Laurent Edel (Good Futur) : 
"Les nouvelles start-ups ne peuvent compter que sur leurs propres ressources"

Par le Journal du Net (Benchmark Group)
URL : http://www.journaldunet.com/itws/it_edel.shtml
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07 janvier 2003

2003 sera-t-elle l'année du retour de la génération "nouvelle économie" ? Laurent Edel, cofondateur de l'incubateur Republic Alley, et Chine Lanzmann, cofondatrice du portail féminin Newsfam, reviennent en piste pour le projet Good Futur qui se propose d'explorer, aux quatre coins du monde, les nouvelles idées de business. Les internautes peuvent déjà s'inscrire à la newsletter d'information Good Futur pour suivre cette nouvelle aventure. En attendant, pour débuter l'année sous la bonne humeur, Laurent Edel va présenter mercredi prochain la soirée Webisdead.org. Une soirée qui a pour but "d'enterrer définitivement cette période folle de la nouvelle économie".


Propos recueillis par Philippe Guerrier le 07/01/2003


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JDNet. En quoi consiste le projet Good Futur ?
Laurent Edel. Notre nouvelle activité démarre réellement ce mois-ci avec un tour du monde pour effectuer une veille technologique internationale : Chine, Japon, Australie, Canada, Suède, Lithuanie et Etats-Unis, où nous allons nous rendre à Palo Alto et à Berkeley. Nous voudrions sortir de la grisaille Internet que nous avons connue en 2002 et créer un carnet de tendances des grandes idées business pour favoriser la création d'entreprises. C'est notre ambition. Cet observatoire ne tourne pas forcément autour des NTIC, même si leurs usages doivent entrer dans la trame des projets d'entreprises.

Quelles sont les grandes tendances que vous avez retenues comme points de départ pour ce projet ?
Nous en avons retenu trois : les nouvelles idées business (NDLR : résumé sous le malheureux acronyme NIB) à la maison, les NIB éthiques et les NIB technologiques. Nous voulons développer des entreprises "post-bulle Internet" qui sont innovantes et rentables. Actuellement, en France, on recense 130 000 créations d'entreprise par an. C'est peu par rapport au nombre de Français qui souhaitent devenir entrepreneurs, notamment parmi les jeunes qui se sont sentis pousser des ailes lors de la période de la nouvelle économie. Maintenant, je trouve qu'ils ont mûri : ils sont plus modestes et pragmatiques.

Vous avez déjà trouvé un exemple d'entrepreneur NIB en France ?
J'ai en tête l'exemple d'un entrepreneur à Ville d'Avray (Hauts-de-Seine) qui développe depuis son domicile un service de vente de vins par achats groupés en utilisant uniquement l'e-mail. Il a réalisé un chiffre d'affaires de 150 000 euros au bout de dix mois. C'est un exemple de NIB à la maison. On retrouve un peu l'esprit "garage" propre aux start-ups.

Que devient Republic Alley ?
L'incubateur s'est recentré sur un volet unique : l'investissement. Depuis décembre 2001, je ne suis plus opérationnel chez Republic Alley. Mais je ne voulais pas pour autant que tout ce qui avait été monté depuis 1999 dans l'immeuble parisien du 18 Faubourg du Temple disparaisse. La Mairie de Paris ayant un plan de pépinières et d'infrastructures très ambitieux pour accueillir des entreprises avec le projet Paris Développement, j'ai proposé qu'une partie de leur équipe s'installe dans nos locaux chargés de symboles. Christian Sautter, chargé du développement économique et des finances de la Mairie de Paris, a accepté ce projet d'implantation. Le bail de 1 700 m² a été signé début novembre. Les locaux abritent des espaces d'accueil pour trois types d'entreprises : des designers, des stylistes et des prestataires technologiques. Pour le moment, il n'existe aucun lien structurel entre Paris Développement et Good Futur. Nous n'avons réalisé pour la Mairie de Paris qu'une prestation de conseil en communication à l'occasion de l'inauguration d'une pépinière high-tech du côté du quartier de la Villette.

