JDN.
Vous avez été le prestataire streaming de référence
pour Loft Story et Star Academy. Vous rempilez pour Nice People, le nouveau
programme de télé-réalité de TF1...
Dominique Delport.
Effectivement. Nous nous sommes associés au nouveau
programme de d'Endemol France. C'est un dispositif très important
pour Streampower qui mobilise une vingtaine de collaborateurs. Les équipes
seront partagées entre Paris et Nice. Des clauses de confidentialité
m'empêche de communiquer librement sur ce sujet. Mais il est clair
qu'un dispositif multi-canal accompagnera cette nouvelle émission.
J'ai déjà dénombré une trentaine de sites
non officiels qui abordent ce nouveau programme. Preuve que l'engouement
est déjà au rendez-vous.
Quels
enseignements tirez-vous du "streaming live" événementiel ?
Les dispositifs cross-média sont désormais
des recettes éprouvées. Le niveau de technicité est
de plus en plus important, ne serait-ce que pour gérer la volumétrie
et créer des revenus. Loft Story a été la première
opération convergente en télévision : pendant trois
mois, nous avons dû géré 20 000 streams en simultané.
M6 a reconnu que cette expérimentation a coûté extrêmement
chère en terme de bande passante. Mais il faut relativiser ce coût
au regard du chiffre d'affaires généré par le programme.
Nous avons été ravis d'être associés dans l'écriture
de cette nouvelle grammaire des médias et nous essayons maintenant
de valoriser cette expertise.
Comptez-vous exploiter ce savoir-faire pour
votre propre compte ?
Nous travaillons sur un très beau projet de télévision
ADSL, qui va démarrer à la rentrée avec des partenaires
très connus. Ce sera le premier projet de streaming et de télévision
ADSL en MPEG-4. Il est initié par Push TVi, une société-soeur
de Streampower que je préside en parallèle.
Comment est né
le concept du nouveau site de Kad & Olivier ?
Il s'agit d'un site teasing du nouveau
film de Kad & Olivier "Qui a tué Pamela Rose", un
film co-produit par Gaumont France, TF1 Films Production et LGM productions.
Le projet Internet, qui a démarré
il y a deux mois, va mettre en scène une enquête humoritistique
des deux agents du FBI, qui sont joués par Kad & Olivier. Actuellement,
nous sommes en phase de recrutement des joueurs internautes. Ensuite,
une formation à la FBI Academy aura lieu et nous passerons à
la phase de l'enquête. L'animation en Flash et en streaming, essentiellement
audio, se déroulera tout au long du mois de mai en attendant la
sortie du film, prévue le 4 juin. Le tout sera exploité
dans un mode-multicanal. C'est dans la lignée du projet que nous
avions mené en 2002 avec Alain Chabat à l'occasion de la
sortie de son film "Mission Cléopâtre". D'ailleurs, Gaumont a choisi de
travailler avec le même partenaire FAI : Club-Internet. Un nouvel
onglet vient d'être mis en place sur son portail haut débit.
Comment êtes-vous parvenu à séduire
le groupe Bolloré, qui se montre très discret sur les dossiers
Internet ?
Nous sommes devenus une filiale du groupe Bolloré en octobre 2001.
Nous voulions simplifier la structure du capital de la société.
Désormais, il existe une société holding commune,
Rivaud Média, entre le groupe Bolloré et les quatre directeurs
associés de Streampower. Le groupe Bolloré montre beaucoup
d'ambitions dans le domaine des médias. Streampower a notamment
participé au groupe de travail la future chaîne TNT du groupe
Bolloré [Ndlr : le dossier de chaîne TNT du groupe
Bolloré - Direct 8 - a été retenu par le CSA].
Ce sera une chaîne de direct. Elle donnera donc naissance à
des programmes interactifs déclinés sur Internet.
Dans quelle mesure les services haut débit
constituent-ils un réel marché ?
Actuellement, nous avons autant de foyers haut débit
que de foyers abonnés à TPS. Le marché des services
haut débit commence à atteindre une taille critique. Le
streaming en live payant de LCI.fr est un vrai succès depuis le
début du conflit en Irak. J'ai même la conviction que le
live gratuit va revenir et sera financé par des annonceurs. Ce
retour du streaming gratuit sera facilité par la baisse du prix
de la bande passante, qui a été divisé par quatre
ou cinq en deux ans. Du coup, les investissements sont plus raisonnables.
