SEO : Et si les récentes imprécisions du Keyword Planner n'étaient pas une si mauvaise nouvelle ?

SEO : Et si les récentes imprécisions du Keyword Planner n'étaient pas une si mauvaise nouvelle ? Alors que les données fournies par Google concernant les volumes de recherche des mots clés ont perdu en fiabilité, les outils qui les utilisaient doivent se réinventer. Et c'est peut-être bien une aubaine pour eux…

Connaître les volumes de recherche des requêtes dans Google aide évidemment à élaborer des stratégie SEO, et à décider du contenu à produire. Le Keyword Planner, un outil associé à AdWords, appelé en français "l'outil de planification des mots-clés", fournissait ces informations gratuitement à tout le monde. Mais cet été, Google a décidé de changer les règles et a modifié cet outil. Désormais, il faut avoir un compte payant, ayant déjà réalisé des campagnes Adwords, pour bénéficier des chiffres, sinon les données proposées renvoient à des tranches de volumes beaucoup moins précises. Et même avec un compte payant, Google regroupe désormais plusieurs mots-clés, pour inclure certaines de ses variantes. Et parfois, pour certaines requêtes, le moteur ne donne aucun volume. Singulier et pluriel peuvent être regroupés, tout comme les acronymes. 

Avec un compte gratuit, le Keyword Planner ne donne que 3 tranches de volumes très imprécises pour 6 mots clés demandés : "imprécisions", "imprécision", "imprecision", "imprecision", "SEO", et "Search Engine Optimization". © Capture

Pour les comptes gratuits, Google admet que "certains des mots-clés que vous avez saisis et leurs variantes proches ont été regroupés sur une même ligne". Concrètement,  dans l'exemple ci-dessus, les volumes de recherche affichés sont les mêmes pour "SEO" et "Search Engine Optimization". A noter aussi dans cet exemple qu'aucune tranche n'est affichée pour "imprécisions".

C'est à peine mieux pour les comptes payants : certes, les tranches disparaissent, au profit d'estimations plus fines, mais là encore Google regroupe des mots-clés et leurs variantes, et ne donne toujours aucune estimation pour certaines requêtes… © capture

Même avec un compte payant, il devient difficile de savoir combien de mots sont regroupés derrière les estimations affichées par l'outil, lorsqu'il y en a. Bref : le Keyword Planner a beaucoup perdu en fiabilité…. De quoi remettre en question les outils, nombreux, qui utilisaient cette source de données.

Un historique bien utile

Les éditeurs de ces solutions ont donc dû se retrousser les manches pour voir comment ils pouvaient réagir. Sans se presser, car la plupart d'entre eux disposent d'un historique issu du Keyword Planner, ce qui leur permet d'aborder sereinement les prochains mois. "Nous ne nous inquiétons pas trop pour les six prochains mois, au moins, car notre historique nous permettra de continuer à fournir des volumes pertinents, incluant les variations saisonnières. Pour certains mots-clés, les tendances et les volumes précédemment observés seront les mêmes à l'avenir", explique Cédric Messoumian, qui gère Ranks.

C'est vrai pour les mots qui ne connaîtront pas une actualité imprévisible, et pour les requêtes déjà connues et suivies. Mais les outils n'ont pas toujours l'historique de tous les mots-clés qu'ils suivent actuellement, surtout s'ils ont enrichi leur base dernièrement. Il faut donc tout de même explorer de nouvelles pistes pour continuer à mettre à jour les volumes. Et les sources de données les plus évidentes ne se sont pas révélées les plus fiables, ou les plus simples à utiliser.

La piste, compliquée, de la Search Console

C'est évidemment la source de données alternative à laquelle on pense vite : la Search Console. Elle affiche des impressions parfois très précises, pour de nombreux mots-clés. Mais, avant d'exploiter ces données, il faut déjà que les éditeurs d'outils SEO aient accès aux Search Consoles de leurs clients, ou arrivent à les convaincre de pouvoir y accéder.

Ce n'est pas le seul problème. Ceux qui disposent déjà de grande quantité de données, archivées, issues de cette Search Console se sont vite rendu compte des limites posées par cet outil. "Il s'agit là encore de données provenant de Google, et l'on peut aussi s'interroger sur leur fiabilité", fait valoir Alexandre Sigoigne, PDG et co-fondateur de MyPoseo. De plus, poursuit ce dirigeant, "les positions moyennes fournies par cet outil ne sont pas toujours évidentes à exploiter"… En effet : il suffit qu'une page, indiquée en 5e position en moyenne dans la console, soit passée de temps en temps en 2e page de résultats pour que son nombre d'impressions soit difficilement exploitable. Surtout que Google n'indique pas toujours avec précision ces soubresauts dans ses résultats, et que la personnalisation, la géolocalisation peuvent aussi sérieusement faire bouger les pages en termes de positions… et ainsi compliquer l'utilisation des impressions fournies par l'outil.

