Jean-François Millasseau (Open Text ) "L'interconnexion entre ECM et réseaux sociaux externes interpelle les entreprises"

Un an après le rachat de Vignette, le pure player de la gestion de contenu entrevoit des synergies. Cela ne l'empêche pas de miser sur une coopétition avec Oracle.

Comment vous positionnez-vous sur le marché de la gestion de contenu d'entreprise (ECM) ? Quid de vos derniers trimestriels mitigés ? 

Nous misons sur des différenciants de plusieurs ordres. L'agilité tout d'abord avec une taille ni trop grosse ni trop petite qui nous permet de prendre rapidement les bonnes décisions. Le fait de conserver des gammes de solutions indépendantes ensuite, sans chevauchement fonctionnel. Et enfin le fait de réaliser l'ensemble de nos revenus de la gestion de contenus, contrairement à d'autres acteurs comme IBM ou EMC, et de se positionner de ce fait en tant que spécialiste sectoriel.

Nous allons également accroître nos efforts en matière d'interopérabilité de nos solutions avec les progiciels SAP et Oracle. Nous avons franchi à ce titre une nouvelle étape en matière de coopétition puisque SAP est lui-même revendeur de nos offres, et qu'Oracle propose à son catalogue non pas nos solutions de gestion de contenu généralistes puisqu'ils en ont déjà une issue du rachat de Stellent, mais de nos quatre offres de gestion de contenu dédiées au cycle de vie des factures et des documents dans les progiciels Peoplesoft, Siebel et Oracle E-Business Suite. Nous avons aussi récemment acheté Burnsand, qui est spécialisé dans les services d'intégration et de développement dans les technologies Oracle.

En ce qui concerne nos derniers résultats trimestriels, il faut tenir compte du phénomène de crise relativement important qui a poussé les entreprises à privilégier les projets extrêmement stratégiques pour elles.

Or, toutes les entreprises sont déjà en très grande majorité équipées en solutions de gestion de contenu sachant que ce sont des déploiements longs à mettre en œuvre qui ont dû faire face plus que d'autres au gel budgétaire des directions métiers, sponsors de ce type de projets. En revanche, la situation n'est pas tellement mauvaise au point d'annoncer une quelconque alerte sur les résultats. [Open Text a realisé au troisième trimestre 2010 un chiffre d'affaires de 212,5 millions de dollars en hausse de 11%, mais a vu ses revenus issus des ventes de logiciels baisser de 5% et son résultat net passé de 22 à 13,1 millions de dollars, NDLR]

"Nous travaillons sur des projets de mobilité pour entrer en interaction avec les contenus des réseaux sociaux internes"

En interconnectant une solution de gestion de contenu aux réseaux sociaux externes les entreprises ne prennent-elles pas un risque ?

Il y a un grand débat au sein des entreprises pour savoir si elles doivent ou non interconnecter leurs solutions de gestion de contenu avec des réseaux sociaux grand public. Ce qui nous conforte dans notre volonté de proposer ce type de fonctionnalité, c'est que les individus sont devenus matures par rapport à cette problématique. Aujourd'hui, les entreprises sont conscientes que cette interconnexion est recherchée par leurs collaborateurs, en particulier ceux de la génération Y.

Pour autant, cela ne veut pas dire qu'elles n'étudieront pas la question sans précaution ni gouvernance particulière. Au préalable, elles devront donc s'assurer d'avoir bien mis en place tous les mécanismes de sécurisation nécessaires pour éviter les risques. Nous travaillons au lancement d'une nouvelle interface permettant de faire dialoguer entre elles des applications existantes, par le biais de workflows d'approbation notamment. Nous avons également des projets permettant d'interagir avec du contenu issu des réseaux sociaux internes en situation de mobilité.

Quel bilan tirez-vous du rachat de Vignette un an après ?

Le rachat de Vignette a permis de compléter tout un pan applicatif sur lequel nous n'étions pas forcément bien positionnés, notamment sur les solutions tournant autour de l'entreprise 2.0. De notre point de vue, l'intégration des collaborateurs issus de Vignette s'est bien passée, tant du point de vue des équipes que des mentalités. Pour Vignette également, puisque les collaborateurs apprécient de ne plus seulement avoir comme principal interlocuteurs des personnes de la DSI mais également des directions métiers.

L'intégration des collaborateurs s'est effectuée dans les deux sens dans la mesure où les équipes d'Open Text travaillant sur les sujets liés au Web et à la mobilité ont rejoint le pôle Vignette, tandis que les équipes de Vignette davantage orientées vers les domaines du portail et et de la gestion de contenu traditionnelle ont rejoint les équipes d'Open Text. Ce rapprochement ne nous a pas empêché de faire la chasse aux doublons, par exemple dans le domaine de la gestion de contenu Web où notre solution n'était pas à la hauteur de celle de Vignette ou encore dans le record management.

Notre objectif n'est en tous cas pas de faire disparaître des solutions, bien au contraire. Mais de continuer l'exploitation de nouveaux outils comme de plus anciennes offres pour peu qu'elles rencontrent les besoins des entreprises et nous fassent gagner de l'argent. La société se porte donc bien et le récent rachat de la société NStein, spécialisée dans l'analyse sémantique, nous conforte dans notre stratégie et la volonté d'être au même niveau qu'un acteur comme Autonomy.

Jean-François Millasseau est responsable avant-ventes d'Open Text.