Dotés de fortes compétences dans le cur de métier informatique, les techniciens
sont les candidats légitimes à des postes de managers IT. Appréciés pour leur
compréhension des problèmes techniques, leurs savoir-faire les dessert pourtant
parfois.
Les postes de managers IT sont des cibles de choix pour les programmeurs et
les développeurs. Pour y parvenir, ces derniers possèdent dans leur manche des
cartes fortes : leur technique. "J'ai commencé sur un poste de management mais
avec un fort bagage technique", explique Emmanuel Prévost, DGA de Meetic, et anciennement
directeur technique de la société.
Et le dirigeant de poursuivre : "J'estime qu'un manager IT doit avoir l'obligation
de la compétence pluridisciplinaire. Il doit savoir faire ce que font ses subordonnés.
Pour ce qui est des techniques de management, j'ai appris sur le tas". La prime
va donc à celui qui maîtrise le mieux les procédures et les parties techniques
de l'activité. Par ailleurs, les responsables informatiques issus de ces cursus
techniques tendent à reproduire le schéma de recrutement avec les personnes qu'ils
emploient. "Aujourd'hui, je manage une équipe composée de managers et de techniciens.
J'ai moi-même construit mon équipe en recrutant des profils fortement techniques.
Tous les managers que j'ai recrutés ont un cursus IT, et apprennent le management
sur le tas, tout comme moi", poursuit Emmanuel Prévost.
"J'essaie d'éviter le technique parce
que cela me tire vers le bas"
(Bruno Pennel, DSI de Sefico Berger) |
L'autre facette de la médaille de ce type de profil très technique, c'est que
l'aspect management d'équipe, travail stratégique, gestion de ressource risque
de pâtir des gouts prononcés de ces managers très techniques. Bruno Pennel, DSI
de Sefico Berger, société de transport, a choisi une solution radicale pour contrer
sa tendance techniciste.
"J'essaie d'éviter le technique parce que ça me tire vers le bas. Je suis naturellement
attiré par le technique, du fait de mes goûts et de mon parcours. Mais j'ai choisi
la solution de l'externalisation de nos fonctions informatiques, et je souhaite
orienter mon activité vers quelque chose de plus stratégique." Cette solution
extrême lui permet de se concentrer sur ce qui lui semble être le cur de métier
de son poste de DSI. "Lors de réunions, j'ai à arbitrer par exemple sur la question
de la multiplicité de nos fichiers clients. Ce type de décision stratégique, c'est
ça mon travail de DSI. C'est ça, plus l'aspect reporting de notre activité, et
le choix et la mise en place d'outil de mesure de la performance de notre activité".
Super Manager
Toujours est il que la technicité est un nécessaire fort à la crédibilité des
managers IT. " Dans l'informatique, les équipes techniques respectent généralement
celui qui a des compétences techniques et il faut au minimum parler le même langage
et même comprendre les problématiques assez finement. A moins d'être le "super
manager", il faut avoir une expérience du domaine concerné", explique Philippe
Arsac, P-DG du cabinet de recrutement informatique Eurowin Consulting.
Pour autant, il relativise aussi l'importance de l'expertise : "Il est exceptionnel
qu'un manager, surtout s'il manage une équipe importante, ait autant de compétences
techniques que les personnes de son équipe qui font cela quotidiennement. A l'inverse
un manager qui n'aurait aucune compétence technique aurait du mal à avoir du leadership
sur ses équipes". Et de conclure : "Il ne faut pas forcement attendre d'être considéré
comme un expert technique, il faut simplement avoir une expérience et une crédibilité
suffisante."
"La technique de management que
j'utilise consiste à créer des équipes réduites"
(Emmanuel Prévost - Meetic) |
A l'instar d'autres corps de métiers, les informaticiens apprécient donc d'être
managé par des informaticiens. Cela à sûrement à voir avec une culture et
un vocable commun, mais aussi l'idée répandue que si un problème à lieu, la compétence
technique du chef sera toujours le dernier recours. Problème, dans l'informatique,
l'évolution rapide des techniques nuit à ce type de shéma. "Le manager expert
qui veut être meilleur que chacune des personnes de son équipe rentre parfois
en concurrence avec elles ou n'a pas le temps de communiquer avec les équipes
car il est plongé dans les sujets au lieu d'apporter un recul", explique Philippe
Arsac.
Dès lors, il va s'agir de trouver un équilibre idéal entre l'implication des
managers dans la technique et leur rôle de gestion des ressources et des compétences.
Une parité dont Emmanuel Prévost, de Meetic, semble avoir trouvé la formule :
"La technique de management que j'utilise consiste à créer des équipes réduites,
8 personnes au maximum. Cela permet à chaque manager de consacrer du temps à chaque
personne dont il a la charge, aussi sur le plan technique. Il s'agit donc de multiplier
les relais de managements. "