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Dans
de nombreuses entreprises, les projets de gestion des
connaissances ont promis d'améliorer la communication
entre les services, de faire émerger une intelligence
collective qui améliorerait la compétitivité. Qui permettrait
de construire une société fonctionnant en réseaux, de
faire fonctionner une "économie du lien", ajoute Jean-Yves
Prax dans son dernier ouvrage, Le Manuel du Knowledge
Management. Dans ce domaine, l'auteur n'en est pas
à son coup d'essai. Il a déjà publié deux ouvrages qui
ont servi de références : Le guide du Knowledge Management
et Manager la connaissance dans l'entreprise.
Alors
un ouvrage de plus pour ce spécialiste du KM, chargé
de cours à Science Po et à l'ENA ? Oui, mais un de ceux
qui font date. En effet, Jean-Yves Prax a ajouté à son
manuel un sous-titre : Une approche de 2è génération.
L'auteur a évidemment procédé à une mise à jour des
concepts techniques mais ce n'est pas là ce qui justifie
le sous-titre. Non, on trouve cette justification dans
les réponses qu'il apporte à cette question simple :
qu'est-ce qui n'a pas marché dans ce que l'on a essayé
de mettre en place jusqu'ici ? Et c'est bien dans cette
analyse des erreurs passées, dans cette confrontation
des concepts théoriques à la réalité des projets en
entreprise que réside la principale force de l'ouvrage.
Non sans humour, Jean-Yves Prax analyse huit causes
d'échecs du Knowledge Management. En voici quelques-unes.
K-ware, le progiciel miraculeux. Dans ce cas, les projets
échouent parce que les entreprises, obnubilées par le
concret et le palpable, réduisent le Knowledge Management
à sa dimension technologique.
K=mc2
ou la connaissance en équations. Un expert brillant
chercheur universitaire a mis au point une méthode de
modélisation des connaissances tellement géniale...
que personne ne la comprend.
Le
Kdisc ou le cerveau en disque dur. L'échec est dû ici
à une méprise: celle de croire que la totalité de l'expérience
acquise par un être humain peut être codifiée et capitalisée
dans des bases, recueils ou autres livres de connaissance.
Le
Kacou, alias Kcoût. Echec bien connu de la GED (Gestion
électronique documentaire) en son temps, il consiste
à faire de la capitalisation une corvée obligatoire
(...) sans jamais donner du sens ou relier la démarche
à la création de valeur. La démarche est alors vue comme
un centre de coût : elle vient diminuer la productivité
et les marges.
Pour
éviter de reproduire ces échecs, Jean-Yves Prax fournit
des recommandations qui s'appuient sur l'analyse de
situations rencontrées en entreprise. Plusieurs études
de cas sont fournies dans le livre : elles relatent
des expériences menées à EDF, à la Snecma ou chez Renault
et permettent de constater comment peuvent être appliquées
les méthodes de gestion des connaissances décrites par
l'auteur qui en fournit un panorama assez complet.
Enfin,
Jean-Yves Prax resitue le Knowledge Management dans
sa dimension humaine, en se penchant sur ces nouveaux
métiers d'intermédiation de l'information (Knowledge
Manager, contributeur, rédacteur technique, webmestre,
etc.). Et surtout en abordant la question cruciale du
pilotage des projets de gestion de la connaissance.
Le sujet est d'importance : combien de projets se sont
essoufflés faute de n'avoir pas su mettre en place l'accompagnement
nécessaire pour utiliser les outils mis en place ? L'usage
des logiciels collaboratifs n'a rien de très naturel,
par exemple. On ne peut que se réjouir de la publication
des premiers principes qui doivent régir le fonctionnement
de ces communautés virtuelles. Ils pourront servir de
fondations à cette société fonctionnant en réseaux.
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