La complexité et l'évolution permanente
des technologies et la dépendance de plus en forte de l'entreprise à
son système informatique, augmentent les risques de sinistres informatiques
et les préjudices y afférents.
A la suite d'un sinistre informatique, une entreprise
subit non seulement des conséquences techniques directes, mais aussi des
pertes financières non négligeables souvent difficiles à
évaluer.
L'impact
d'un tel sinistre est d'autant plus important qu'une entreprise est fortement
dépendante de son système d'information, ce qui est le cas de la
majorité d'entre elles comme de celui des collectivités locales.
Bien souvent, les entreprises se trouvent démunies
juridiquement face à un litige informatique.
Entre le maître d'uvre, l'intégrateur
et l'éditeur, les responsabilités sont parfois difficiles à
déterminer, chacun ayant, de plus, une tendance naturelle à rejeter
la faute sur l'autre.
Se pose alors la question de l'opportunité
d'une expertise pour déterminer l'origine du sinistre et les responsabilités
encourues.
Comment évaluer préalablement
l'opportunité d'une expertise ?
Une expertise doit permettre d'atteindre
des objectifs tout en étant en adéquation avec les enjeux stratégiques
et financiers d'un litige.
Bien des entreprises se sont engagées dans
une procédure expertale pour aboutir à un résultat pas toujours
à la hauteur de leurs attentes avec parfois des coûts supérieurs
aux préjudices réclamés.
Il faut envisager toutes les alternatives susceptibles
de répondre aux objectifs de l'entreprise victime de sinistre informatique.
Une concertation entre opérationnels et
dirigeants des entités en cause peut parfois permettre d'aboutir à
une solution amiable.
Pas d'expertise sans un minimum de preuves
En toute hypothèse, il convient
de disposer d'un minimum d'éléments probants à l'appui de
ses réclamations si l'on ne veut pas risquer une déconvenue, y compris
en expertise.
Bien souvent, notamment en matière de progiciels,
les difficultés résultent en réalité d'erreur d'utilisation
qui sont aujourd'hui parmi les premières causes de sinistre identifié
dans les entreprises.
Dans cette hypothèse et sauf preuve contraire,
la responsabilité repose sur la victime du sinistre.
Ainsi, la nature des difficultés doit être
suffisamment identifiée pour envisager une expertise.
Les dispositions du Nouveau Code de procédure
civile rappelle à cet égard qu'une mesure d'expertise "ne peut
être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans
l'administration de la preuve" (article 146 NCPC).
Le plus souvent, le demandeur pourra se fonder
sur les échanges écrits entre les parties et les comptes rendus
techniques, et d'une manière générale, tout élément
susceptible de caractériser une faute d'ordre technique ou organisationnel.
A cet égard, l'expertise ne doit pas se
limiter aux griefs techniques mais s'étendre à toutes les difficultés
organisationnelles rencontrées dans la conduite du projet ou la réalisation
des prestations en cause.
Quel type d'expertise choisir ?
En fonction de la qualité des relations
entre les parties en cause, l'expertise peut être prendre une forme amiable
ou judiciaire, mais dans les deux cas doit être conduite par un expert inscrit
auprès d'une Cour d'appel garantissant l'objectivité et l'impartialité
requise.
Si la nature du sinistre et des relations le permet,
une expertise amiable peut être envisagée pour clarifier une situation
litigieuse, éviter des délais de procédures et permettre
aux parties de désigner, d'un commun accord, un expert.
En principe, ce type d'expertise facilite la conciliation
entre les parties et la possibilité d'une continuité des relations
contractuelles à l'issue de l'expertise, le cas échéant,
dans le cadre d'un protocole d'accord.
Si la nature des relations est conflictuelle, l'expertise
judiciaire apparaît plus appropriée puisqu'elle donnera lieu à
la désignation d'un expert par une juridiction qui en contrôlera
le bon déroulement.
Ce type d'expertise, plus contraignant, implique
des coûts spécifiques non négligeables qu'il convient d'évaluer
préalablement et de mettre en perspective avec les enjeux liés au
litige.
Une expertise pour évaluer son préjudice
Le rôle de l'expert est d'apprécier
non seulement les éventuelles anomalies ou bugs mais aussi les éventuelles
dérives notamment financières ou calendaires qui sont souvent à
l'origine d'une partie importante du préjudice subi par une entreprise
sinistrée.
La qualité du conseil et des mises en garde
des prestataires sera également appréciée par l'expert au
regard des règles de l'état de l'art et de l'étendue des
compétences de l'entreprise dans le domaine informatique.
Sur la base des manquements constatés et
de la démonstration des différents types de préjudices subis,
l'expert fera une évaluation du préjudice global qui pourra servir
de base à une demande de dommages et intérêts devant une juridiction
ou dans le cadre d'une transaction avec le ou les prestataires en cause.
En conclusion, l'expertise est une histoire d'évaluation
; de son opportunité jusqu'au préjudice que l'on peut espérer
en retirer.
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