Chef de projet ERP : le maître à penser progiciel "Dans un contexte de multinationale, les connaissances métiers comptent moins que les compétences techniques"

De quelles qualités faites-vous preuve en tant que chef de projet ERP ?

Je suis amené à mettre en pratique ma capacité d'animation de groupes de travail, ce qui révèle au grand jour nombre de conflits d'intérêts auxquels il faut mettre un terme au profit global de l'entreprise. Il faut également parvenir à identifier les points de valeur ajoutée pour l'entreprise, les points d'optimisation des processus, et les moyens à mettre en œuvre pour améliorer le travail des utilisateurs.

Une tâche loin d'être également gagnée d'avance via un système d'information, car il ne faut pas toujours aller à l'encontre des procédures métiers et organisationnelles en vigueur dans l'entreprise. L'ERP doit être uniquement considéré comme un outil et ne doit en aucun cas se substituer au flux "naturel" des relations humaines et des savoir-faire de l'entreprise qui constituent ses avantages comparatifs.

Les missions qui me sont confiées sont variées, et couvrent aussi bien l'analyse de l'existant, la gestion du planning, en passant par la validation des prototypes, que des créations de supports de formation et de suivi terrain.

Dans tous les cas, il faut faire preuve de connaissances métiers et maîtriser les principaux processus de l'entreprise pour savoir qui fait quoi, quand, comment et pourquoi afin de proposer des processus métiers optimisés et réorganisés dans le cadre d'un système informatique. Mes connaissances de programmation ont été aussi exploitées pour apporter de la customisation dans les projets ERP en contexte middle-market.

Quelles différences avez-vous constatées entre vos missions de chef de projet ERP grand compte et middle-market ?

Dans un contexte de multinationale, les connaissances métiers comptent moins que les compétences techniques, alors que dans un contexte PME, cela sera exactement le contraire. L'une des principales raisons, c'est que dans un contexte PME, le chef de projet ERP doit parler le même discours que l'entrepreneur en raison d'un nombre très limité d'intervenants, doit faire preuve de pragmatisme et illustrer ses propos avec des anecdotes qui parlent immédiatement aux groupes de travail.

"J'ai pu me rendre compte sur le terrain que certains travaillant pour des intégrateurs ou SSII ajoutent des jours à facturer au client"

En contexte de multinationales, il vaut mieux également être doté de très bonnes connaissances en gestion de projet et de processus par branche afin d'implémenter le module informatique concerné mais en PME, les compétences pratiques des métiers seront davantage requises, puisque vous travaillez sur tous les processus de l'entreprise.

Par ailleurs, l'apprentissage d'un ERP pour PME comme cela a pu être mon cas avec Blending par exemple, s'est fait beaucoup plus rapidement d'un point de vue fonctionnel que pour d'autres orientés grands comptes. Ainsi, mes compétences en programmation ont donc été mises plus souvent à contribution par rapport, que dans le cadre des projets liés à l'ERP SAP. Cela s'explique dans la mesure où dans ce type de projets, les équipes et compétences sont plus diversifiées et des personnes peuvent prendre en charge ce besoin de customisation.

Entre un métier de chef de projet ERP interne et pour le compte d'une SSII, votre choix est-il fait ?

J'ai pu me rendre compte sur le terrain que certains travaillant pour des intégrateurs ou SSII ajoutent des jours à facturer au client et ne sont pas à la recherche de l'optimal pour l'utilisateur final, mais ont l'objectif légitime d'apporter également le maximum de profits à leur employeur. Donc, il y a une opposition et confrontation d'intérêt dès la première seconde de réunion de travail, même si cela reste caché sous le sceau du partenariat et de tous les grands mots liés à la profession, tels que collaboration étroite ou encore écoute client.

Si les chefs de projets employés par des SSII/intégrateurs sont payés en partie pour faire du volume à l'extérieur, trouver de plus en plus de projets ou allonger la note chez les clients existants, certains chefs de projets internes se montrent, eux, trop ambitieux, et font payer très cher la note finale à leur entreprise par un manque de connaissances métier. Je connais le cas de plusieurs échecs dans différentes entreprises dont la note est à chaque fois supérieure à 1 million d'euros...ce qui n'est pas pour déplaire aux personnes d'en face !

La maladie des projets français est véhiculée par cette volonté de traiter tous les problèmes d'un coup, ce qui multiplie les délais et les budgets finaux. Un même projet prend donc deux fois plus de temps à Paris qu'à Londres, pour des résultats en faveur des Britanniques. Un conseil anglo-saxon : toujours appliquer le Keep It Simple...

Tanguy Bambier est consultant en reegineering de processus au sein du Groupe Flo. Il a également été consultant formateur sur MySAP.com, chef de projet ERP (Intégrateur), occupé le poste de supply chain manager chez Nestlé et chef de projet chez Renault-Nissan. Tanguy Bambier est diplômé de l'EM Le Havre-Caen, IAE Lyon 3 et certifié CPIM (Certified in Production and Inventory Management).