Quel bilan dressez-vous des incubations effectuées au sein de Republic Alley ?
10% des sociétés incubées ont stoppé leurs activités. Les autres continuent leur développement en réalisant des chiffres d'affaires qui montent à un million d'euros et qui se positionnent sur des créneaux porteurs. Elles ont survécu car elles se sont adaptées à la nouvelle donne. En attendant la prochaine vague...

Justement, quand prévoyez-vous la prochaine vague ?
Je n'en sais rien. L'activité économique est très ralentie aujourd'hui et le niveau de l'investissement en France n'est pas glorieux. Cette situation devient inquiétante. Nous avions pris de l'avance dans des activités liées aux domaines de la mobilité et de la télévision interactive mais, faute d'investissements, nous allons perdre en compétitivité. Pour le moment, il est très difficile de trouver du capital d'amorçage.

Quels conseils donneriez-vous pour les jeunes entrepreneurs NTIC ?
Il faut compter au moins un an avant d'effectuer une première levée de fonds. Ce qui veut dire que l'entreprise doit savoir se passer de capital-risque et donc rester en configuration minimum pendant cette période. Les nouvelles sociétés doivent prouver rapidement la pertinence de leur positionnement et convaincre leurs interlocuteurs qu'il existe un marché. Aujourd'hui plus qu'avant, l'aspect "time to market" est crucial. Il faut également regarder du côté des technopoles françaises pour éventuellement créer des liens qui facilitent le développement de projets TIC.

Avez-vous une idée de la prochaine "killer app'" de l'Internet ?
En France, je n'ai pas découvert récemment de véritables innovations. D'où l'idée de voir ce qui se passe dans le reste du monde.

Que pensez-vous du dispositif Re/Zo 2007 lancé par le gouvernement Raffrin en faveur de la société de l'information ?
Honnêtement, je ne l'ai pas lu dans le détail. Mais je suis persuadé de l'importance des pouvoirs publics dans le développement de l'usage des NTIC en France. J'observe simplement qu'au-delà des cercles de réflexion et des comités d'experts montés sous l'impulsion des pouvoirs publics, il faut passer à l'acte.

Avez-vous gardé des contacts avec le Président de la République Jacques Chirac depuis son passage à Republic Alley en mars 2000 ?
Non.

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Estimez-vous que l'Internet a singulièrement changé le mode de fonctionnement des entreprises ?
J'ai eu des échos qui ne sont pas très clairs et même contradictoires à ce sujet. Certes l'usage du mail s'est vulgarisé, mais il me semble que le développement de l'Internet dans les grandes entreprises n'a pas eu de très grandes répercussions dans leurs modes de fonctionnement. Il y a bien de nouveaux outils de communication interactifs, mais cela ne change pas fondamentalement les cultures d'entreprise.

Quelle est votre première résolution 2003 dans vos usages Internet ?
Faire de la soirée Web is Dead* que j'anime mercredi prochain un événement digne de la splendeur d'antan.

*Sur webisdead.org, les internautes peuvent voter pour le pire et le meilleur de l'Internet. A l'occasion de la soirée de clôture mercredi, douze prix seront remis dans des catégories plus ou moins loufoques comme le prix de la technologie ou du hardware défunt, le prix de la meilleure revente ou encore du "concept le plus dead".

Les start-ups toujours soutenues par Republic Alley
Après avoir délaissé son activité d'incubation, Republic Alley s'est recentré sur la partie investissement. Sur son site, la société indique "avoir participé" au lancement de start-ups comme Publibook (édition en ligne), Cantoche.com (création de personnages 3D animés interactifs), 7P4 (gestion de contenu), Code 511 (conseils en sécurité), Pneumopartners (auscultation à distance) et Omniservices (cartes prépayées Internet). Parallèlement, Republic Alley est actionnaire des sociétés Freelance (recherche de professionnels indépendants en ligne), Paraschool (soutien scolaire en ligne), Natoora (livraison de produits frais) et Mobiligence (agence de développement en téléphonie 3G).


Consultez la fiche de Laurent Edel dans l'annuaire JDNet des managers du Net.