Y a-t-il une vie après le métier de DSI ? Jean-René Lyon (ex-DSI d'Axa) : président de la chaire d'architecture informatique de Centrale Paris

Le CV de Jean-René Lyon est plutôt impressionnant. Diplômé de l'Université de Stanford, ce centralien a notamment été DSI du Crédit du Nord puis d'Axa, avant d'entamer un carrière d'entrepreneur plutôt réussie. En 2007, il se tourne vers l'enseignement supérieur et la recherche en créant la chaire d'architecture informatique de Centrale Paris.

La vocation professionnelle de Jean-René Lyon se résume ainsi : mettre de l'ordre dans des architectures informatiques complexes. Cette piste, qui structure toute sa carrière, naît de sa première expérience professionnelle comme consultant chez TECSI entre 1972 et 1978. L'ingénieur intervient alors au Crédit Lyonnais sur la refonte du système agences. Un chantier reconnu par la suite comme l'un des tous premiers déploiements français en client-serveur. "A partir de serveurs MVS, il s'agissait déjà de créer des synergies en se donnant les moyens de réutiliser des composants", commente-t-il.

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Jean-René Lyon est directeur du Centre d'excellence en architecture lancé en 2007 par Centrale Paris © Ceisar

En 1979, Jean-René Lyon est recruté par la BNP comme directeur de l'architecture du système d'information. La banque désire alors rattraper son retard sur le Crédit Lyonnais. En 1983, à 35 ans, il passe au Crédit du Nord, et prend la tête de la DSI. Il y retrouve son ancien directeur informatique au Crédit Lyonnais, Pierre Barberis, qui en est alors le directeur général. Là encore, Jean-René Lyon s'attelle à la refonte du SI, autour d'une architecture unique structurée en couches.

En 1988, il suit Pierre Barberis qui prend les rênes d'Axa, et devient DSI de la compagnie d'assurance. "J'appréciais sa manière de travailler : il était ambitieux, mais sans bureaucratie et sans langue de bois", commente Jean-René Lyon.

Chez Axa, sa mission est quelque peu différente. "Le groupe s'étendait, formé par acquisitions successives. Il s'agissait plutôt de créer des synergies en créant un socle de composants et d'applications réutilisables par chaque entité en fonction de ses besoins", explique Jean-René Lyon.

Après 3 ans chez Axa, l'homme a de nouveau soif de nouvelles perspectives. "On n'a qu'une vie. Et pour ma part, j'éprouve du plaisir quand je suis confronté à de nouveaux challenges", lance-t-il, avant de regretter : "L'image négative portée sur les informaticiens rendait ma progression difficile dans le groupe sur d'autres postes à responsabilité." Investi au Cigref, Jean-René Lyon avait eu l'occasion de partager son expertise en matière d'architecture avec d'autres DSI. Il se rend compte que son savoir-faire représente une certaine valeur.

"D'où l'idée de lancer un cabinet de conseil", enchaîne-t-il. Une nouvelle étape que le DSI appréhende pourtant. "Quand on quitte son poste pour lancer une entreprise, on sait ce qu'on perd, mais on ne sait pas ce qu'on gagne", prévient-il. "J'avais peur de ne pas réussir. Mais l'envie de me lancer était plus forte que la peur." Lyon-Consultants voit le jour en 1992.

"Au sein d'une société de services, les clients vous choisissent parce qu'ils vous apprécient, ce qui n'est pas toujours le cas des clients internes vis-à-vis d'une DSI", (Jean-René Lyon - Ceisar)

Le projet une réussite. La société travaille pour Renault, le Crédit Agricole, EDF, en s'orientant sur des projets de développement et de déploiement de nouvelles applications en mode coopératif MOE/MOA plutôt que contractuel. 

Un  travail que le jeune entrepreneur estime  beaucoup plus confortable que le précédent. "Au sein d'une société de services, les clients vous choisissent parce qu'ils vous apprécient, ce qui n'est pas toujours le cas des clients internes vis-à-vis d'un DSI", note Jean-René Lyon.

En 1998, la SSII compte 200 consultants. "J'avais atteint mes objectifs. Je commençais à m'ennuyer, j'ai décidé de vendre", poursuit Jean-René Lyon. "Je voulais m'arrêter. Je n'avais plus besoin de travailler." Lyon-Consultants est repris à CGI en 1998.

Mais après une année sabbatique, Jean-René Lyon décide de se relancer dans la création d'une entreprise. En 2001, à 53 ans, il crée Wyde. Son objectif reste en cohérence avec sa philosophie initiale : proposer un outil de structuration et de mise en œuvre de gros projets informatiques. "Une sorte de boîte à tout faire couvrant design, programmation, interfaces, workflow et migration", détaille Jean-René Lyon. Commercialisée au mauvais moment, juste avant la bulle Internet, l'offre peine à s'imposer.  

La société gagne un peu d'argent, mais n'amorcera véritablement son essor qu'à partir d'une réorientation de son produit vers le métier de l'assurance. "Nous avons réalisé un chiffre d'affaires de 6,5 millions de dollars en 2007, et devrions afficher une croissance de 50% cette année", se félicite le dirigeant.

Dernière étape de son parcours (?), Jean-René Lyon a donc pris la tête du Centre d'excellence en architecture de Centrale Paris (Ceisar) en 2007, tout en restant à la tête de Wyde. Une structure qui a pour but de définir des démarches et méthodes de modélisation d'architectures informatiques. Le Ceisar est soutenu par des DSI de grands groupes faisant face à des problématiques sur ce terrain : Air France, Total et Michelin. On y retrouve également sans surprise les DSI de BNP Paribas et d'Axa. La chaire publie régulièrement des livres blancs, et conçoit des programmes de cours à destination des formations initiale et continue de Centrale Paris.

"C'est un aboutissement pour moi. Je transmets ce que j'ai appris, tout en sensibilisant les ingénieurs à l'intérêt de l'informatique", conclut Jean-René Lyon.