L'éditeur
de progiciels de développement dans le domaine
de l'e-business Vision Software s'appellera désormais
Versata. Ce changement de raison sociale concorde
avec l'arrivée officielle de l'éditeur
en France, grâce au rachat de son
distributeur français Pragma 6, qui fait
désormais office de filiale. Son PDG, Philippe
Jalfre, reste en poste et devient directeur général
de Versata France. Pour l'éditeur, cette fin
d'année s'étoffe encore avec les annonces
d'un partenariat technologique et commercial avec
IBM, et d'un contrat de plus d'1 million de dollars
signé avec la compagnie maritime Canadian Pacific
Ship.
Propos recueillis le 21 décembre 1999 par
François
Morel
JI:
Dans
quel contexte Versata a-t'elle racheté Pragma
6 ?
Philippe
Jalfre : Versata dispose aujourd'hui de filiales
en Europe, d'abord en Grande-Bretagne et en Allemagne
depuis septembre 1999, puis
en France par le rachat de Pragma 6 début décembre.
Nous
nous implantons aussi en Asie. Cela a déjà
eu lieu à Hong-Kong en novembre, et c'est en
cours au Japon.
Pourquoi Versata, alias
Vision Software, s'mplante en France ?
La France est
un marché important pour Versata. Différents
facteurs stimulent la volonté du groupe de
s'installer à l'international. La France fait
partie de notre stratégie d'implantation sur
le marché européen, tout comme les deux
autres pays majeurs : la Grande-Bretagne et l'Allemagne.
Connaissiez-vous
Versata (Vision Software) avant de les rejoindre ?
Je suis en contact avec eux depuis 3 ans car
Pragma 6 était le distributeur exclusif des
produits de Vision Software en France, avant son changement
de nom. La société, basée à
Auckland en Californie, est éditeur de logiciels
depuis 1995. Elle totalise aujourd'hui un investissement
qui avoisine les 80 millions de dollars. D'autre
part, Versata compte des personnes très connues
parmi ses investisseurs privés, comme les co-fondateurs
d'Ingres, Gary Morgenthaler et Gene Wong, le co-fondateur
de Microsoft Paul Allen, celui de SAP Hasso Platner,
et celui de Netscape Marc Andreesen.
Qui
sont vos clients dans l'Hexagone ?
Sur
l'exercice 1999 avant son rachat, Pragma 6 n'avait
qu'une seule activité qui était la distribution
exclusive des produits Versata en France. Depuis le
début de l'année, nous comptons 7 clients
grands comptes en France, dont deux sur lesquels je
peux communiquer : Groupama et la Caisse Nationale
des Barreaux Français. Nous n'avons pas de
prédilection pour un domaine d'activité
particulier. Nos clients proviennent aussi bien de
l'industrie du luxe, que des services et de la publicité,
et du monde du transport. Aux Etats-Unis, nous avons
plus de 200 clients.
Pourquoi
avoir changé de nom ?
Nous
avons renommé Vision Software en Versata suite à
une série de facteurs déclenchants qui ont
accéléré notre business. Tout d'abord,
nous avons reçu des investissements massifs ces 6 derniers
mois, et nous sommes passés de 33 à 80 millions
de dollars. L'accélération s'est prolongée
ensuite par la signature de l'accord stratégique
avec IBM. Plusieurs contrats d'1 million de dollars
ont aussi été signés récemment
aux Etats-Unis. Enfin, Versata a déposé le
10 décembre un dossier de pré-introduction
au Nasdaq auprès de la SEC (l'équivalent américain
de la COB). Une nouvelle dynamique se concrétise
avec le changement de nom et une visibilité accrue
sur notre marché. Globalement, c'est une capitalisation
sur ce qui a été fait en terme de clients
et de partenariats. Dès le début de la nouvelle
année, nous allons amorcer un puissant développement
des effectifs, et déclencher d'importantes campagnes
marketing. Il s'agit d'un repositionnement sur le marché
en terme d'image, mais notre activité reste la même.
De
quoi sera faite votre campagne marketing ?
Nous
allons la démarrer en début d'année
2000. En France, nous allons passer à une équipe
de plus de 20 personnes. Notre objectif est de consolider
notre niveau d'expertise technologique sur les produits
pour conseiller et supporter les clients. Pour le support
technique, il faut des consultants touche-à-tout
qui s'y connaissent à la fois en règles métiers,
en Java et EJB, en Internet... Assurer la qualité
des services au client est presque encore plus capital que
l'aspect commercial en lui-même. Nous tenons beaucoup
à la qualité de nos réponses sur un
plan technologique. Par ailleurs, nous allons organiser
un ensemble de conférences et de séminaires.
L'Europe représente une part significative de notre
budget marketing pour l'an 2000.
Quelles
vont être vos activités ?
La
filiale va simplement vendre les produits de Versata en
France. Dans le monde, nous éditons et commercialisons
des solutions de gestion, de fabrication et de déploiement
d'applications e-business. Celles-ci sont de 3 types
: B2B, B2C et B2E. Pour le B2B (business to business), il
s'agit par exemple d'applications de gestion et d'organisation
du réseau d'un transporteur comprenant ses sous-traitants.
