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Interviews |
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Guillaume
Ravery |
Directeur
général adjoint France |
Brio Technology
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Editeur américain présent sur le marché
des plates-formes d'accès aux données décisionnelles,
Brio Technology
s'est spécialisé depuis sa création dans
les outils d'analyse et de reporting. Guillaume Ravery, directeur
général adjoint de la filiale française,
revient sur le positionnement de son entreprise en termes d'applications
analytiques et de reporting de masse, et nous apporte sa vision
d'un marché qui connaît de profonds changements.
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Propos recueillis par François Morel le 10
mai 2001 . |
JDNet
Solutions: quelles
sont les tendances actuelles de la demande en applications analytiques
?
Guillaume Ravery:
La
demande s'oriente vers l'élargissement de la plate-forme
d'accès. Auparavant, les utilisateurs devaient être
spécialisés, ce qui impliquait des connaissances
en matière de requêtes SQL et de structure des
bases de données. Aujourd'hui, nous observons les conséquences
de l'émergence du datawarehousing (les entrepôts
de données) et de l'arrivée à maturité
des technologies Internet et intranet. Or, dans ce nouveau contexte,
tout utilisateur réclame un accès aux bases de
données.
Certaines personnes ont un besoin d'applications analytiques
dans leur environnement métier, comme le suivi des ventes
pour les commerciaux, l'analyse de la relation client dans un
cadre marketing ou l'analyse comportementale chez les opérateurs
mobiles qui souhaitent réduire le taux de rotation de
leur clientèle. Il convient donc de packager les applications
selon le besoin de l'utilisateur en lui donnant la possibilité
d'interagir avec les moyens d'accès à ces données
adaptées aux environnements métiers. Auparavant,
les outils de requête et d'analyse de l'ancienne génération
réclamaient une certaine culture informatique et suscitaient
des reproches, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui du moins
en ce qui nous concerne.
Ceci
dit, la demande émanait-elle de la population d'utilisateurs
elle-même ?
Il
est clair qu'auparavant, la demande émanait des directions
informatiques plutôt que des directions utilisatrices.
Mais à présent, le sujet se démocratise
et les utilisateurs sont de plus en plus à même
d'identifier leur besoin et de le transmettre à la DSI.
Ensuite, celle-ci joue le rôle de la structure qui passe
l'appel d'offres. Nous assistons donc à un élargissement
des périmètres concernés par le décisionnel,
qui est devenu une brique constitutive d'un ensemble plus large
regroupant sous un vocable unique de portail les plates-formes
d'entreprise pour accéder à l'information.
A côté des populations d'utilisateurs qui présentent
des besoins en applications analytiques, d'autres expriment
une demande cantonnée à la récupération
quotidienne, hebdomadaire ou mensuelle de reporting statique.
Par exemple, pour une direction commerciale, il s'agit de récupérer
le tableau des ventes au format PDF ou tout simplement une information
fiable et à jour. Celle-ci arrive de façon préformatée
et utilisable dans le contexte de l'activité quotidienne.
Mais ces personnes n'ont pas besoin d'un outil client pour passer
au travers de fonctions de type drill-up ou drill-down.
Comment
répondez-vous à ces deux types de besoins ?
D'abord, nous avons élargi
le spectre de la couverture initiale, tout en restant spécialisés
dans les applications analytiques et le reporting. Nous pouvons
aussi répondre à la demande identitaire de reporting
de masse exprimée par des utilisateurs non spécialisés,
qui ne réclament pas une interaction avec les données.
A priori, un outil de requête et d'analyse classique ne
permet pas le reporting de masse. Les seuls acteurs spécialisés
dans ce domaine sont Actuate, Seagate (devenu Crystal Decisions)
et Brio. Et là, nous fournissons l'outil BrioReport qui
permet de diffuser des centaines de rapports à partir
de grandes bases de données.
A côté, notre offre comprend Brio Enterprise pour
l'analyse, et Brio Portal qui donne un accès à
toutes les applications de l'entreprise. Ce produit n'est pas
limité aux outils Brio et est ouvert à tous les
types de documents et d'informations en général.
Vous
évoquiez le terme de portail en tant que vocable unique.
Peut-on dire que tout converge vers cette notion, et que des
éditeurs d'horizons très différents (contenu,
EAI, décisionnel) vont devenir des concurrents ?
Le terme de portail est arrivé
il y a deux ou trois ans. Nous sommes une société
qui, dès le départ, a pris le parti d'élargir
l'accès aux informations pour les utilisateurs. Ce choix
est à moitié issu de notre vision du marché,
car nous avons une culture visionnaire, mais il provient également
du fait que nos clients le réclamaient. Nous avons fusionné
avec Sqribe Technology en 1998 car leur portefeuille de produits
comprenait un portail. Plutôt que de tout redévelopper
de zéro, nous avons pensé qu'il serait plus rentable
d'intégrer leur solution au sein de notre offre.
En fait, il existe clairement une convergence de tous ces outils.
