19/04/01
Le
Peer-to-Peer en huit questions
Le
concept du peer-to-peer est très à la mode ces
derniers temps, et des lecteurs nous ont demandé de
clarifier le sujet comme nous l'avions fait pour J2EE.
Si vous souhaitez que nous traitions de la même manière
d'autres notions, n'hésitez pas à nous
le faire savoir.
Question
: Que veut dire peer-to-peer?
Cet acronyme, que l'on peut retrouver sous ses formes p2p
ou "point à point" veut littéralement
dire: pair à pair. Ce concept introduit ainsi une relation
d'égal à égal entre deux ordinateurs
ou systèmes qui sont souvent dénommés
"hôtes".
Question
: Quelle est l'origine du peer-to-peer
?
Le peer-to-peer tire ses racines des infrastructures d'internet
et a donc toujours existé. Les systèmes faisant
partie de ces infrastructures sont souvent dénommés
"hôtes" et basés sur des systèmes
Unix. Chaque système peut se comporter tour à
tour comme client ou serveur. La récente vague du peer-to-peer
est la conséquence de la démocratisation du
matériel informatique puissant et des connexions haut
débit qui rendent possible l'utilisation de ces technologies.
Pour prendre un exemple, les systèmes Unix ou Linux
installent par défaut tout une série de serveurs
(mail, web, dns...), souvent identiques à ceux que
vous trouvez chez un fournisseur d'accès par exemple.
Question
: Quelles
sont les différences entre peer-to-peer et client/serveur
?
Le modèle client/serveur repose sur une ou des machines
serveurs et des machines clientes. Ces machines ne sont pas
égales et les applications des machines clientes ne
peuvent pas fonctionner sans serveur. Dans le modèle
peer-to-peer, toutes les machines peuvent assumer les mêmes
fonctions.
Question
: Existe-t-il
du faux et du vrai peer-to-peer ?
Oui. En effet, le recours à un serveur central peut
être nécessaire pour faciliter une partie des
taches à effectuer. Par exemple, le site de partage
de fichiers Napster, à l'origine de la vague médiatique,
est un "faux peer-to-peer" : un serveur central
centralise le nom des fichiers partagés par les internautes
et permet à ceux-ci d'effectuer des recherches. Une
fois le fichier trouvé, il est transféré
entre les deux machines directement sans passer cette fois
par le serveur central. Des systèmes comme Gnutella
ou Freenet peuvent, en revanche, être considérés
comme du vrai peer-to-peer car leurs fonctions peuvent fonctionner
sans serveur central.
Question
: Quelles
sont les applications du peer-to-peer à part l'échange
de fichiers ?
Ce concept est utilisable pour de nombreuses applications.
On peut citer des projets comme celui de la grille de calcul
européenne menée par le CERN de Génève.
Le concept est applicable au stockage, avec par exemple le
projet OceanStore, mais aussi aux applications d'entreprise
plus traditionnelles. Ainsi GrooveNetworks commercialise un
outil de type intranet/workflow en peer-to-peer. De même
NextPage édite des outils de gestion de contenu peer-to-peer.
L'avantage de ces solutions est l'indépendance vis
à vis de l'infrastructure centrale, ainsi que la mise
à disposition de l'information directement à
sa source. On peut considérer que cette technologie
promet d'introduire une mutualisation massive des ressources
informatiques, tant au niveau de l'information que de l'espace
de stockage ou de la puissance de calcul.
Question
: Ma
vie privée est-elle protégée lorsque
j'utilise des outils peer-to-peer ?
Pas nécessairement. En effet les adresses IP des utilisateurs
peuvent être récupérées lorsque
le logiciel est centralisé (comme Napster). Lorsque
celui-ci est décentralisé (comme Gnutella),
les utilisateurs sont identifiables par leur fournisseur d'accès.
Aux USA, Excite@Home n'a pas hésité à
menacer tous ses clients utilisant Gnutella de résiliation
de leur contrat. Autrement dit, le FAI n'a pas hésité
à aller regarder en détail ce que faisaient
ses clients sur le net. On peut espérer que la situation
sera différente en Europe, traditionnellement plus
protectrice de la vie privée. Le projet Freenet, en
combinant cryptographie et virtualisation du stockage (vous
ne savez pas ce que vous avez sur votre disque) paraît
être le réseau le mieux armé pour la protection
de la vie privée.
Question
: Les
réseaux peer-to-peer peuvent ils s'écrouler
?
Techniquement, les réseaux peer-to-peer décentralisés
du type Gnutella ou Freenet sont tributaires de la puissance
matérielle et de la quantité de bande passante
de leurs membres qui constituent chacun un noeud du réseau.
Ils fonctionnent donc particulièrement bien quand chaque
participant disposent d'une connexion permanente et haut débit.
A l'inverse, les utilisateurs raccorder avec une ligne téléphonique
classique peuvent grever les performances. Sur un plan non
pas technique mais politique et économique, les réseaux
peer-to-peer sont sous la menace d'un lobbying intense de
la part des grandes multinationales de production/distribution
de contenu (les majors), qui voient dans ces réseaux
une menace pour leur profitabilité. A l'inverse, de
nombreuses entreprises du secteur informatique et non des
moindres investissent dans cette technologie. Au vu des progrès
technologiques et de l'engouement des internautes pour la
communication directe et la désintermédiaton,
il est probable que ces réseaux se développent
et s'améliorent.
Question
: Existe-t-il
un modèle économique pour le peer-to-peer ?
C'est la question piège. En ce qui concerne les technologies
vendues par des éditeurs à des fins professionnelles,
le modèle est celui, classique, de l'édition
de logiciel. En revanche, pour les réseaux de partage
de contenu, la question est plus problématique. Si
ceux-ci sont centralisés, le modèle d'abonnement
payant pour les utilisateurs et remunérateur pour les
auteurs et producteurs a été envisagé.
On peut aussi penser que le développement des agents
intelligents de commerce électronique, qui permettent
d'acheter et de vendre automatiquement et directement entre
les parties, selon des règles programmées, pourraient
être une solution. Autre piste, les micro-paiements
directs. Enfin, certains ont même établi un parallèle
entre le modèle du peer-to-peer et le concept de l'économie
du don, une théorie datant du début du 20ème
siècle et reposant sur des contributions volontaires...
[Ludovic
Blin, JDNet]
Pour en savoir plus : http://www.openp2p.com/
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