La
formation à distance employant les technologies
de l'information, l'e-learning, est aujourd'hui plus
utilisée dans les entreprises et les centres
de formation professionnels que dans l'enseignement
supérieur. Dans le domaine de l'éducation,
se former derrière un ordinateur a été
pendant longtemps considéré comme incompatible,
voire contraire à la pédagogie.
Mais
l'Internet, qui fait aujourd'hui partie intégrante
de la vie des jeunes générations, ne pouvait
être ignoré par le milieu éducatif.
L'e-learning a donc fait son entrée sur les campus.
Et aujourd'hui : où en sont les universités
et les écoles du supérieur dans l'intégration
de logiciels e-learning ?
D'une
solution de formation à distance
L'e-learning
a encore du chemin a parcourir avant d'être totalement
intégré dans les programmes pédagogiques
et considéré comme une véritable
valeur ajoutée pédagogique. " L'e-learning,
pour les universités et écoles françaises,
a pour intérêt principal de pallier les
difficultés qu'implique une formation continue
ou à distance", explique David Fuentes,
responsable du secteur éducation chez X-perteam,
intégrateur de solutions de formation à
distance.
C'est
en effet le cas à l'ENST
Bretagne qui se sert de l'e-learning pour la préparation
en ligne des certificats d'enseignement spécialisés
(CES). Les étudiants préparent leurs cours
sur le serveur et se réunissent périodiquement
en classe pour une séance avec un " vrai
" enseignant.
Mais pas question de passer à du 100% e-learning
juge Gérard Madec, le responsable e-learning
de l'ENST Bretagne.
Même
raisonnement pour l'école Audencia
à Nantes : l'e-learning est un outil pédagogique
intégré dans le Campus Net, le portail
des étudiants. Mais il est pour l'instant très
peu utilisé car les enseignants ne fournissent
pas assez de contenu. "J'espère arriver
dans deux ans à une masse critique de cours qui
nous permette d'en faire une solution de formation à
distance commercialisable auprès des professionnels
", déclare Jean Guillemot, le directeur
du Campus Net et du e-learning. La solution choisie,
celle de l'éditeur Manréo, consiste essentiellement
à stocker les cours au fur et à mesure
sous la forme de vidéos synchronisées
avec les documents Powerpoint de l'enseignant.
A
l'université
de Metz l'e-learning n'intervient que dans la formation
continue dans le cadre de l'université ouverte
de Lorraine. Mais dans le pôle d'enseignement
mécanique, Patrick Gervais, un professeur se
sert quotidiennement de NetOp School, le logiciel de
contrôle de postes à distance d'Addjust
Technologies
pour maîtriser les moindres
mouvements de ses élèves, en classe même.
"Je peux prendre le contrôle des applications
et des postes des élèves pendant les cours
pour leur expliquer, je distribue et je ramasse les
documents simultanément
sans avoir besoin
de me déplacer à l'autre bout de la classe
!"
à
une démarche pédagogique
" Seules quelques universités comme l'université
de technologie de Troyes et la fac littéraire
Paul
Valéry à Montpellier ont entamé
une réorganisation de leur enseignement pour
l'intégrer dans leur pédagogie comme un
complément aux cours traditionnels ", résume
David Fuentes d'X-perteam.
Les initiatives des différentes Ecoles des Mines
sont également remarquables dans le sens où
elles visent à substituer progressivement aux
cours en amphi des cours en ligne. La Grande Ecole Virtuelle
les réunit d'ailleurs autour d'un projet d'intégration
de l'ensemble des ressources pédagogiques sur
une plate-forme unique de formation à distance.
Celle-ci devrait être opérationnelle pour
la rentrée 2004-2005. En attendant, c'est l'Enic-Telecom
Lille qui fournit l'assistance aux enseignants de chaque
entité des Mines pour la méthodologie
à adopter.
