Les liquidateurs d'une entreprise
en faillite se retrouvent dans la position inconfortable
de l'arbitre, avec la délicate mission d'évaluer
les actifs de la société et de trancher
dans le vif. Impossible
évidemment de satisfaire à la fois les investisseurs,
les repreneurs et les employés. Dans le cas de
KPNQwest France, il semble que ce soient les investisseurs
qui aient été les mieux servis, au grand
dam des employés : ils devraient être
une dizaine seulement à ne pas pointer à
l'ANPE - sur les 150 que comptait l'entreprise.
Le liquidateur a choisi
de démanteler KPNQwest France et de la revendre
par petits bouts. Une solution qui a selon toute vraissemblance
le mérite d'être intéressante financièrement,
mais qui fait fi des offres de rachat globales avancées
par certains repreneurs potentiels - offres qui
auraient préservé une partie au moins
des emplois de l'opérateur.
Motivations
obscures ?
Difficile
cependant de connaître les motivations profondes
qui ont animé le choix des liquidateurs :
le mandataire judiciaire n'a pas souhaité répondre
à nos questions. Cependant, au delà de
l'intérêt financier des investisseurs,
on peut avancer deux raisons valables : premièrement,
le modèle économique de KPNQwest présentait, selon
une source proche du dossier, des aspects hasardeux
- on peut donc douter qu'un quelconque repreneur aurait
pu renflouer le navire et sauver une grande partie des
emplois.
L'autre raison est plus
subtile : le principal repreneur de KPNQwest n'est
autre que ... KPN Telecom, la société
qui avait fusioné avec Qwest pour constituer
le groupe qui fait aujourd'hui faillite. L'entité
juridique de KPN n'a pas disparu, et elle acquiert aujourd'hui
une partie de l'infrastructure technique de feu KPNQwest,
pour la somme de 4 millions d'euros. KPN est un repreneur
idéal : l'entreprise connaît logiquement
l'infrastructure technique de KPNQwest sur le bout des
doigts. Mieux : elle est le repreneur le plus indiqué
pour assurer la continuité du service de KPNQwest,
pour les clients qui n'ont pas migré.
Une
réussite économique
Reste
à lister la longue caravane des repreneurs :
KPN Telecom a repris l'essentiel du matériel.
Telia fait également partie des gros repreneurs :
ils ont porté leur dévolu sur du matériel
et sur la totalité des fibres en France. Quant
à ADP Telecom et AOL, il sont récupéré
les machines qui leur étaient dédiées
chez KPNQwest. La majeure partie de l'infrastructure
de KPNQwest a donc trouvé preneur.
Au final, cette liquidation
n'aura pas été une braderie : "L'essentiel
de l'infrastructure de KPNQwest France a été
repris" confirme Jean-Michel Laveissière,
le PDG d'Ipercast qui a lui-même participé
aux négociations. Il est même
plutôt étonnant que le matériel
ait trouvé preneur à un prix relativement
raisonnable, alors que les infrastructures télécom
sont en surcapacité notoire.
Dommage toutefois que les
liquidateurs n'aient pas cherché à faire
comprendre les raisons de leurs choix : beaucoup
d'observateurs ont eu la désagréable impression
que cette faillite se réglait dans les coulisses.
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