Après avoir élaboré
un système forfaitaire de redevance pour les webradios (associatives
et commerciales) en 2000, la Sacem tente maintenant de l'appliquer.
Au cours de l'été, plusieurs webradios associatives
ont reçu un mail de la part de la division "Médias Audiovisuels"
de la Sacem, les enjoignant à régulariser leur situation
à l'égard des sociétés d'auteurs au
titre de la diffusion streaming d'oeuvres musicales.
Le
système de redevance mis en place par la Sacem repose sur
plusieurs principes. Pour les associations souhaitant diffuser un
programme radiophonique sur Internet en mode streaming, la Sacem
demande à titre de règlement des droits d'auteur une
cotisation forfaitaire mensuelle de 72,5 euros hors taxe. En fonction
de l'audience du site, une majoration égale à 2,7 euros hors taxe
par tranche de 100 000 pages vues par mois est exigée.
La grille de
tarification est plus ou moins acceptée par les radios en
ligne à but non lucratif. Si
l'ensemble des webradios associatives sont conscientes de la nécessité
de verser une contribution au titre des droits d'auteurs, certaines
estiment que le montant de la cotisation actuelle est rédhibitoire.
Pour montrer leur mécontentement, certaines webradios ont
décidé interpeller les internautes. Le site d'information
RadioActu.com avait repéré quelques webradios rebelles
au mois d'août comme Radio-Club Dorothée qui
a décidé de cesser sa diffusion. Sur la page d'accueil
de son site, le responsable de la radio en ligne a laissé
un édito virulent, intitulé "La Sacem m'a tué",
dans lequel il précise que "le site est fermé, en attendant
que cela change".La web radio
rock Kstor.com, qui a également décidé
de couper sa "web antenne", dresse un constat plus modéré
: "Kstor Radio cesse définitivement d'exister ! Nous avons
bien réfléchi, et c'est la seule solution viable pour nous, les
droits Sacem s'avérant trop élevés pour notre porte-monnaie".
Mais la réaction dans le monde des
webradios associatives est loin d'être uniforme : certaines
structures ont décidé de se plier à la demande
de la Sacem en s'appuyant sur des soutiens financiers. "A l'origine,
Bide-et-Musique.com était un hobby d'équipes. Nous avons
créé la webradio sous la forme d'une association pour
nous permettre d'affronter ce genre de difficultés, explique Emmanuel
Chanteloup, président de l'association éponyme. Nous demandons
désormais aux auditeurs de nous aider en nous versant une
cotisation annuelle. Nous avons donc l'intention de payer et nous
sommes en train de finaliser notre contrat avec la Sacem pour cette
année."
De son côté, Julien "zgeblez",
président de l'association Zone Art, créée
en 2001 et qui exploite la webradio Rocknzone.net dédiée
à la découverte de nouveaux talents, indique n'avoir
jamais reçu de mail de la Sacem. "Mais nous avions pris
les devants et nous avons nous-même contacté la Sacem afin d'effectuer
la régularisation."
Contactée par le JDNet, la direction
de la communication de la Sacem indique n'avoir pas entendu parler
d'une récente campagne de relance, dont elle serait à
l'origine, pour régulariser la situation des webradios associatives
face aux droits d'auteurs. Mais le sujet reste visiblement sensible
puisqu'aucune circonstance atténuante n'est accordée
aux webradios prises en défaut. "Si une webradio ne
peut payer ce forfait mensuel qui reste raisonnable, c'est que le
projet n'est pas viable", glisse-t-on du côté
de la Sacem.
C'est oublier un peu vite que ces webradios
sont justement émises par des associations "à
but non lucratif". Le mystérieux mail de la Sacem envoyé
aux diverses webradios associatives rappelle qu'aucune source de
revenus n'est d'ailleurs tolérée : recettes publicitaires,
sponsoring, affiliation, d'abonnement. Même l'échange
et le partenariat sont proscrits, deux méthodes d'action
qui constituent pourtant des fondamentaux pour lier les sites amateurs
entre eux. A la décharge de la Sacem, il est vrai que dans
la jungle des initiatives prises dans le domaine des webradios,
il est parfois difficile de déterminer les réelles
exploitants.
[Philippe Guerrier, JDNet]