A
l'Ecole
des Mines de Paris, la plate-forme utilisée
a été développée en interne
; elle est destinée pour l'instant aux élèves
admis sur titre en deuxième année, et
qui doivent donc rattraper les enseignements de première
année. Les cours en ligne remplaceront bientôt
entre la moitié et les deux tiers des cours en
amphi. Le but étant ici clairement affiché
de faire des économies sur ces heures de cours
en présentiel.
A
L'Ecole des Mines de Douai, le projet est plus avancé.
Les cours en classe ont disparu le temps de mener deux
expériences. Durant plusieurs mois, les deux
professeurs initiateurs ont mis tous leurs cours en
ligne, dispensant ainsi les étudiants de venir
en cours et les laissant travailler à leur propre
rythme sur le serveur. Seule obligation : assister une
fois par semaine à une séance de deux
heures avec leur professeur, pour faire des exercices
et poser des questions sur les connaissances assimilées.
Bilan : "Les étudiants ont apprécié
cette autonomie. Pour une partie d'entre eux, l'e-learning
est aussi une manière de mieux appréhender
le retour en cours après après plusieurs
mois de stage pratique", explique Jean-Luc Harion,
professeur d'énergétique des machines.
Développement
spécifique ou plate-forme commerciale ?
Si les milieux universitaires scientifiques et les écoles
d'ingénieurs ont été les précurseurs
dans le développement technique de l'e-learning
dans leurs établissements, les outils développés
en interne ne suffisent pas aujourd'hui à répondre
des exigences d'ordre pédagogique. L'achat d'une
plate-forme et de nouveaux outils s'impose donc.
L'Enic-Telecom
Lille est cependant un bel exemple, puisqu'il commercialise
aux entreprises et aux établissements d'enseignement
une offre complète de formation à distance.
Plusieurs écoles y ont recours.
De
son côté, l'ENST Bretagne utilise Malted,
un outil développé dans le cadre de projets
européens, le système de travail collaboratif
BSCW
et le module Sympa pour la gestion de mailing list.
Mais à présent, pour sa formation continue,
l'école veut s'équiper et hésite
entre deux plates-formes gratuites issues du milieu
universitaire (Claraline et Ganesha)
et celle d'Oracle. Cette dernière a l'avantage
d'être totalement compatible avec le système
de l'école, mais affiche un prix trop élevé.
Citons
également la
plate-forme Pleiad proposée par le Conservatoire
nationale des arts et métiers (CNAM), aussi utilisée
par plusieurs universités.
Face
à toutes ses solutions, sur le marché
français, impossible de passer à côté
de WebCT,
une plate-forme logicielle américaine distribuée
en France par l'intégrateur X-perteam. Quarante-cinq
établissements d'enseignement supérieur
l'utilisent dont l'Université
Paris-Dauphine, le CNED, La Sorbonne, l'Université
technique de Troyes, l'INSA Rennes ou encore le Campus
numérique (regroupements de plusieurs universités).
Cette
solution a néanmoins deux grandes limites : son
prix, de 5 400 euros à 19 000 euros en fonction
du nombre d'étudiants, et ses lacunes en fonctionnalités
de travail collaboratif. Le Centre d'ingénierie
pédagogique de l'université de Dauphine
a d'ailleurs décidé, de compléter
son utilisation de WebCT par le système de travail
collaboratif BSCW, largement utilisé par d'autres
établissements pour sa gratuité.
Si
acheter une plate-forme d'e-learning est un cap si difficile
à franchir dans le milieu enseignant, c'est que
son utilisation n'est pas immédiate et que le
coût du fonctionnement s'annonce souvent plus
élevé que le coût d'acquisition.
C'est en particulier la création de contenu textuel
et visuel qui réclame le plus de travail
et l'entière collaboration des enseignants. A
titre d'exemple : une heure de cours filmé peut
représenter plusieurs dizaines d'heures de travail
de scénarisation avant la mise en ligne. Ce rapport
pourrait se réduire à quatre ou cinq heures
si les professeurs préparaient leur cours en
vue du support multimedia auquel il est destiné.
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