Réseau social d'entreprise : comment assurer sa réussite Bertand Duperrin (Next Modernity) : "Le réseau social d'entreprise implique de sortir du modèle taylorien de capacité"

JDN Solutions. Quel est le niveau de maturité des entreprises vis-à-vis des réseaux sociaux d'entreprise ?

Bertrand Duperrin. Il y a encore des entreprises qui sont en phase d'expérimentation, notamment celles qui ne sont pas dotées d'une gouvernance globale, avec des projets et des outils qui fleurissent partout. Si la proposition de valeur d'un RSE c'est de briser les silos d'entreprise, le fait d'en voir émerger plus d'un, produit le plus souvent l'effet inverse...

Il ne faut absolument pas suivre l'exemple de ces entreprises qui mènent 10 projets de RSE avec le même éditeur. Il est donc essentiel de se doter d'une plate-forme unique qui atteint une masse critique d'utilisateurs, ne serait-ce que pour rentabiliser son coût de maintenance et de licence.

Les entreprises sont-elles nombreuses à être équipées ?

Il existe plusieurs cas de figure. La première, une solution a déjà été choisie par l'entreprise et il faut bien faire avec. Quand une entreprise a déjà investi, il est illusoire de penser à aller sur autre chose tant que les limites du premier outil n'ont pas été perçues.

Deuxième cas, l'entreprise n'a rien choisi, et dans ce cas il faut partir du terrain pour identifier les cas d'usages concrets, celui du collaborateur lambda par exemple qui a besoin d'échanger en mode réseau social, et se plaint de ne pas pouvoir le faire. L'adoption suivra quoi qu'il en soit en fonction de la culture d'entreprise, et nécessitera entre 1 et 5 ans. 


"Difficile pour les directions générales de demander de collaborer et en même temps d'être en compétition"

Comment réussir la mise en œuvre ?

Le tout premier jalon pour réussir la mise en œuvre de son réseau social d'entreprise, c'est d'identifier ce que l'on veut faire. Malheureusement, on voit encore beaucoup d'entreprise qui ont acheté des licences d'un produit, et qui ne savent pas quoi en faire. Or, c'est l'utilisation qui est faite du réseau social d'entreprise, et non l'outil de RSE en lui-même qui doit guider les usages. Le choix peut également être guidé par effet de mode, l'entreprise se persuadant que cela doit bien servir à quelque chose. Or, il est essentiel qu'elle se pose la question de ce qu'elle en fera demain.

Il faut donc déjà cerner quel est le besoin du collaborateur en situation de travail : dans quelles circonstances se retrouve-t-il bloqué, et perd-t-il du temps à trouver une personne lui permettant de résoudre un problème ? Il faut construire le RSE en partant de là, en mettant en place deux niveaux de granularité. Un niveau global de diffusion des bonnes pratiques générales, et un niveau local, pour faire entrer le RSE dans les pratiques quotidiennes de travail.

Ensuite, il faut identifier comment les collaborateurs doivent travailler et créer de la valeur avec un RSE, ce qui nécessite une réflexion pragmatique pour après seulement s'intéresser aux outils. Dans les entreprises où le RSE fonctionne, elles sont parvenues à travailler, manager différemment, et à explorer des nouveaux circuits de création de valeur ajoutée en sortant du modèle taylorien de capacité.

L'implication de la direction générale est-elle nécessaire dans les deux cas ?

Concernant l'engouement de la direction générale envers les RSE, il est difficile pour elles de demander aux gens à la fois de collaborer et d'être en compétition. Mais il est illusoire de penser qu'un projet de RSE peut réussir sans le soutien du haut de la pyramide organisationnelle.