Chacun y va de son langage obscur, ce que nous appelons le syndrome
du médecin en marketing, et nous essayons de nous défendre
de cela sans faire passer des vessies pour des lanternes. Notre
portail permet d'accéder à l'information quelle
qu'elle soit. Or, chacun est rentré sur ce marché
de façon différenciée. Certains, comme
nous, y sont arrivés par le biais des applications analytiques,
d'autres comme Sybase par exemple à partir des bases
de données. Il existe également des éditeurs
qui sont né à 100 % sur ce marché
comme Plumtree, ou même Mediapps qui arrive par le contenu
sans mise à jour des données en temps réel.
Et par rapport à cela, nous sommes davantage concurrents
de Plumtree que de Mediapps.
Dans
un contexte d'intégration avec les applications, allez-vous
jusqu'à fournir des outils de récupération
des écrans mainframes avec votre portail ?
Sauf à monter des usines
à gaz, nous ne pratiquons pas l'hébergement d'applicatifs
mainframes mais nous le ferons peut-être plus tard. Nous
travaillons davantage dans le sens de l'intégration avec
les applications CRM, ERP et SCM (gestion de la chaîne
logistique). Ce positionnement est cohérent par rapport
aux applications analytiques de l'entreprise car il ne sert
à rien de déployer partout le même outil
de façon indifférenciée. Mais cela prend
un sens de disposer dans une couche donnée les informations
demandées par l'utilisateur. En fait, pourquoi installer
des outils clients sur les postes des personnes qui n'en ont
pas besoin.
Quelle
est votre position par rapport à ces outils clients?
Ceux-ci coûtent
cher à l'entreprise, à la fois parce qu'ils réclament
un déploiement, mais aussi une administration et de la
formation. Et si les outils sont directement téléchargés
à partir d'un serveur, cela pose des problèmes
d'encombrement de la bande passante. Mais ce sont des soucis
techniques auxquels personne n'échappe, ni Brio, ni les
autres sociétés qui offent du reporting de masse
comme Actuate et Computer Associates. Sur la partie requête
et analyse, tous les éditeurs de plates-formes décisionnelles
proposent la même chose. Mais ni Business Objects, ni
Cognos, ni Microstrategy qui sont fournisseurs sur ce segment
ne peuvent répondre aux besoins simultanés de
1 500 utilisateurs.
En fait, nous sommes les seuls à avoir intégré
les deux aspects des outils analytiques, avec une solution globale
qui part du reporting. Cela implique de fait un outil installé
sur le poste client, car pour l'instant nous n'avons pas trouvé
mieux. Et cela nous permet avec Brio Report d'assurer une diffusion
des rapports auprès de milliers d'utilisateurs.
Etes-vous
parvenus à résoudre le problème de la montée
en charge dans un contexte de diffusion de masse ?
Il s'agit plus précisément
du "report bursting" qui passionne les directions
informatiques. Chaque fois que des requêtes sont effectuées
engageant la diffusion de rapports, cela crée du trafic
sur le réseau. Mais l'avantage d'un outil de reporting
de masse est de produire le nombre de rapports voulus à
partir d'une seule requête. Il suffit de faire tourner
celle-ci la nuit, d'engager les 250 ou 300 itérations
nécessaires, et enfin de distribuer le reporting produit.
Or, nous avons réconcilié cela avec le besoin
des utilisateurs d'accéder aux données. Et la
DSI est très contente, car nous répondons aux
besoins de toutes les familles d'utilisateurs tout en ménageant
le trafic et la bande passante, le tout derrière une
interface unique.
Vous
avez signé récemment un partenariat avec Informatica,
qui se déclare aussi maintenant comme un acteur de bout
en bout sur le marché décisionnel. N'êtes-vous
pas concurrents ?
Il n'existe pas de redondance entre
nos applications et les leurs, mais plutôt une complémentarité.
Lorsque vous vous situez au niveau du poste de travail, vous
ne voyez que la partie émergée de l'iceberg. Prenons
un besoin simple qui consiste à récupérer
des données à partir d'un ERP comme SAP R/3 ou
JDEdwards. L'utilisateur final ne connaît pas les processus
complexes qui s'éxécutent entre les applications.
Et pourtant, il existe des étapes d'extraction, de réplication
vers d'autres bases, de nettoyage car toutes les données
ne sont pas forcément exactes, d'aggrégation car
la base de données source n'est pas modélisée
dans ce sens et il faut la reconstituer a posteriori,
et enfin d'alimentation d'un schéma relationnel ou multidimensionnel.
Voici en substance ce que fait Informatica.
D'autre part, cet accord technologique prend aussi tout son
sens car nous n'avons pas de couche sémantique chez Brio,
et ils ont défini un standard d'échanges de données,
baptisé MX-2, que nous pouvons récupérer
nativement. Avec eux, nous offrons une compatibilité
clef en main pour récupérer l'information brute
en vue d'analyser et de rappatrier l'historique associé
aux données. MX-2 est une API qui permet de faire l'échange
des métadonnées entre le référentiel
fourni par Informatica et ceux des autres éditeurs. Sur
la chaîne, ils se situent en amont, et Brio en aval.
Mais
Informatica produit maintenant aussi des rapports... Alors qu'en
pensez-vous ?
