Comment l'open source a fait décoller les drones de l'Enac

Comment l'open source a fait décoller les drones de l'Enac Depuis plusieurs années, l'Ecole Nationale de l'Aviation Civile travaille sur des drones un peu particuliers : ils sont à la fois open source et "open hardware".

L'open source peut sensiblement accélérer à la fois le développement et la diffusion d'une technologie : le projet de drone open source "Paparrazzi" le montre une nouvelle fois assez bien. Ce projet de recherche de l'Enac (Ecole Nationale de l'Aviation Civile), a misé sur l'open source, et a ouvert non seulement ses composants logiciels mais aussi ses briques matérielles (voir notre article : l'Open Hardware en 5 questions).

Des contributions extérieures pointues

Cela a permis au projet de s'enrichir de contributions extérieures, parfois très pointues, et donc d'améliorer les capacités des drones et leur potentiel. "L'open source nous a aidés. Sans ses apports, nous aurions sans doute été dépassés", pense Catherine Ronflé-Nadaud, en charge du programme Drones de l'Enac. "Ouvrir la technologie nous a permis d'attirer de nombreuses collaborations et de rester à la pointe. Par exemple : nous ne sommes pas des experts des altimètres mais un laboratoire plus spécialisé dans ce secteur va pouvoir contribuer et améliorer cet aspect technique précis du projet en y apportant sa compétence."

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L'équipe dédiée aux drones de l'ENAC © C. Ronfle-Nadaud / ENAC

L'open source a aussi permis de mieux faire connaître le projet et ce labo de l'Enac, et donc de renforcer sa notoriété. Plusieurs laboratoires, du monde entier, apparaissent parmi les contributeurs. Une trentaine de nationalités participantes ont été recensées. "Je reste toujours un peu étonnée, par exemple lorsque je réalise que le projet Paparazzi a été analysé et utilisé par un laboratoire de la Nasa", poursuit la responsable du projet.

Si cette ouverture a facilité la diffusion et l'amélioration de la technologie, cette transparence a aussi permis d'éviter de devoir déposer des brevets, une démarche longue et coûteuse, et finalement pas toujours très adaptée aux laboratoires. Revers de la médaille : il a fallu gérer les contributions sans fourvoyer le projet, et maintenir un cap qui garantisse la cohérence et la stabilité du projet. "Un gros travail", de l'aveu de Catherine Ronflé-Nadaud.

Un contexte plus favorable à l'émergence des drones

Cette ouverture n'est évidemment pas l'unique raison du succès de Paparazzi. Le contexte est aussi plus favorable pour développer une telle technologie. Le projet est né en 2005, "mais, depuis, beaucoup de chose ont changé", admet Catherine Ronflé-Nadaud. A cette époque, les drones étaient plus confidentiels : ils n'avaient pas encore envahi le salon du Bourget, les rayons des grandes enseignes, les journaux télévisés de 20h, et n'étaient pas sérieusement envisagés pour surveiller certains vols ou filmer tout type d'événement. La technologie n'est pourtant pas nouvelle, puisque les drones ont fait leurs premiers vols il y a presque cent ans.  

Que s'est-il passé, comment expliquer cet engouement récent ? La technologie a-t-elle atteint un cap décisif dans sa maturité ? Pas vraiment : les drones ont en fait surtout pu indirectement profiter du raz-de-marée des smartphones, qui a justement commencé peu après le lancement du projet Paparazzi.

Ce que révèle le document technique "open hardware"

Stabilisateurs, accéléromètre, gyromètre, GPS : grâce à la philosophie "open hardware", la documentation technique de Paparazzi peut révéler que les drones et les smartphones partagent de nombreux éléments communs. "Nous utilisons les mêmes composants que les fabricants de smartphones", confirme Catherine Ronflé-Nadaud, qui précise cependant avoir plus d'exigences qu'eux concernant la précision et la fiabilité des capteurs. Mais globalement, grâce à la popularisation des smartphones, "les composants sont aujourd'hui plus petits, plus précis et moins chers", résume la responsable du projet. Aujourd'hui, pour bâtir, selon les indications du projet Paparazzi, un drone, un vrai à qui l'on peut donner une mission et qui sera autonome ou légèrement téléguidé ensuite, moins de 1000 euros en composants peuvent suffire.