Workplace by Facebook : quel bilan un an après son lancement ?

Workplace by Facebook : quel bilan un an après son lancement ? Lancée le 10 octobre 2016, la déclinaison de Facebook pour le monde de l'entreprise a-t-elle tenu ses promesses ? Quid de son adoption et de ses cas d'usage sur le terrain ? Le point.

Après une longue phase de bêta privée initiée en janvier 2015, Facebook lançait sa déclinaison pour le monde de l'entreprise en version finale le 10 octobre 2016. Un an après jour pour jour, le constat est là : le réseau social américain a réussi un tour de force. "Malgré la saturation du marché des applications collaboratives, Facebook a su pleinement capitaliser sur sa marque pour créer une attente. Tous nos clients, sensibles au collaboratif, ont analysé et testé cette solution", constate Bastien Le Lann, responsable du pôle analyse et création du cabinet de conseil français Lecko.

Pourtant, Workplace n'introduit pas initialement d'innovations de rupture comparé aux réseaux sociaux d'entreprise existants (Jive, Yammer, Chatter…). "Il se contente d'instancier le code Facebook historique, pour créer des espaces cloisonnés à chaque organisation utilisatrice", précise Bastien Le Lann. Dans un premier temps, Facebook propose une offre unique, payante tarifée à partir de 1 dollar par utilisateur actif mensuel. Dans l'optique de booster le taux d'adoption du produit, il introduit en avril 2016 une déclinaison gratuite d'entrée de gamme (sans Analytics ni console d'administration, et sans accès aux intégrations tierces et à l'API).

De belles références : Walmart, Telenor, Danone...

Durant cette première année d'existence commerciale, la plateforme est mise en place par quelques grands groupes sur des périmètres internationaux. C'est le cas de Booking.com, Royal Bank of ScotlandHeineken ou encore du groupe télécoms norvégien Telenor. Dernière référence en date, Walmart (le plus important employeur privé au monde) a amorcé la mise en œuvre de Workplace au niveau mondial. Qu'en est-il des premières entreprises utilisatrices en France ? Parmi les principales d'entre elles, on relève Danone,  Iliad-Free, Lagardère Active, Renault Retail Group ou encore la SNCF. Pour autant, le nombre de déploiements dans l'Hexagone est loin d'être massif.

"Cette plateforme permet de donner aux vendeurs en magasins une identité digitale qu'ils n'avaient pas jusque-là"

Côté cas d'usage, Facebook ne s'est pas trompé. Le principal point fort de Workplace (reconnu par le marché) réside bel et bien dans sa facilité de prise en main, y compris par des populations ne disposant pas jusqu'alors de terminaux de travail attitrés. Résultat : au sein des sociétés ayant enclenché un déploiement, les taux d'adoption seraient systématiquement supérieurs à 80%.

Et ce n'est pas là un hasard. Workplace propose en effet une expérience que maîtrisent déjà les quelque 2 milliards d'utilisateurs actifs "grand public" de Facebook à travers le monde, dont plus de 30 millions en France. "De fait, c'est effectivement là où nous sommes le plus légitime. Nous avons la capacité de connecter tous les collaborateurs, sans exception", confirme Julien Codorniou, vice-président de Workplace by Facebook.

Du coup, Workplace intéresserait beaucoup les distributeurs dans l'optique de digitaliser leurs équipes de vente. "Cette plateforme permet de donner aux vendeurs en magasins une identité digitale qu'ils n'avaient pas jusque-là dans l'entreprise. Utilisant Facebook à titre privé, ils n'ont aucun mal à prendre en main Workplace auquel ils peuvent aisément accéder via smartphone", atteste Massimo Cappato, PDG du cabinet de conseil Revevol en Italie.

