Peer-to-peer : les majors changent de tactique
Par le Journal du Net (Benchmark Group)
URL : http://www.journaldunet.com/0306/030627riaa.shtml
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Vendredi 27 juin 2003

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L'Association américaine de l'industrie du disque (RIAA) en a assez de courir après les Napster, Kazaa et autres Morpheus. Malmenées par une baisse des ventes de 25% en trois ans, déçues par les débuts des plates-formes de téléchargement légales, les majors sont plus que jamais déterminées à faire respecter le Digital Millennium Copyright Act, loi de 1998 relative à la protection des droits d'auteur. La RIAA a cette fois décidé de s'attaquer directement aux utilisateurs des réseaux peer-to-peer en lançant d'ici deux à trois mois plusieurs centaines de plaintes aux Etats-Unis.

Les utilisateurs qui distribuent le plus de fichiers seront prioritairement visés, a déclaré la RIAA. Cependant, l'organisation souligne avec force que quiconque offre des fichiers musicaux illégaux est susceptible d'être poursuivi. "La loi est claire et le message qui doit être envoyé (…) doit être aussi clair. Cette activité est illégale, vous n'êtes pas anonymes quand vous vous y adonnez, et cela peut avoir de vraies conséquences", a déclaré le président de la RIAA, Cary Sherman.

La RIAA va commencer dès cette semaine à rassembler des preuves et à préparer des plaintes. Concrètement, elle va utiliser des logiciels qui permettent de scanner les répertoires publics contenus sur les réseaux peer-to-peer et de télécharger les fichiers illégaux qui s'y trouvent. Ces répertoires contiennent tous les fichiers disponibles au téléchargement mais aussi des informations permettant d'identifier le fournisseur d'accès des utilisateurs. Une simple assignation suffit ensuite pour que le FAI soit contraint de délivrer le nom et l'adresse de l'internaute incriminé. C'est ce qui s'est passé pour Verizon.

Les prévenus se verront infliger des dommages et intérêts, assortis d'une injonction de cesser toute activité de distribution de fichiers. La RIAA a ajouté qu'elle n'enverrait pas forcément d'avertissement avant l'assignation en justice. La rigueur qu'elle affiche est destinée à décourager les millions d'utilisateurs potentiellement visés par ses attaques, tout comme l'affaire opposant en mai la RIAA à quatre étudiants qui distribuaient des fichiers illégaux sur le réseau de leur faculté avait permis de faire fermer simultanément d'autres réseaux de ce type.

Les utilisateurs individuels ne sont pas les seuls à pouvoir se faire du souci. Les entreprises sont également concernées, dans la mesure où les employés disposent d'une connexion Internet. En mars, les maisons de disque ont envoyé près de 300 lettres d'avertissement à des entreprises américaines dont les réseaux avaient été utilisés pour échanger des fichiers musicaux protégés. Du coup, de plus en plus de sociétés ont recours à des logiciels de filtrage - pas toujours efficaces - pour détecter et bloquer l'accès aux sites peer-to-peer.

Pour accentuer encore un peu plus la pression, une campagne de communication sans précédent a été déployée depuis deux mois dans la presse écrite, à la radio et à la télévision, et même par messagerie instantanée. Cette campagne met en scène des artistes connus qui témoignent du risque que l'échange illégal de fichiers fait courir à l'industrie du disque, à la création et aux artistes anonymes. Missy Elliot, Shakira ou encore Sheryl Crow se sont ainsi prêtées au jeu.

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C'est la première fois que l'action des majors est appuyée par autant d'acteurs du monde du divertissement. L'Association nationale des éditeurs de musique, la Fédération américaine des artistes de radio et de télévision, des auteurs, des distributeurs, ont notamment participé à la campagne de communication. Même l'industrie cinématographique, réticente jusque là, commence à bouger. Universal a récemment fait condamner un homme qui avait diffusé sur Internet une version pirate du film Hulk avant sa sortie.

[Raphaële Karayan, JDNet]