. On apprend,
si, car on est au contact de managemers expérimentés. Positif
de la start-up: on est très libre de fixer sa voie (cela ne
veut pas dire qu'on en fait qu'à sa tête quand même !), on
a un style de vie plus agréables (horaires), possibilité de
se focaliser sur le service/le produit. En start-up, on apprend
à gérer de manière très créative et économe... Pour
les inconvénients des deux, voir la réciproque de l'autre
!
BOL, si c'était
à refaire... vous referiez comment ?
OUI ! Les 2 ans que j'ai passé à lancer BOL m'avaient permis
d'assembler une équipe très respectée et de découvrir comment
challenger des acteurs forts et déjà établis on-line (Fnac
par exemple), brick & mortar de surcroît, dans leur propre
domaine. Cela a été une aventure formidable ! Je ne pourrais
pas commenter sur la suite de l'aventure BOL au sein de Bertelsmann
et Vivendi (qui a été fermé en 2001 par le remplaçant de mon
remplaçant !), mais je garde un souvenir et des enseignements
très positifs de ces 2 années.
Vous avez
encore des liens avec des anciens de BOL ?
Avec pas mal d'entre eux : nous prenons des verres ensemble
régulièrement et nous discutons souvent de ces aventures (certains
d'entre eux venaient même de Cegetel où ils avaient déjà été
mes collaborateurs en 96/97).
Un avis rétrospectif
sur la campagne BOL signée Tong Cuong ? (le poing, les manifs
...) ?
Evidemment j'ai aimé, car une telle campagne ne peut passer
que si elle est supporté à 100 % par le management. Pour
l'anecdote, il faut rappeler qu'elle est restée dans les esprits
alors que nous n'avions pratiquement rien dépensé dessus (pas
de TV, pas de 4x3 dans la rue, juste un peu de métro et de
magazine) ; c'est la preuve que l'agence avait fait un bon
boulot.
On dit que
la France est en retard sur Internet (d'accord/pas d'accord):
c'est donc que les marchés sont devant nous... Où sont les
meilleures opportunités ? e-Commerce, modèle pub ? Le payant
?
Pas tant en retard que cela, mais est un peu bloquée dans
certains domaines, en particulier dans l'e-commerce, avec
des raisons rationnelles (boîte aux lettres petites,
concierges disparues) et des raisons irrationelles (paiement
par carte bancaire). En terme de pénétration PC/accès, c'est
moyen, mais rien de catastrophique. En terme d'opportunité,
j'ai une attirance forte pour tout ce qui se passe du coté
de WiFi (accès Internet wireless quasi gratuit !). Et je reste
persuadé que l'Internet va être une révolution mais qui aura
lieu en grande partie dans le cadre de business existant (brick
& mortar); les opportunités pour des entreprises Net pures
(comme la notre ;-) sont plutôt rares.
Quel est votre
salaire aujourd'hui ? Comme salarié de iPropi ou autre ?
C'est très simple.
La réussite
d'iPropi pour vous serait : - La Bourse ? - La revente pour
un bon prix ? Ou bien passer 10 ou 20 ans à manager une équipe
de 30/40 personnes avec une société rentable sans plus ?
La réussite c'est : que le produit vive (car on y croit et
on a même envie de l'utiliser nous même ! :-) et qu'on y gagne
quelque chose financièrement (un salaire pour commencer ?).
Evidement, il y a des sorties qui sont plus glorieuses que
d'autres, mais concrètement, en tant qu'entrepreneur, je n'ai
pas de religion sur la meilleure sortie. Je m'applique juste
à rendre cette aventure pérenne et profitable pour mes actionnaires.
Quelles sont
les personnes qui vous ont le plus marqué dans l'Internet
francais ?
J'admire les personnes qui ont monté des entreprise avec vision,
qui aimaient leur métier, et qui n'étaient pas arrivé dans
le marché 15 minutes avant le First Tuesday du printemps 99.
Je vais sûrement en oublier mais par exemple :
Magnard (Alapage), Meyer (Mutimania), Ghesquière/Postaire
(Nomade); dans les managers, Marie-Christine Levet. Bon, je
m'arrête là...
C'est quoi
le mieux X ou Harvard ?
Ca dépend ce que vous cherchez ? X : formation très
rigoureuse où l'on apprend à réfléchir rapidement - Harvard
: formation ouverte où l'on
apprend à gérer la complexité du monde des affaires, excellente
pour la partie relations humaines. Je vous recommande les
deux !
Si vous avez
des enfants, que leur répondez-vous quand ils vous demandent
ce que vous faites dans la vie ?
La question actuellement est plutôt du type "Ghhaaaa"...
Cavaretta
c'est corse non ? De quelle région ?
Sicilien, c'est un nom de la région de Trapani (à coté de
Palerme).
Vous passez
où vos vacances cet été ?
Quelques semaines dans le sud de la France; on a bien des
vacances en start-up, mais on s'assure quand même de ne pas
trop être loin d'une prise de téléphone pour connecter le
portable...
Amazon, Fnac,
Alapage: qui va gagner en France ? Lequel est votre préféré
perso ?
Moi, je pense que le Brésil va gagner.
Le marketing
viral au fond est-ce que ça marche ? A quelles conditions,
selon vous ?
Difficile de répondre en général (aussi difficile que de dire
"est-ce que le marketing postal ou TV marche" ?). Cela doit
être pris en compte dans un mix marketing, surtout si le produit
s'y prête (iPropi a une forte composante virale naturelle
par exemple). Par contre, cela ne marche pas de manière aveugle
car le consommateur devient défensif face à tous les outils
de mails, etc. Il faut donc être subtil et le traiter honnêtement.
iPropi, par exemple, offre à chacun la potentialité de déclencher
une chaine virale pour résoudre son problème ; ceci apporte
donc du viral à l'entreprise, mais en contre partie nous permettons
à chacun de contrôler ce qu'il reçoit. Une sorte de Ying/Yang
...
Raffarin :
bon ou mauvais pour le Web ?
On va lui laisser le temps de faire ses preuves , non ?
Politiquement
votre sensibilité = droite ou Gauche ?
J'ai déjà dit que je pensais que c'est "Brasil" qui va gagner
!
Si vous faites
fortune, quel sera votre première grosse dépense ?
Acheter un appartement dans un immeuble avec ascenseur et
prendre des vacances au Brésil.
Fabrice Cavarretta :
Merci à tous pour vos question ! On espère vous voir sur iPropi.fr
!
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