Le métier traditionnel de Sun est la
fabrication de serveurs. Mais le géant n'en est pas à
sa première offensive sur les postes client en entreprise.
A la fin des années 1990 déjà, Sun tentait un
coup de poker avec la JavaStation - un client dépouillé
qui fonctionnait grâce aux ressources d'un serveur centralisé.
L'annonce avait fait grand bruit, mais les ventes étaient restées
confidentielles. Nullement échaudé par ce qu'il faut
bien appeler un échec, ainsi que par le flop du Sun Ray, la
firme se relance à l'assault.
Casser le monopole
de Microsoft
Il faut dire que le jeu en vaut la chandelle : le marché
des postes clients professionnels est entièrement monopolisé
par Microsoft, qui trouve dans ses
revenus
de licences une véritable bulle d'oxygène. Si le géant
des serveurs parvenait à grignoter ne serait-ce qu'une petite
part de ce marché, les revenus générés
pourraient être considérables. Comment parvenir à
bouter un éternel concurrent hors d'un terrain où
il est fermement campé ? En proposant un produit plus
efficace que le couple Intel/Microsoft.
Cette fois-ci, Sun a joué la
carte du PC complet, construit autour d'un processeur x86 traditionnel.
L'avantage comparatif de la "boîte mauve" de Sun
est à chercher du côté des logiciels :
le système d'exploitation choisi est un Linux que Sun compte
entourer d'une pléiade d'applicatifs open source, les plus
proches possibles de leur version Microsoft. "Nous avons choisi
Linux car c'est un système plus proche des utilisateurs,
et beaucoup plus diffusé que Solaris", explique Dario Wiser,
directeur stratégie produits et infrastructures chez Sun France.
Logiciels libres
et... compatibles
En sus de Linux, les "boîtes mauves" seront équipées
de la suite bureautique OpenOffice, du navigateur Mozilla, du client
e-mail Ximian Evolution, et de l'interface Gnome. "Les applications
que nous avons choisies sont la plupart du temps compatibles avec
les produits de Microsoft, même si OpenOffice éprouve
des difficultés à lire les macros" - dont
Microsoft garde jalousement les codes. Ces applications tourneront
directement sur le poste client, mais
le géant ne coupera pas le cordon ombilical qui les relie
au serveur - si cher au coeur de Sun.
La "boîte mauve" ne
sera en effet disponible qu'en grandes quantités - 100
au minimum - et sera automatiquement fournie avec un serveur
centralisé. Ce noeud central stockera les paramètres
de l'utilisateur, les informations permettant de contrôler
son accès, ainsi qu'un logiciel de calendrier et de messagerie
électronique.
Sun promet des
coûts faibles
Sun compte sur le ROI de son offre pour séduire. Selon le
directeur de la division logicielle de Sun - Jonathan Schwartz,
"pour l'acquisition et l'administration d'un parc de 100 machines
sur 5 ans, il faut débourser près d'un millions de
dollars si l'on s'équipe chez Microsoft. Chez Sun, notre
offre devrait avoisinner les 300 000 dollars". Un
chiffre
très attractif qui ne pousse pas Sun à trop de prétention :
"Il s'agit d'un marché assez étroit aujourd'hui",
déclarait le PDG Scott McNealy au salon Sun Network 2002
mercredi dernier. "Sun prévoit de vendre le produit
à des environnements dont l'utilisation est limitée,
comme l'éducation, les administrations, les banques, les
call centers, etc.".
Mais une question reste lancinante :
pourquoi Sun ferait-il mieux que les autres fabricants dans l'aventure
Linux ? La réponse tient toute entière dans la
force d'imposition du géant, qui a déjà fait
ses preuves à plusieurs reprises.
[Nicolas Six, JDNet]