A son tour la CNIL (Commission nationale
de l'Informatique et des libertés) n'échappe pas
au caractère "poil à gratter" de l'Internet.
La présentation du 22ème rapport d'activité
a été l'occasion pour Michel Gentot, qui préside
la CNIL, de démontrer que la Commission ne souhaitait pas
se laisser doubler par la Toile et par le spam en matière
de protection des données personnelles. Plusieurs annonces,
mises soigneusement en exergue, annoncent la couleur.
La
première porte sur la création d'une nouvelle adresse
e-mail dédiée aux particuliers : spam@cnil.fr.
"Avec cette adresse, explique Michel Gentot, les internautes
peuvent nous envoyer tous les messages commerciaux non sollicités
qu'ils reçoivent. Un instrument d'analyse nous permet par
la suite de voir les messages qui relèvent du spam et de
prendre les mesures adéquates." Cette nouvelle adresse,
déjà opérationnelle, sera accompagnée
à terme d'une rubrique dédiée d'information
au spam sur le site de la CNIL.
La deuxième annonce concerne
également le spam, mais cette fois sur les téléphones
mobiles. "La Commission vient de dénoncer au parquet
une opération d'envoi massif de SMS, détaille Michel
Gentot. Ces SMS, envoyés en masse, comportaient des phrases
du type "quelqu'un qui t'aime t'a laissé un message"
et enjoignaient le destinataire à appeler un numéro
de téléphone surtaxé." Dans sa délibération,
la CNIL note que cette affaire porte non seulement sur la volonté
de "générer des appels coûteux vers les
services Audiotel" mais aussi sur la collecte illicite de données.
Les destinataires qui contactaient le numéro de téléphone
étaient invités à composer "les numéros
de téléphone de ceux de leurs amis qu"ils estimaient
pouvoir être à l'initiative d'un tel envoir".
Ces numéros enrichissaient à leur tour la base de
données.
L'autre affaire révélée
par la CNIL, encore liée au Net, porte sur un e-mail "envoyé
visiblement à plus de 100 000 personnes, entre les deux
tours de l'élection présidentielle". La Commission,
qui n'a pas encore délibéré sur ce dossier,
note que sous le prétexte de réaliser un sondage en
ligne sur les intentions de vote, cet e-mail collectait d'autres
informations comme l'âge, le sexe ou la catégorie socio-professionnelle.
Les destinataires étaient invités à fournir
leurs coordonnées pour être informés des résultats
de ce sondage.
Au travers de ces différentes
annonces, la CNIL cherche-t-elle à montrer qu'elle sort désormais
ses crocs sur Internet ? "Nous ne voulons pas enfermer
la Commission dans le pénal, mais nous suivons une nouvelle
orientation, souligne Michel Gentot. Notre rôle est surtout
d'anticiper, même si la future transposition en Droit français
de la directive européenne de 1995 sur la protection des
données personnelles et la libre circulation de ces données va conférer
à la CNIL un pouvoir de sanction."
Ce futur pouvoir devrait s'accompagner
d'un rôle de plus en plus actif de la part des particuliers.
Dans son rapport d'activité, la CNIL note que les particuliers
attestent "d'une plus grande autonomie dans l'exercice de leurs
droits". Pour la deuxième année consécutive,
les demandes de radiation de fichiers commerciaux auprès
de la CNIL sont en baisse : -34 % en 2001 et -22 %
en 2000. "La preuve, selon Michel Gentot, que les particuliers
agissent de plus en plus directement avec ceux qui opèrent
les fichiers et connaissent leurs droits." Cette sensibilité
accrue des particuliers face aux données personnelles a son
revers de la médaille pour la Commission : l'année
dernière, le nombre de demandes pour vérifier qu'un
fichier a bien été déclaré à
la CNIL a augmenté de 21 %. Une soif de transparence.
[Ludovic Desautez, JDNet]