Que le modèle de coopétition
fonctionne vraiment. Nous sommes aussi associés à
Hyperion, avec qui nous sommes complémentaires en se
connectant nativement sur leur entrepôt de données
EssBase. Mais Hyperion fournit aussi des applications analytiques
prêtes à l'utilisation.
Et clairement, Brio ne fait pas tout. Nous ne pratiquons pas
l'extraction ni l'ETL, et nous restons cantonnés sur
les parties correspondant à l'analyse et à la
restitution. Et par dessus, nous fournissons un portail qui
permet de réconcilier des utilisateurs qui n'étaient
pas concernés auparavant par ce type d'applications.
Car le décisionnel est véritablement une base.
Vous
parliez de couche sémantique. Comment rentre-t-elle en
ligne de compte ?
Si nous reprenons la chaîne
de traîtement, cela correspond à l'étape
de constitution des métadonnées (informations
décrivant les données). Nous demandons à
un extracteur de génerer des métadonnées.
Et contrairement à certains de nos concurrents qui utilisent
des couches sémantiques propriétaires, comme les
Univers chez Business Objects ou les Catalogues chez Cognos,
l'utilisateur récupère les métadonnées
de façon transparente dans le dictionnaire Brio. Chaque
fois qu'il se reconnecte au référentiel dans lequel
sont situés les documents, les modifications en amont
seront automatiquement retranscrites sur son portail sans intervention
manuelle. Chez Brio, nous appelons cela l'OMI, ou Open Metadata
Interpreter.
L'OMI récupère nativement les métadonnées.
Si l'utilisateur se connecte avec Business Objects, il aura
un Univers sous les yeux qu'il faudra administrer. Et donc,
toute modification de la base de données signifie une
modification de l'Univers. Avec Brio, il dispose d'un middleware
en mode client/serveur. Car les métadonnées ne
posent problème que dans un environnement client/serveur.
Donc, en utilisant ce middleware de façon transparente
avec Oracle, par exemple, l'utilisateur voit apparaître
automatiquement toutes les métadonnées Oracle
sans faire appel à une couche sémantique. Dès
le départ, nous avons conçu notre plate-forme
pour ce travail décisionnel. Et dès 1995, nous
avions déjà une solution complètement isofonctionnelle
web et client/serveur. Aujourd'hui, cela peut paraître
normal mais il y a quatre ans cela ne l'était pas.
Quelles
vont être les prochaines évolutions de votre plate-forme
?
La tendance que nous allons suivre
va dans le sens de l'intégration de plus en plus étroite
entre notre portail et nos outils de requête et de reporting,
le but ultime étant d'arriver à un seul produit.
Aujourd'hui, nous fournissons trois produits, et demain, il
suffira d'insérer un CD dans le lecteur pour disposer
d'un intégré qui permette de faire son marché.
Nous lançons aussi des applications analytiques prépackagées,
et nous sommes en train de construire des solutions verticales.
En ce moment, nous sommes en période de redéfinition
de la stratégie. Nous réconcilions de plus en
plus de périmètres d'utilisateurs avec des interfaces
qui répondent à leurs besoins.
Comment
voyez-vous l'avenir des technologies décisionnelles ?
Pour résumer l'ensemble du
débat, nous pensons que l'ère des produits informatiques
est terminée, et nous rentrons dans une époque
de solutions. Les utilisateurs ne veulent pas un concept, ni
des outils bureautiques comme Word et PowerPoint, mais quelque
chose qui réponde vraiment à leur besoin. Il s'agit
vraiment de l'éternel problème de répondre
aux besoins des utilisateurs tout en respectant les contraintes
de la DSI. Et dieu sait que parfois, leurs positions divergent.
Pour nous, cela revient à faire disparaître l'application
analytique Brio Enterprise en proposant une intégration
de plus en plus étroite, c'est à dire un seul
produit intégré. A côté, nous travaillons
avec tout le monde, aussi bien Informatica qu'Ascential Software
(ex-Informix) ou Sybase. Car nous n'avons pas à orienter
nos choix. Nous sommes là pour nous couler dans le système
d'information existant et non pour le refaire.
Enfin, l'autre tendance s'oppose à la non-prise en compte
actuelle de la sécurité. Si derrière un
portail en général, la récupération
des informations nécessite le fait d'accéder à
trois applications, il faut trois mots de passe. Et ici, nous
proposons un single sign on. Si l'entreprise possède
un ou des annuaires LDAP, vous récupérez nativement
les logins avec Brio et rentrez partout où vous avez
accès avec un seul et identique mot de passe.
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Nommé directeur général adjoint de
Brio Technology France en mai 2000, Guillaume Ravery,
46 ans, était auparavant son directeur marketing depuis
octobre 1999. Avant d'intégrer la filiale française
de l'éditeur à sa création en janvier 1997,
il a été responsable partenaires chez un prestataire
du nom de Cambridge Computer Graphics, puis directeur général
de la société Control Systems pour la France.
Diplômé de l'European Business School, il a démarré
sa carrière dans le monde de la CAO/DAO.
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