Sorte de Tamagoshi en ligne, le jeu Kochonland
a déjà su fédérer une communauté de
plus de 10 000 internautes grâce au bouche à oreille
. Le principe est simple : nourir chaque jour un cochon virtuel et l'amener
jusqu'à un poids suffisant pour qu'il soit vendu à l'abattoir.
Selon les niveaux, le jeu se complique et gagne en stratégie. Derrière
Kochonland, c'est toute une culture de l'Internet gratuit et communautaire
qui perdure.
Comment avez-vous eu l'idée
de créer Kochonland et comment cela s'est-il passé ?
Ludovic Sarrazin. Il y a cinq ans, je réalisais un film promotionnel
pour une coopérative porcine en Bretagne. J'ai donc été en contact avec
de nombreux éleveurs pendant plusieurs semaines. Je crois que j'ai aimé
ce métier et les gens qui le pratiquaient. Au départ, j'avais l'idée de
faire un jeu de carte autour du métier d'éleveur de porc, j'ai donc, pendant
cinq ans, noté toutes mes idées, dessiné et établi la règle du jeu etc...
Je voulais faire un jeu - et peu importait le support - où plusieurs personnes
pouvaient jouer en même temps. Après reflexion, je me suis tourné vers
le web. J'ai commencé alors à apprendre le PHP et mysql, à réaliser
les visuels et à faire des essais. Lorsque j'ai considéré que le premier
niveau était "viable", je l'ai mis en ligne sur mon propre serveur avec
une ligne ADSL et je suis allé sur les forums en invitant les internautes
à venir y jouer. Au bout d'une semaine ma ligne ADSL saturait et mon serveur
ne fournissait plus : j'ai dû stopper les inscriptions le temps
de trouver un hébergeur. Le directeur technique de SDV, notre hébergeur,
était également un joueur, il m'a contacté et l'aventure a réellement
commencé.
Combien
de personnes collaborent à la gestion du site ?
Deux personnes : Olivier Coudre et moi-même. Nous programmons et réalisons
les visuels. Sans Olivier, de nombreuses fonctions du jeu n'auraient pas
pu voir le jour, mes connaissances en programmation étant, hélas,
limitées.
Kochonland est-il
devenu une activité à plein temps ?
Oui, un plein temps multiplié par deux !!! Nous y travaillons douze heures
par jour plus le week-end. Mais nous considérons cela normal : Kochonland
est un site récent à qui il faut apporter un grand soin, un peu comme
un nouveau-né !
Quel est votre
parcours personnel ?
J'ai une formation d'assistant réalisateur. J'ai d'abord travaillé sur
la radio Europe 2 La Rochelle, puis dans diverses sociétés
de production (vidéo et cinéma) avant de travailler au sein de la société
Explore, spécialisée dans l'imagerie 3D. Kochonland est maintenant une
autre étape dans ma vie professionnelle et personnelle. La gestion d'un
site comme celui ci est une nouvelle expérience pour moi : j'en apprends
tous les jours et c'est très enrichissant.
Le site est-il un pur
site perso ou est-ce qu'il a été réalisé dans le cadre d'une activité
professionnelle ?
A l'origine, Kochonland était un site perso réalisé pour une quarantaine
de joueurs, au bout de trois jours il y en avait 300. A ce moment là,
je me suis dit qu'il fallait entrevoir la possibilité d'en faire un site
professionnel rentable. Plus les jours passaient, plus il y avait de joueurs
et plus cela me confortait dans cette idée. Mais sans moyens financiers,
il est difficile d'avancer vite. Je ne veux pas prendre trop de risque
non plus... Le temps me dira comment va évoluer le jeu mais, s'il
continue ainsi, il est fort probable que je monterai une société pour
le gérer. En attendant, la société Explore, dans laquelle je travaille,
me représente et gère les contrats.
Quelle est l'audience
du site ?
Le site compte environ 305 000 visites et 140 000 visiteurs
uniques par mois. Nous tenons ces statistiques de notre hébergeur SDV.
Peut-on détailler les
différentes sources de vos revenus via Kochonland ?
Le jeu est gratuit. La seule source de revenus de Kochonland sont les
appels audiotel, les ventes de T-shirt Kochonland et les bandeaux publicitaires.
Nous travaillons avec les régies Adverline, Cibleclick et Promobenef.
Il s'agit uniquement d'une commercialisation au coût par clic. Mais nous
sommes aussi prêts à accueillir des anonceurs en direct...