Vers un chatbot universel pour gérer les processus

En matière de retail, les scénarios d'usage de Workplace sont assez divers. L'environnement permet notamment de faciliter la diffusion des guides d'installation des vitrines. "Au lieu d'être perdus dans les boîtes mail, ces documents sont partagés dans une logique d'intelligence collective. Via Workplace, les responsables de point de vente peuvent faire des suggestions d'amélioration, puis partager des photos de leur vitrine une fois celle-ci mise en place", évoque Massimo Cappato. Aux côtés de Walmart, plusieurs grands retailers européens, dont l'Italien Miroglio, se sont tournés vers la solution.

Du côté de l'industrie également, Workplace contribue à lancer une passerelle numérique vers les techniciens d'usine, eux non-plus sans identité numérique d'entreprise. En France, des acteurs industriels aussi variés que le groupe fromager Bel ou le spécialiste du béton préfabriqué Consolis se sont orientés vers Workplace précisément pour ce type de cas d'usage. "Dans la fabrication, Workplace est également utilisé pour optimiser la qualité. Il permet de prendre immédiatement en photo une pièce défectueuse, avec son smartphone, et de la partager via un groupe dédié pour prévenir les autres usines", ajoute Massimo Cappato.

Toujours dans l'industrie, Workplace est par ailleurs exploité par les départements de vente. "Chez Renault Retail Group par exemple, la fonction de vidéo 'Live' est utilisée par les commerciaux pour réaliser leur réunion hebdomadaire", constate Bastien Le Lann chez Lecko.

Transformer le chat en environnement métier

La dernière conférence annuelle de Facebook à destination des développeurs (F8), qui s'est tenue en avril dernier, a marqué un virage dans la stratégie du groupe autour de Workplace. Sur scène, Mark Zuckerberg a positionné Workplace parmi les projets stratégiques du réseau social (voir la photo ci-dessous). Pour l'occasion, le groupe a annoncé l'intégration de Workplace à la plateforme de CRM de Salesforce, ainsi qu'aux suites de productivité Office 365 et G Suite. Mais également l'ouverture d'une API pour développer des bots dans la messagerie instantanée de Workplace (alias Work Chat).

Lors de la dernière conférence annuelle de Facebook à destination des développeurs (F8), Mark Zuckerberg a positionné Workplace parmi les projets stratégiques du réseau social. © Facebook

Des annonces très attendues, en particulier par les DSI, dans l'optique d'intégrer Workplace aux systèmes d'informations. "Ces évolutions ont permis de débloquer beaucoup de situations chez les grands comptes", relève Julien Codorniou. Depuis, les projets se seraient multipliés, avec en ligne de mire la volonté de motoriser des processus métiers.

"Nous allons accroître notre effort commercial en direction des organisations de taille moyenne"

"Pour l'un de nos clients, nous avons notamment créé un connecteur vers le progiciel SAP pour piloter des workflows d'encaissement depuis un bot niché dans Work Chat. Pour un autre, nous avons développé un bot qui permet à différents services d'interroger une base de candidatures RH, elles-mêmes glanées via un bot accessible sur la page Facebook de l'entreprise", explique Massimo Cappato chez Revevol.

De là à imaginer que Workplace puisse devenir à terme l'interface graphique unique pour gérer l'ensemble des processus d'entreprise, il n'y a qu'un pas. "Force est de constater que cette vision séduit. Nous avons accompagné depuis un an une douzaine de déploiements de Workplace. Mais désormais, l'activité monte en puissance. Nous avons récemment signé plusieurs douzaines de nouveaux contrats", confie Massimo Cappato. Chez Facebook, on note également un intérêt croissant pour la plateforme depuis l'ouverture de l'API de bot. "Cette fonctionnalité intéresse à la fois les start-up (Sigfox, Spotify et Teads.tv déploient Workplace ndlr) mais aussi les entreprises de taille moyenne vers lesquelles nous allons accroître notre effort commercial", insiste Julien Codorniou.

Et Bastien Le Lann d'ajouter : "En annonçant l'intégration de Skype for Business à son outil de messagerie collaborative Teams, il est intéressant de constater que Microsoft suit la même logique que Facebook avec Workplace : comme lui, il propose une interface de communication unifiée, intégrable au SI, pour transformer le chat en environnement métier." Exactement à la manière de ce que propose Slack.