On peut attaquer ce marché à travers des stratégies
de niche. Par exemple, Streampower est en train de développer une
application haut débit dédiée à la musique
classique pour le compte de Radio France. Nous avons un autre projet de
fitness vidéo haut débit avec Jet Fit. Le marché
des entreprises et des organismes institututionnels est également
très intéressant pour valoriser les ressources vidéos
sous forme de catalogues en ligne.
Les annonceurs se sont-ils aussi emparés
du haut débit ?
Les comportements évoluent également. Les
campagnes publicitaires en streaming ou en Flash vidéo se développent
beaucoup. Nous avons élaboré la dernière campagne
AGF dans ce sens.
Peut-on assurer de bout en bout la fluidité
d'un flux streaming ?
Une réflexion en amont sur toute la chaîne
de diffusion est nécessaire. On peut contrôler l'ensemble
de la chaîne du moment qu'on ne pousse pas trop les limites du haut
débit. C'est plus facile pour le streaming d'un programme TV que
le streaming d'un film bourré d'effets spéciaux, très
gourmand en terme d'informations ligne par ligne. Par exemple, pour le
cas de l'UEFA, nous streamons l'ensemble des tirages au sort en vidéo
à 220 Ko. La qualité de l'image est absolument bluffante
dès lors que la source est préservée. Chez Streampower,
nous sommes équipés en download satellite : les flux sont
reçus sur nos décodeurs satellites et sur notre plate-forme
d'encodage. Si nous disposons d'un signal d'une très grande propreté
à la source, avec du flux MPEG-2 à deux mégabits,
les résultats sont étonnants en sortie à 220 Ko à
la source. En revanche, si vous streamez à 450 Ko pour des utilisateurs
haut débit à 512 Kbits, le dernier kilomètre du réseau
saute.
Pour les diffuseurs
de webstreaming, le choix entre les players Windows Media (Microsoft),
Real (Real Networks) ou Quicktime (Apple) est-il déterminant ?
Cela dépend des usages. Il existe des Content Delivery
Network (CDN) qui font payer moins cher la diffusion en fonction des logiciels
utilisés. Le coût des licences serveurs n'est pas les même
et les prestataires CDN les répercutent sur leurs coûts de
bande passante. Historiquement, des secteurs comme le cinéma américain
favorise le format Quicktime. Les chaînes d'information live favorisent
plutôt Windows Media ou Real. Du côté de Streampower,
nous sommes partenaires des trois players. Cette concurrence permet d'intensifier
les progrès technologiques tous les trois à six mois. Mais
on observe un mouvement de fond autour de la rationalisation de la norme
MPEG 4. Au bout de la chaîne, là-encore, l'objectif est de
faciliter la consultation des vidéos par les internautes.
Estimez-vous qu'un marché de production
de contenu haut débit peut émerger ?
Actuellement, les fournisseurs d'accès Internet
n'achètent pas ce type de produits. Je crois que le marché
ne peut se développer qu'autour de l'advertainment. Certes, la
production de court-métrages streamés coûte moins
chère qu'une production télé. Mais, dans une logique
industrielle, les modèles restent encore trop fragiles. En attendant,
il existe d'autres approches possibles comme la diffusion de contenus
par satellite qui bascule en diffusion IP.
Existe-t-il encore des problèmes de gestion
des droits sur Internet ?
Il n'y a plus de problème de DRM. Movie System,
qui exploite le service de films à la demande NetCiné, peut
le confirmer : aucun film en ligne n'a été craqué.
Le piratage est réalisé par les DVD ou des caméras
introduites dans les salles de cinéma. Ensuite, les films pirates
sont placés sur Internet.
Qu'est-ce qui vous
a le plus étonné en terme de contenus haut débit
récemment ?
La saga Terry Tate de Reebok sur Internet est géniale
: ce sont des petits films autour d'un joueur de football américain
qui a pour mission de pulvériser les employés d'une entreprise
pris en flagrant délit de baisse de productivité. Je rêve
également de mener un projet comparable à la saga des films
BMW sur Internet pour un constructeur automobile français. Bon,
d'accord, il y avait Bruce Willis, John Woo et Madonna derrière
la caméra. Mais je ne désespère pas. Je suis convaincu
que l'Internet est un média de promotion de très grande
puissance.