Faut-il encore qu'ils veuillent bien venir annoncer chez nous ! Sans ces
différentes sources de revenu, le jeu s'arrêterait, ou du
moins ne pourrait pas être développé aussi rapidemment. Pour l'instant,
le chiffre d'affaires de Kochonland est très bas : 2.300 euros par
mois. Il nous permet tout juste d'assurer l'hébergement, les frais pour
la promotion du site, ainsi que les différents frais de déplacements.
Mais si un sponsor veut se déclarer, il sera toujours bien reçu !
Pensez-vous que cette
activité peut vous permettre de vous faire vivre ?
Dans l'immédiat, c'est impossible. A moyen terme, je le pense. En tous
cas, nous allons faire le maximum. Grâce à nos emplois extérieurs à Kochonland,
nous pouvons développer le site sans prendre trop de risque. L'emploi
du temps est plus difficile à gérer, mais on s'arrange.
Combien y a-t-il de personnes
inscrites ? Le rythme des inscriptions a-t-il tendance à se ralentir ?
Il y a eu 12.000 inscriptions depuis la création, le 20 octobre 2002.
Aujourd'hui, nous comptons plus de 7.200 joueurs et, en fin de chaque
journée, environ 90 % des joueurs sont venus s'occuper de leur kochon
et de leur exploitation. Nous n'avons pas noté de ralentissement, bien
au contraire, nous comptons une centaine d'inscriptions par jour.
Un site à forte audience
vous a-t-il déjà proposé un partenariat ou un rachat de Kochonland ?
Pour l'instant, Kochonland n'est pas à vendre. Le Centre de Documentation
des Métiers du Porc (CDMP) nous a contacté il y a un mois. Nous
nous sommes rencontrés pour parler partenariat et nous seront présents
au Salon de l'agriculture, en février, en partenariat avec lui. Quand
on y pense, c'est assez drôle de voir un jeu d'élevage de kochons virtuels
au milieu de véritables cochons.
Comment gérez-vous
le forum, le bistrot et le chat sur votre site ?
Le forum est, en quelque sorte, auto-géré : les joueurs s'aident
entre eux. Pour le bistrot, nous avons mis en place un programme qui filtre
les messages. Au moindre message contenant un mot vulgaire, le joueur
est banni du bistrot et du forum. Nous sommes très stricts là-dessus
car nous avons de très jeunes joueurs (d'une dizaine d'année environ)
et nous ne voulons pas qu'ils soient exposés à ce type de langage. Nous
avons eu une fois un cas de propos racistes sur le forum que nous avons
réglé immédiatement en détruisant le
compte des joueurs en cause et en transmettant leurs coordonnées aux autorités
compétentes. Kochonland est devenu, en quelques mois, un véritable site
communautaire où les gens ont plaisir à se retrouver et il faut que cela
dure. En ce qui concerne le chat, nous nous en occupons très peu, il y
a quelques modérateurs bénévoles qui font très bien leur travail.
Comment assurez-vous votre
promotion du site ?
Par l'intermédiaire d'échange de bannières et en laissant des messages
sur les forums. Depuis le lancement, de nombreux articles sont écrits
sur Kochonland. Le jeu a même eu les honneurs de France 2 et France 3.
Et nous avons la chance que le bouche à oreille fonctionne particulièrement
bien pour Kochonland.
Sur le plan technique,
comment fonctionne Kochonland (développement, serveur, etc.) ?
De la manière la plus simple possible : langage HTML, DHTML, PHP, Javascript
et base de données Mysql, le tout sur un serveur mutualisé qui, pour l'instant,
ne nous a pas fait défaut. Les images sont au format GIF (fixes et animées).
Quel prestataire utilisez-vous
pour l'hébergement ?
La société SDV Plurimédia, implantée à Strasbourg, qui d'ailleurs nous
a énormément aidés. Je tiens à remercier Messieurs Degoulet et Gasmi pour
leur assistance.
Comment voyez-vous Kochonland
dans deux ans ?
Le jeu aura les cinq niveaux prévus, la durée de jeu sera de deux ans
(à "Kochonland" vous pourrez, en plus d'être éleveur,
occuper le poste de directeur d'abattoir et de supermarché) et nous pensons
pouvoir rassembler plus de 50.000 joueurs francophones. Kochonland sera
également traduit en anglais pour les joueurs anglophones. En tout, nous
espérons convaincre entre 150.000 et 300.000 joueurs de venir s'amuser
avec nous.
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[Florence Santrot, JDNet]