Le B2C (business to consumers) est orienté vers le
commerce électronique. Les sites web réalisés
avec les solutions Versata comprennent des applications
de gestion poussées, comme openhippo.com qui permet
de gérer des portefeuilles d'actions en ligne.
Et
le B2E ?
C'est
le "business to end-users". Cela se passe dans
l'entreprise, où les employés peuvent accéder
au back-office via l'intranet. Une agence d'un grand groupe
située à Montpellier peut ainsi échanger
des informations, effectuer des transactions en relation
avec le back-office installé à Paris, et cela
avec l'interface du navigateur. C'est un aspect important
qui tend à remplacer le client/serveur et les mainframes
traditionnels. De plus, une même application peut
à la fois servir en B2B et B2E. Nos premières
références ont davantage été
tournées vers ce type d'applications.
Quelle
est votre définition de l'e-business ?
Elle
est très simple : c'est quand internet rencontre
le business.
Quels
sont les objectifs de votre signature avec IBM ?
Nous
avons annoncé le partenariat il y a un peu plus d'un mois.
L'accord couvre globalement plusieurs volets. Sur le plan
technique, il s'agit d'une intégration entre Versata
Logic Server, notre serveur d'objets métiers, et
le serveur d'application IBM Websphere. Le deuxième
point est un accord de marketing qui se concrétise
aux Etats-Unis par des séminaires tournants en commun.
Enfin, nous allons vendre Websphere en OEM directement intégré
à Versata.
Comment
s'appelle votre produit phare ?
Notre
solution complète Versata e-Business Automation part
du concept d'automatiser la fabrication et le déploiement
des applications e-business. Elle se situe à la fois
du côté back-office avec la logique métier,
et relève un aspect frontal tourné vers le
client. Une troisième couche représente le
middleware. Il s'agit de générer une application
à partir de règles métier, et donc
d'automatiser la production de code. L'accès à
différentes sources de données est pris en
compte, comme à des bases de données, à
un ERP ou à un mainframe IBM. La partie graphique
est également générée en Java
et HTML et s'affiche dans l'écran du navigateur sur
le poste client.
En
quoi votre solution est-elle innovante ?
L'offre Versata se différencie
d'abord par la possibilité de définir des
règles métier. Par exemple, en terme de
passation de commande, le programme peut définir
que si la commande répond à certaines conditions,
tel type de règlement sera déclenché.
Parlez-nous
de votre contrat signé avec Canadian Pacific Ship ?
En tant qu'importante compagnie maritime,
ils avaient besoin de repenser complètement leur
business via Internet pour mettre à disposition l'information
à leurs agences. Ils ont choisi Versata comme pierre
angulaire afin de développer des applications de
gestion de la chaîne logistique pour l'affrêtement
et le transport, et de gestion de la relation client pour
leur réseau commercial. e-Business Automation a été
choisi comme véritable solution d'entreprise.
Quelles
sont les évolutions prévues pour e-Business
Automation ?
Nous
souhaitons d'abord coller aux évolutions technologiques
du Web, en effectuant des transitions vers les EJB, Corba
et XML. Notre produit va permettre d'avancer vers ces technologies
nouvelles en masquant leur complexité. D'autre part,
la notion de règles va évoluer dans le sens
de la gestion de workflow. L'objectif est de proposer une
vue plus globale du système d'information en proposant
des règles de plus haut niveau. Aujourd'hui, notre
produit se sert de règles définies entre des
objets métier, et l'idéal serait d'avoir des
règles en fonction des grands blocs du système
d'information.
Quand
sortira la prochaine version ?
Versata
e-Business Automation 5 devrait sortir avant la fin du premier
trimestre 2000. Cette version représente la concrétisation
de l'intégration avec WebSphere d'IBM. Le produit
sera également proposé dans une forme multilingue.
Comment
voyez-vous évoluer le marché ?
On distingue 3 phases pour
le développement du marché Internet e-business.
Les Etats-Unis sont à mi-parcours. En France, nous
rentrons dans la phase de démarrage et d'adoption
des technologies par les grands groupes. D'après
moi, nous sommes au début de l'explosion sur le
marché français. Après les corrections
du bug de l'an 2000, nous attendons une véritable
accélération. Nos clients et prospects sont
déjà mobilisés là-dessus depuis
quelques temps.
Sorti
en 1986 de l'IIE (Institut d'informatique d'entreprise),
Philippe Jalfre débute sa carrière
professionnelle un an plus tard en tant que consultant
chez Andersen Consulting France. Envoyé en mission
aux Etats-Unis de 1990 à 1992, il participe au
développement de l'Atelier de Génie Logiciel
du géant du conseil pour les aspects client/serveur.
De retour en France, après une courte période
consacrée à définir des architectures
principalement dans le domaine bancaire, il quitte Andersen
Consulting et fonde à la fin 1992 la société
Pragma 6. Au départ, celle-ci se définit
comme un cabinet de consultants spécialisé
dans les nouvelles technologies de l'information. En 1998,
l'activité de Pragma 6 change et s'oriente vers
la distribution des produits de Vision Software, alias
Versata.
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