Actualité
24/01/2008
Le rapport Attali réserve une bonne place au logiciel libre
Parmi les 300 mesures contenues dans le rapport que vient de remettre la Commission Attali au gouvernement, certaines concernent de très près le secteur de l'informatique professionnelle. Outre les objectifs d'accès pour tous au très haut débit en 2016 et de réduction des fractures numériques, la commission Attali souhaite faciliter l'accès de tous au réseau numérique, le "tous" concernant notamment les PME. L'objectif affiché ici est d'accélérer le taux d'équipement en ordinateurs dans les foyers et TPE/PME avec un objectif d'équipement de 85 % en 2012 (décision 51). Selon le rapport, "l'inégalité d'accès au numérique peut être expliquée par différents facteurs, au premier rang desquels se situent la complexité d'utilisation (29 %), l'absence d'utilité pour la vie quotidienne (20 %), les enjeux de protection des données personnelles (17 %), le prix des équipements et abonnements n'étant qu'un facteur secondaire (12 %)". Mais pour atteindre ces objectiifs, outre les enjeux de protection des données personnelles, la sécurité et la confiance du numérique doivent être renforcées. "Une économie réelle, ou virtuelle, ne peut fonctionner sans sécurité juridique et matérielle. L'une et l'autre ont besoin de systèmes judiciaires efficaces et de polices efficaces. En particulier, l'économie numérique est menacée de virus et de parasites, d'écoutes et de surveillance, tolérées ou criminelles. Pour surveiller et inspecter les réseaux, on ne compte en France qu'une centaine de "gendarmes du numérique" contre plus de 500 en Allemagne et en Grande- Bretagne", rapporte le document de 245 pages issu des réflexions de la Commission.
Pour cela, la mise en place d'un "système européen de certification des produits de sécurité (logiciels ou composants, signature électronique, biométrie, Internet des objets )" doit favoriser la constitution d'un marché de masse pour ces produits et leur diffusion, selon le rapport (décision 53). Autre mesure envisagée par cette même "décision 53" : la mise en uvre d'un "mécanisme européen d'identification numérique permettant une reconnaissance mutuelle des moyens d'authentification en imposant la présence de certificats racines issus d'autorités européennes de certification pour l'ensemble des logiciels de communication (messagerie, navigateur ) commercialisés en Europe". On le voit, la certification, enjeu majeur de l'économie numérique, est placée au centre des préoccupations du rapport Attali. Pour ce faire, la "mise en place d'un système européen de certification dans le domaine de la sécurité" s'impose naturellement aux membres de la Commission. Autre thème lié aux données et à leur sécurité : la RFID. Pour Jacques Attali et son comité d'experts, il faudra "veiller à l'indépendance de l'opérateur gérant le RFID" en France (décision 55). La signature électronique n'est pas en reste, la décision 56 lui étant consacrée : "Juridiquement, la signature électronique dite "qualifiée" a la même valeur qu'une signature manuscrite et est donc recevable en justice. Mais, huit ans après la directive communautaire, l'usage de la signature électronique qualifiée reste marginal en France", précise le rapport. Ce dernier préconise sur ce point la création d'un dispositif de signature libre et gratuit et l'implémentation dans les administrations de solutions simples et standard de signature électronique.
Last but not least, le secteur du logiciel, et son renforcement, figurent dans les priorités de la Commission Attali. "Dans l'univers de l'interconnectivité généralisée, la valeur migre de l'exploitation des infrastructures de réseau, métier traditionnel de l'opérateur de télécommunications, vers les logiciels de traitement de l'information échangée", introduit le rapport, qui rappelle que, "en France, ce secteur concerne 2 500 PME innovantes dans un marché dominé très largement par l'industrie américaine (14 éditeurs américains et un allemand dans les 15 premiers mondiaux)". La décision 58 préconise de promouvoir la concurrence entre logiciels propriétaires et logiciels "libres". "Le logiciel libre induit une économie moyenne de 36 % en recherche et développement pour les entreprises utilisatrices. Il permet de créer une concurrence pour les logiciels propriétaires, dont les avantages sont différents. Leur part de marché n'est aujourd'hui que de 2 % (avec une croissance annuelle de 40 %) contre 98 % pour les logiciels dits "propriétaires"", relate la Commission. Pour développer la concurrence entre logiciels propriétaires et libres, une série d'actions est proposée : » Promouvoir la
concurrence entre les logiciels propriétaires et les logiciels libres
dans les appels doffres, notamment publics. Un objectif de 20 % des
applications nouvellement développées ou installées au
profit du secteur public en open source pourrait être fixé à
lhorizon 2012.
L'AFDEL (Association Française des Editeurs de Logiciels), s'est empressée de réagir à ce point : "La 58e proposition de la Commission Attali apporte de façon étonnante son soutien exclusif et discriminatoire à un modèle de développement et de commercialisation du logiciel qui ne participe que marginalement à l'innovation et à la croissance. En effet, là où les entreprises du logiciel investissent entre 20 et 30% de leur chiffre d'affaires en R&D, les sociétés de logiciel libre, dont la R&D est très faible et externalisée, ne sont pas même éligibles aux dispositifs français d'aide à la recherche (Crédit Impôt recherche ou Jeune Entreprise Innovante)". La décision 62 se positionne a un niveau plus européen que les précédentes, recommandant d'utiliser la présidence française de l'Union européenne pour proposer un grand programme de développement du numérique. Ce programme contiendrait les mesures suivantes : » Choisir d'urgence
le standard de la téléphonie mobile de 4e génération.
Parmi les nombreuses autres propositions de la Commission Attali figurent l'investissement massif dans les nanotechnologies, la création d'un poste de haut-commissaire au développement numérique (qui serait notamment chargé de contribuer à la veille et à la prospective tant dans ses dimensions technologiques que d'usage, et d'assurer une maîtrise d'ouvrage ou un pilotage stratégiques des grands programmes d'administration électronique conduits ou pilotés par l'État), la généralisation de l'e-administration à travers 10 nouveaux programmes majeurs visant à dégager au total 15 milliards d'euros d'économies par an pour l'État, et l'accélération de la dématérialisation des procédures. Le système français d'enseignement et de recherche n'a lui non plus pas été oublié. La création de 10 grands pôles autour de 10 campus, réels et virtuels, est préconisée. Enfin, côté écologie, la consommation énergétique des équipements informatiques se verra imposer des normes de sobriété, avec pour objectif une diminution de 50 % d'ici 2015.
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