DSI
Logiciels libres et brevets logiciels sur une trajectoire de collision
Munich pourrait suspendre sa migration vers Linux en cas d'adoption de la nouvelle législation européenne sur les brevets logiciels. Aux Etats-Unis, plusieurs voix s'élèvent pour condamner les limites du système américain, dont IBM.  (06/08/2004)
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Brevets logiciels et Linux : des chiffres qui inquiètent
En mai 2003, la ville de Munich avait créé l'événement et un précédent mondial en décidant de faire migrer ses 14 000 postes de travail sous Linux. Cette semaine, un de ses conseillers municipaux veut en appeler solennellement à l'Etat allemand, suite à la sortie d'un document de la FFII évaluant le risque juridique que les brevets logiciels pourraient faire peser sur la viabilité du projet de migration.

La FFII (Association pour une infrastructure de l'information libre, basée à Munich) a en effet émis un rapport selon lequel une cinquantaine de brevets logiciels soumis au niveau européen pourraient être invoqués contre les solutions que la ville s'apprête à déployer.

Commentant ces résultats, le DSI de la ville de Munich a expliqué que si le rapport ne remet pas en cause son programme de migration dans l'immédiat, il le conduit malgré tout à envisager cette solution... L'autorisation des brevets logiciels serait "une catastrophe pour le projet de migration de la ville vers Linux, et pour l'Open Source en général", indique t-il.

L'enquête a été réalisée à la demande de Jens Muehlhaus, conseiller municipal (Vert) de Munich, également conseiller auprès de l'éditeur MySQL. Un porte-parole de son parti pointe une possible conséquence de l'autorisation des brevets logiciels : "un titulaire de brevets pourrait envoyer à la ville l'ordre de cesser d'utiliser ses programmes".

Son inquiétude ne porte cependant pas tant à court qu'à moyen et long terme, car il craint qu'une fois les brevets logiciels en place, il devienne de plus en plus difficile d'apporter aux applications des améliorations technologiques, ce qui "remettrait en cause leur compétitivité" face aux produits propriétaires. En d'autres termes, les brevets logiciels seraient une menace pour l'innovation.

Mettre les dirigeants européens devant leur contradictions

L'occasion pour le conseiller Muehlhaus de demander au maire de Munich d'avertir le gouvernement fédéral allemand de la menace que la légalisation des brevets logiciels représenterait pour "un grand nombre de PME". Ce faisant, il compte mettre les dirigeants européens devant leurs contradictions : comme la France, l'Allemagne promeut et déploie les logiciels libres dans l'administration mais approuve un projet de directive qui risque de les rendre rapidement obsolètes, sinon illégaux.

Alors qu'un brevet 'classique' porte sur procédé technique, un brevet dit 'logiciel' peut viser un principe, une idée. Les opposants à la légalisation en Europe expliquent qu'en tant que programmes, les logiciels sont déjà protégés par le droit d'auteur, au même titre que des romans, puisque tous sont techniquement des suites de caractères. En l'état actuel de la législation, il est donc interdit de copier du code de logiciels (à moins que sa licence ne le permettre), mais possible de coder la même fonction d'une autre manière.

Rappelons que l'Office Européen des Brevets, un organisme intergouvernemental chargé de gérer les dépôts de brevets, a accordé des milliers de brevets logiciels en dépit de la Convention Européenne sur les Brevets, qui, en 1974, a interdit le brevetage de logiciels et de formules mathématiques.

Ces brevets deviendront subitement légaux, donc utilisables dans un procès, si le principe des brevets logiciels n'est pas rejeté au cours de la procédure en cours au sein des institutions européennes, qui passe par un vote au Parlement Européen à la rentrée.

Au Etats-Unis, les brevets logiciels sont légaux, mais pas moins sujets à polémique qu'en Europe. Au salon LinuxWorld, qui se déroule cette semaine à San Francisco, plusieurs acteurs majeurs ont réagi à l'annonce d'une étude révélant que le noyau Linux enfreindrait potentiellement 283 brevets logiciels.

IBM n'a pas l'intention d'attaquer le noyau Linux

Sans surprise, IBM a annoncé par la voix d'un de ses vice-présidents, Nick Donofrio, qu'il ne comptait pas utiliser son portefeuille de brevets logiciels "contre le noyau Linux".

IBM possède l'un des portefeuilles de brevets logiciels les plus importants au monde, c'est également l'une des sociétés les plus impliquées dans le projet Linux de la ville de Munich. Le représentant d'IBM a appelé "la communauté des technologies de l'information" à s'aligner sur son engagement de non-agression juridique envers Linux.

Reste que Linux ne représenterait qu'une infime partie de l'enjeu de la propriété intellectuelle du logiciel libre. C'est en effet sur le terrain des applications de plus haut niveau, des environnements graphiques aux progiciels, que portent les enjeux financiers. Les distributions Linux comptent facilement plusieurs centaines d'applications (environ 15 000 pour une Debian par exemple). Certaines sont développées par la communauté, d'autres par des sociétés commerciales, donc concurrentes d'IBM.

Nick Donofrio a rappelé qu'IBM est "un gros supporter de Linux" et plus généralement du "mouvement d'ouverture" qui inclut logiciels Open Source et standards ouverts - ces derniers pouvant être utilisés dans des logiciels propriétaires tout en garantissant l'interopérabilité entre applications et l'absence de dépendance à un éditeur.

Le vice-président d'IBM a toutefois pris soin de préciser que la firme aurait "bien sûr" recours à son arsenal de brevets si elle était "forcée de se défendre". Quand SCO a attaqué IBM en l'accusant de ne pas avoir respecté la licence d'Unix, Big Blue a contre-attaqué en lançant trois procès pour violation de brevets.

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Brevets logiciels et Linux : des chiffres qui inquiètent

Les intentions d'IBM sont encore peu de chose à côté de la récente prise de position de Red Hat, qui a choisi de s'en prendre directement au système d'attribution des brevets américain. L'éditeur Linux a annoncé une alliance avec l'OSDL (Laboratoire de Développement de l'Open Source, l'employeur de Linus Torvalds) pour "faire changer le mode d'attribution des brevets et des droits d'auteurs aux Etats-Unis".

"Nous ferons de notre mieux pour modifier le dispositif", a déclaré Matthew Szulik, président de Red Hat. Un système qu'il connaît bien, pour avoir lancé en août 2003 un programme de couverture juridique destiné à ses clients.

 
 
Alexandre Chassignon, JDN Solutions
 
 
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