Quel
regard portez-vous aujourd'hui sur le marché
du streaming qui a vu tomber bon nombre d'acteurs ?
Je crois que le paradoxe de
la popularité a été très
cruel pour le marché du streaming: les fournisseurs
de contenu dont le marketing a été trop
efficace, ont dû, pour tenir la charge, supporter
les coûts très élevés des
infrastructures de streaming.
Vous faites allusion aux Content
Delivery Network (CDN), ces réseaux spécialisés
élaborés par exemple par Akamai ?
Oui en effet. Ce cruel paradoxe
que j'évoque a poussé les fournisseurs
de contenus streamés vers les CDN. A mon sens,
la qualité était bien au rendez-vous avec
ce type de solutions, le retour sur investissement beaucoup
moins...
Quelles alternatives proposez-vous
?
Indépendamment de la
technologie que nous avons développée,
il faut savoir qu'une solution existe depuis bien longtemps:
il s'agit du multicast. Une technique que nous pouvons
comparer à la diffusion broadband que nous connaissons
sur les ondes. Techniquement, avec le multicast, un
serveur envoie un stream et un seul sur une adresse
IP dite multicast, sur laquelle les visiteurs viennent
en quelque sorte se brancher. Ces IP multicast sont
gérées au niveau des routeurs. L'avantage
saute aux yeux: le serveur n'émet qu'un seul
stream et un seul stream est donc véhiculé
sur les backbones (artères principales, ndlr)
des réseaux.
Si la solution miracle existe,
pourquoi n'est-elle pas déployée ?
Pour plusieurs raisons. Déployer
une architecture multicast à l'échelle
du Net représente un investissement hors de portée.
Ensuite, la perspective du multicast entre aujourd'hui
en conflit d'intérêt avec les capacités
réseau déployées par les opérateurs.
Le déploiement du multicast se solderait par
de grandes économies de bande passante, donc
par une chute des prix de cette bande passante, ce qui
n'aiderait pas vraiment les opérateurs à
rentabiliser leurs infrastructures. Enfin, dernier obstacle,
il n'est pas facile d'identifier les utilisateurs qui
sont derrière une adresse IP multicast. Ce qui
complique la personnalisation des services, voire les
modèles économiques des fournisseurs de
contenu. Bref, tout cela explique qu'une grosse incertitude
pèse sur le déploiement à terme
du multicast. C'est un vrai problème car d'un
côté les contenus deviennent plus riches,
de l'autre les débits locaux s'améliorent,
et au milieu le goulet d'étranglement se précise...
Sur
quelles solutions réellement opérationnelles
peuvent s'appuyer les utilisateurs ?
J'en vois au moins deux. Les
CDN que nous évoquions tout à l'heure
ou les systèmes de cache qui permettent de rapprocher
le contenu de son destinataire représentent une
première solution. Mais leur coût ne les
met pas à la portée de toutes les bourses
ou de tous les projets. Aux côtés de ses
CDN et des solutions de cache, nous entendons proposer
une autre piste. C'est une solution alternative, dans
le sens où elle a encore peu de poids sur le
marché. Nous pensons toutefois qu'elle a le mérite
d'être pragmatique.
Quels
procédés met-elle en oeuvre ?
Notre système demande
d'installer chez l'hébergeur une plate-forme
serveur aux côtés du serveur de streaming.
Cette plate-forme, vTcaster, va se charger d'analyser
les demandes de streams des visiteurs. Prenons le cas
d'une entreprise qui possède cinq sites et souhaite
diffuser le discours de son président. Notre
solution va analyser d'un point de vue réseau
les demandes de connexion. Et au lieu de produire 200
streams pour répondre à 200 demandes individuelles
réparties sur les 5 sites, elle va envoyer le
stream à un utilisateur par site. Le poste de
cet utilisateur va alors à son tour reproduire
le stream sur une adresse IP multicast vers laquelle
seront routés de façon transparente les
utilisateurs du site qui souhaitent visualiser la séquence.
Votre
dispositif suppose que les réseaux locaux des
entreprises puissent exploiter du multicast. Comment
procéder si ce n'est pas le cas ?
Aujourd'hui, la majeure partie
des routeurs installés dans l'entreprise peuvent
gérer du multicast. Cela dit, c'est un fait,
tout le monde ne le permet pas forcément. Dans
ce cas, nous fonctionnons selon le principe du "peer-to-peer":
l'utilisateur qui, sur un site, sera le premier à
recevoir un stream le transmettra à son voisin
et ainsi de suite. La puissance dont nous disposons
aujourd'hui avec nos PC permet tout à fait de
gérer le streaming de la sorte, sur un mode "peer-to-peer".
C'est également le mode de fonctionnement que
nous préconisons pour des applications de streaming
qui sortent du périmètre maîtrisé
de l'entreprise.
Outre l'installation d'une plate-forme serveur chez
l'hébergeur, quels sont les autres pré-requis
de votre dispositif ?
Tout d'abord une précision:
notre plate-forme prend l'apparence d'une boîte
noire qui embarque notre application fonctionnant sous
Solaris ou Linux. Côté utilisateur, le
dispositif est plutôt léger puisqu'il demande
juste de télécharger un composant ActiveX
qui prendra en charge le dialogue avec la plate-forme
serveur.
Nous avons commencé cet
entretien en parlant des coûts du streaming. Quel
est votre modèle tarifaire ?
Pour 5 000 utilisateurs, notre
solution avoisine les 25 000 dollars et pour 15 000
environ 45 000 dollars. Pour les radios en ligne, nous
proposons une offre particulière qui, pour 10
000 dollars, permet de gérer 1000 utilisateurs.
Je suppose que vous n'êtes pas les seuls à
avoir imaginé ce procédé ?
Trois sociétés
américaines nous semblent être des concurrents
assez proches. Cela dit, deux d'entre elles ne couvrent
que l'audio, pour les radios en ligne, et une autre
est intimement liée aux formats vidéos.
Dans notre cas, nous sommes indépendants du format
et cohabitons aussi bien avec les technologies de Real
Media que celles de Microsoft. Nous comptons beaucoup
sur ce point pour faire la différence dans les
mois à venir.
|