Les politiques RH des SSII à l'épreuve de la crise Dominique Galet (Michael Page) : "Les candidats disposant de compétences transversales sont les mieux armés"

JDN Solutions. Quand les premiers effets de la crise sur les recrutements se sont-ils fait ressentir ?

Dominique Galet. L'impact de la crise sur les recrutements en SSII s'est fait un peu tardivement. Alors qu'elles restaient optimistes encore à l'automne dernier, elles ont définitivement tourné la page en fin d'année et surtout début 2009. Aujourd'hui, elles restent très prudentes.

Certains profils en pâtissent-ils davantage ?

Les premières victimes de la crise ont été les jeunes diplômés, embauchés en période d'essai à la rentrée de septembre et qui se sont retrouvés rapidement sur le carreau. Bien que les SSII communiquent sur leurs recrutements en 2009, il faut garder à l'esprit qu'elles raisonnent en termes de projets éventuels à venir et non de projets finalisés. Sachant que bien souvent, elles ont abaissé leurs projections de recrutements de moitié.

Les jeunes diplômés constituent la première variable d'ajustement des SSII. Actuellement, on en voit beaucoup sur le marché du travail, souvent des ingénieurs, qui ont entre 3 et 5 mois d'expérience. Plutôt que de reprendre un junior, les SSII préfèrent bien souvent reformer un collaborateur interne en situation d'intercontrat par exemple pour le positionner sur une mission porteuse ou à venir, plutôt que de recruter un junior, sauf cas particuliers.

Est-il plus sécurisant pour elles de recruter un candidat généraliste ou spécialisé dans une technologie, un environnement fonctionnel ?

"Aujourd'hui, les SSII intéressées par un profil joueront davantage sur la part variable du salaire"

Certains profils seront en effet avantagés par rapport à d'autres. Car il est plus facile pour un consultant technique maîtrisant par exemple les technologies .NET de changer de déclinaison verticale métier. A l'inverse, un consultant métier, par exemple dans le secteur industriel, sera par nature plus difficilement interchangeable. Les candidats disposant de compétences transversales apparaissent donc mieux armés que les autres pour traverser la crise actuelle.

La crise influence-t-elle l'évolution des politiques salariales à l'embauche ?

On constate que la surenchère dans la montée des salaires à l'embauche est terminée. Aujourd'hui, les SSII intéressées par un profil joueront davantage sur la part variable du salaire que sur celle du salaire fixe. Cela étant, les avantages de salaires proposés sont toujours indexés sur des atteintes d'objectifs, de réussite en termes de rentrée de chiffre d'affaires, d'élargissement de portefeuilles clients...

Leur taux de turnover des SSII est également impacté...

Concernant les taux de turnover en SSII, on perçoit une certaine inquiétude des personnes en poste. Personne n'est dupe et voit bien que nombre de projets ont été repoussés ou que les clients n'hésitent plus à les annuler purement et simplement. Cette baisse soudaine d'activité incite donc les collaborateurs à la prudence en termes de motivation à quitter leur entreprise, un emploi stable et dans lequel ils ont fait leurs preuves.

"Pour les salariés qui veulent quitter leur SSII, il est préférable de bénéficier d'un plan de départ pour toucher des ASSEDIC"

Après des années d'euphorie, on a l'impression que les candidats au départ retiennent leur souffle. Plus personne ne bouge. D'ailleurs, cela se voit dans les propositions d'embauches des SSII : alors qu'elles sont moins nombreuses qu'auparavant, on s'attendait à une multiplication des demandes pour une offre. Mais ce n'est pas le cas, car la crise retient les personnes dans leur emploi actuel.

Comment expliquez-vous cette frilosité ?

Ce comportement s'explique de façon bien naturelle et ce, quels que soient les scénarios d'activité dans lequel leur entreprise se trouve. Soit ils sont dans une SSII qui ne connaît pas la crise et ne voit pas de raison objective à la quitter, ou bien leur entreprise bat de l'aile et attendent d'être mis à la porte plutôt que de démissionner. Pour eux, il est évidemment préférable de bénéficier d'un plan de départ, de toucher des ASSEDIC voire un parachute plutôt que de partir en pleine tempête avec le risque de se retrouver en situation précaire par la suite.

La taille de la SSII influe-t-elle sur la politique de recrutements en temps de crise ?

Les grandes structures à dimension internationales sont très prudentes en matière de recrutement alors que les plus petites semblent prêtes à prendre davantage de risques. Cela peut s'expliquer dans la mesure où on rencontre dans les SSII à taille humaine un patron fondateur qui n'a de compte à rendre qu'à lui-même et qui est motivé par l'esprit d'entrepreneur.

Ce mouvement pourra être d'autant plus fort que la SSII en question se situe sur un marché de niche sur lequel elle propose un service ou un produit efficace, très ciblé, répondant à une demande parfaitement identifiée et que ne peut être qu'en croissance.

Dominique Galet est directeur de la division Systèmes d'Information chez Michael Page.