HP, Lenovo, Oracle et Symantec : quatre sociétés qui se sont
lancées dans des opérations de croissance externe importantes et qui se
trouvent désormais confrontées à des incertitudes qu'elles soient
financières, juridiques ou organisationnelles.
Le premier doit faire face à un mécontentement
de ses actionnaires. Certes, le constructeur informatique publie un chiffre d'affaires
2004 de 79,9 milliards de dollars contre 73 milliards en 2003, et son résultat net s'établit à 3,4 milliards de dollars contre
2,5 milliards un an plus tôt, mais malgré cela, HP rétablit seulement le niveau de bénéfice qu'il a
connu en 1999, avec alors un chiffre d'affaires presque deux
fois inférieur.
Et
ce rétablissement s'est inscrit
dans la douleur. Après une année 2001 difficile où HP publie
un résultat net de 680 millions de dollars, la firme de Palo Alto décide de racheter Compaq. Une décision qui s'accompagne alors de plus
de 17 900 licenciements en 2002 et plombe le résultat net
qui atteint alors -903 millions de dollars. Sur les cinq dernières
années, la valeur de l'action d'HP a chuté d'environ 55%,
contre 32% pour IBM et 7% pour Dell.
Et le constructeur voit ses parts
de marché s'effriter lentement.
Anciennement numéro un des vendeurs de PC dans le monde en
2002, HP a suivi la croissance en volume du secteur, de l'ordre
de 11 à 12% par an, quand les ventes de son concurrent Dell
progressaient à un rythme supérieur à 20%. En 2004, selon
le cabinet d'études Gartner, Hewlett Packard se classe second
des constructeurs de PC dans le monde avec 14,6% du marché
contre 16,4% pour Dell.
La
majorité des bénéfices d'HP issus
de sa seule activité imprimantes |
Autre désillusion pour le groupe, la réunion de l'activité
grand public d'HP et celle plus professionnelle de Compaq
n'a pas engendrée les économies escomptées. Ainsi près de 70% du résultat net
du constructeur est issu de l'activité imprimantes. Un constat
qui a conduit actionnaires et analystes à proposer une scission
des différentes activités (lire l'article
du 09/06/2004). Or, en janvier 2005, la P-DG Carly Fiorina
coupe court aux rumeurs et décide de consolider les activités
du groupe plutôt que de les diviser (lire l'article
du 19/01/2005).
Deux jours plus tard, le Wall Street Journal affirme que le conseil d'administration
d'HP envisagerait de déléguer une partie des pouvoirs de Carly Fiorina,
P-DG et présidente du conseil d'administration, au profit
de Vyomesh Joshi, Ann Livermore et Shane
Robinson. La rumeur, démentie par HP le lendemain, illustre
néanmoins le climat d'incertitude quant à l'avenir du groupe.
Pour Lenovo, les problèmes sont tout autres. Ayant décidé
de racheter l'activité PC d'IBM en décembre 2004 pour 1,25
milliard de dollars (lire l'article
du 09/12/2004), le constructeur chinois se heurte désormais
aux instances gouvernementales américaines. En effet, mardi
25 janvier, trois responsables républicains ont envoyé une
lettre à l'administration du président Georges W. Bush, exprimant
les risques en matière de sécurité nationale si l'opération
Lenovo / IBM avait lieu.
La
vente de l'activité PC d'IBM à Lenovo pourrait
être annulée. |
D'après Bloomberg, les instances
gouvernementales s'inquiètent du fait que des employés de
Lenovo puissent avoir accès à des informations confidentielles
par le biais d'usines IBM situées en Caroline du Nord. En
marge de ce problème, les actionnaires du constructeur chinois
se sont montrés sceptiques sur l'opportunité de ce rachat,
et l'action de Lenovo a depuis perdu près de 20% de sa valeur.
Chez IBM, le problème reste entier si la vente venait à être
annulée. En effet, d'après les chiffres communiqués par Big
Blue, l'activité PC aurait cumulé quelque 973 millions de
dollars de pertes à la fin de l'année 2004. D'autre part IBM
doit faire face à la concurrence des deux géants HP et Dell
qui tirent les prix vers le bas grâce à des productions en
volume largement supérieures aux siennes. En 2004, selon
Gartner, IBM détenait 5,5% du marché des PC en volume soit
plus de 10 millions d'unités vendues contre 27 millions chez
HP et 31 millions chez Dell.
Mêmes incertitudes des actionnaires chez le géant de la sécurité
Symantec, malgré de bons résultats trimestriels. Le groupe
enregistre en effet un chiffre d'affaires en hausse de 41%,
établi à 695 millions de dollars pour un résultat net de 164
millions de dollars. Malgré cette bonne santé financière, le rachat
du spécialiste du stockage Veritas en décembre 2004 pour 13,5
milliards de dollars (lire l'article
du 17/12/2004), les licenciements à prévoir et les annonces
sécurités de Microsoft sont autant de pièges qui attendent
l'éditeur. En conséquence, le titre Symantec a chuté, fin novembre, de 30 à 24,91 dollars.
Dernier exemple : le rapprochement
Oracle / PeopleSoft, devenu le prétexte à une reconquête
des clients déçus par cette annonce. Microsoft et SAP ont
ainsi lancé des programmes de migration accompagnées d'offres
de réduction et de maintenance particulières pour séduire les
anciens clients de PeopleSoft (lire l'article
du 21/01/2005). Côté salariés, 5 000 suppressions d'emplois
ont été annoncées, soit 10% de l'effectif des deux groupes
réunis. Reste à voir si, comme HP, Lenovo et Symantec, la facture financière sera elle aussi salée.
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