Certaines données sont difficilement compréhensibles dans la Search Console. On peut se demander comment Google les calcule. © Capture

Et si un site est numéro 1 sur la requête, avec une très grande constance, pendant très longtemps ? "Cela repose déjà sur des hypothèses en cascades", observe Alexandre Sigoigne, qui dit avoir déjà vu le cas… et ainsi pu constater que la Search Console faisait remonter une position moyenne différente de celle observée sur le long terme. Ce n'est pas la seule étrangeté qu'il a pu observer : "parfois, l'indicateur affiché pour le lundi n'est pas le même si on le regarde le mardi ou le mercredi, Google modifie les informations remontées", témoigne-t-il. "De toute façon", conclut-il, "il y a toujours eu des différences entre le volume de recherche donné par le Keyword Planner, les impressions de la Search Console, et le nombre de fois réel qu'une requête sera saisie dans le moteur pendant un mois. L'imprécision existait déjà avant : Google avait toute la liberté pour affirmer que le volume était de 190 ou 490… Les dernières modifications n'ont fait qu'amplifier un problème existant". Cédric Messoumian chez Ranks pointe un autre problème de la Search Console, qui "au mieux, ne fournira des informations que sur une infime partie des 100 millions de mots clés" que son outil surveille désormais.

Les autres sources de données, et les solutions déjà trouvées

Le travail des éditeurs consiste donc à déterminer quelles données reprendre, ce qui les aura sans doute déjà pousser à se poser de très saines questions. Évidemment, c'est avant tout vers Google qu'ils se tournent, car c'est le seul à pouvoir connaître le volume de recherche réel des requêtes. A part la Search Console et le Keyword Planner, les éditeurs se sont aussi penchés sur Google Trends, "une horreur à exploiter" pour certains, "une piste à étudier" pour d'autres… Mais les données peuvent aussi ne pas provenir de Google : il y a notamment celles provenant de panels d'internautes observés, qui peuvent fournir de nombreuses statistiques. C'est par exemple cette voie qu'a choisie d'explorer, ouvertement, le célèbre éditeur américain Moz.

C'est la sélection, puis le traitement et la combinaison de toutes ces sources de données qui permettra d'élaborer la formule (magique) faisant apparaître de nouveau des volumes de mots-clés fraîchement calculés. Yooda, Ranks, MyPoseo… tous sont en train de chercher cette formule, et les premiers éditeurs devraient commencer à dégainer leur solution dans peu de temps : c'est plus une question de jours que de semaines ou de mois pour certains - c'est du moins ce qu'ils ont affirmé au JDN.

Moz, SEMrush et Yooda ont déjà trouvé une solution

A part Moz, SEMrush a aussi déjà élaboré sa propre solution. Les données fournies par cet outil concernant les volumes ne sont en effet pas ceux du Keyword Planner. Ce service qui suit pour le marché hexagonal un nombre de mots-clés (6 millions) moins important que d'autres acteurs français, n'a pas voulu trop rentrer dans les détails, mais a mis au point il y a des années une méthode qui lui permet de ne pas tout faire reposer sur les données du Keyword Planner. Pourquoi avoir choisi cette voie plus difficile ? "C'était dans but de créer quelque chose d'inédit, sans dépendre de Google et son Keyword Planner", s'est limité à nous expliquer Natalya Zhukova, l'ambassadrice de l'outil en France qui a fait planer le mystère sur la méthode employée, et les données utilisées.

De son côté, Yooda ne devrait pas tarder à annoncer une solution qui lui permet d'attribuer des volumes de recherche à de nouveaux mots-clés. Après avoir, comme ses concurrents, exploré de nombreuses pistes, l'éditeur montpelliérain a vite compris qu'"aucune solution n'était parfaite". "Ce sera plus coûteux pour nous, mais nous sommes confiants", explique Lionel Miraton, responsable webmarketing et formation chez cet acteur. "La piste de la Search Console n'a pas été retenue, du moins pour l'instant", poursuit-il. La solution de Yooda utilise l'historique, une "autre source de donnée" (que l'éditeur ne veut pas révéler), ainsi que "du savoir-faire en matière de statistiques". Lionel Miraton se dit particulièrement sûr des volumes qui seront estimés, "surtout pour les mots clés-aux volumes les moins volatils".

Un mal pour un bien

"Au final, ce que l'on proposera sera mieux qu'avant, et plus affiné. Ce sera donc une bonne nouvelle pour l'utilisateur", commente le salarié de Yooda, qui apprécie, au passage, que la qualité des données fournies par les éditeurs devienne un enjeu - c'est vrai qu'avant, les données étaient les mêmes pour tout le monde, et une course à la quantité de mots-clé suivis a pu être observée. Bref, ces modifications apportées au Keyword Planner représentent finalement "une opportunité", admet le responsable webmarketing de Yooda.

L'autre bonne nouvelle, pour les clients, c'est que chaque outil va pouvoir proposer sa propre solution, ce qui les aidera à mieux se différencier les uns des autres. De quoi donner de nouveaux éléments de comparaison, qui pourront peser dans les choix des utilisateurs. "Cela va accentuer les particularités, car les acteurs ont déjà chacun leur formule pour calculer les taux de clics et estimer le trafic SEO ou la visibilité SEO", fait d'ailleurs remarquer Cédric Messoumian de Ranks. Avoir des méthodes distinctes pourra aider les éditeurs à mieux marquer leur différence, et la pertinence de leur singularité pourra autant convaincre des prospects que retenir des clients. Une aubaine, donc.