Bien négocier son passage à IPv6 (par Mohsen Souissi, Afnic) Que se cache-t-il derrière l'épuisement de l'espace IPv4 ?

Il est prévisible que l'épuisement du stock des adresses IPv4 commence dès fin 2011 – début 2012 au plus tard. Au 3 février 2011 le stock IPv4 de l'IANA a d'ailleurs été épuisé.


Que se passera-t-il après cet épuisement ? Qui sera impacté et que faudra-t-il faire alors pour que l'Internet continue de fonctionner de manière acceptable ? Autant de questions qui méritent chacune de longues réponses, mais voici des éléments de réponse synthétiques.

le rapport quotidien et automatique de g. huston  sur le nombre d'adresses ipv4
Le rapport quotidien et automatique de G. Huston  sur le nombre d'adresses IPv4 restantes est devenu une référence. © Fotolia


Des "marchés gris" déconseillés

 Pour la plupart des acteurs de l'Internet, il sera encore possible de (sur)vivre avec IPv4 pour une durée variable, pouvant atteindre plusieurs années, même après l'épuisement des stocks IANA + RIR.

En effet, ceux qui ont déjà fait le plein d'IPv4 peuvent en rationner la gestion (gestion de la pénurie), les "marchés gris" [1] d'IPv4 sont une option, certes déconseillée, mais prévisible et enfin certains s'accommodent de plusieurs "étages" de NATs qui conviennent à leurs besoins depuis plusieurs années.

"Se contenter d'IPv4 devient un véritable frein à l'innovation."


Cependant, cela ne ferait que repousser le problème, car le coût/complexité de déploiement de nouveaux services en IPv4 et de maintenance de l'existant croit de manière significative (recrudescence des boîtiers de traduction v4privé-v4public, recrudescence des tunnels/encapsulation v4-in-v6 et v6-in-v4 aussi bien au niveau des dorsales qu'à l'accès aux réseaux).

En outre, ceux qui n'auront pas pris le temps de pratiquer ces techniques et de les maîtriser risquent de rencontrer de gros problèmes de stabilité de leurs infrastructures et services réseau.

au 3 février 2011 le stock ipv4 de l'iana a été épuisé
Au 3 février 2011 le stock IPv4 de l'IANA a été épuisé © Fotolia

Rester à l'IPv4 est plus coûteux

 Enfin, il est à souligner qu'à mesure que les acteurs réseau déploient IPv6, celui qui y résistera encore, assumera le risque d'être exclu (perte de marché / compétitivité économique). En somme, se contenter d'IPv4 devient un véritable frein à l'innovation si bien que la fracture numérique ne fera que se creuser (mais la facture aussi, à terme).


[1] On parle de "marché gris" et non de "marché noir " dans la mesure où il est possible de connaître les acteurs des transactions de vente de préfixes IPv4, mais pas le montant de la transaction.