Tribune

Ces start-up malades de la com
Par Jean-Marc Cornille
Directeur général de Come'Up*
- Mercredi 7 février 2001 -

Et une de moins ! Chaque matin, une start passe de «up» à «down»! Finie l'euphorie des 35 «patates» levées en deux tours de table… Une page de la (jeune) histoire des start-up vient de se tourner. Et avec elle une forme de communication qui se résume le plus souvent à un seul objectif : «fô - kon - parle - de - nous». «Pour vendre»? «Euh, surtout pour nous aider à lever les fonds qui… que… » A chaque rencontre, à chaque réunion, l'aveu finit par tomber : « Pour nous, la communication est d'abord une aide au financement avant d'être une aide à la vente ».

Les start-up ont-elles fait des erreurs de communication?
Parlez-en
sur le Forum
(rubrique Internet en 2001)

L'erreur est humaine, mais celle-ci est fatale. Humaine car quand on a - difficilement – accouché d'un bébé site, il est finalement naturel de penser que la médiatisation va l'aider à se développer. Fatale, car en confondant médiatisation et communication, les entreprenautes (1) ont oublié l'évidence : si les business-angels font naître un projet, ce sont les clients qui le font vivre. Et pour gagner des clients, il faut s'adresser à eux.

La tête dans le guidon, les yeux fixés sur leur stock-options, obsédés par la perspective du jackpot, beaucoup d' entreprenautes n'ont pas vu plus loin que le bout du nez de leur business angel. Pas étonnant qu'ils se soient plantés au premier virage du Nasdaq.

Franchement, il sert à quoi votre site ?

La deuxième erreur, - tout aussi fatale – est, elle, plutôt… existentielle. Souvenez vous de ce reportage, il y a quelques semaines, dans Capital. Les journalistes filment, au jour le jour, l'aventure d'une équipe de copains à la recherche d'un financement pour lancer leur site de location d'outillage en ligne. Au cours de l'entretien, un «angel» demande à l'un des entreprenautes : «vous, personnellement, vous avez déjà loué quelque chose sur le net?» Et soudain, la vérité éclate, flagrante : le site ne répond à aucun besoin! Bien fait, mais inutile! Nous connaissons tous, aujourd'hui, des sites dont la seule raison d'être est d'être… les seuls du genre! Comment, dans ce cas, communiquer utile?

La troisième erreur est typiquement marketing : elle consiste à prêter aux internautes des vertus et des comportements infondés, mais qui peu à peu se transforment en certitudes et orientent le contenu de la communication. Si l'on en croit certains entreprenautes, l'internaute serait une sorte d'alien, mi homme-mi souris, shooté au yahoo, nourri aux dotcoms et dont les comportements d'achat n'auraient rien à voir avec ceux de son pauvre voisin, le consommateur! Ainsi , par exemple, l'internaute serait «un fou d'innovation technologique» à qui il suffit de proposer un wap pour qu'il se décide (enfin) à acheter sur le Net, via son mobile. Partant de cette certitude, l'agence de communication est chargée de convaincre les médias et les internautes de l'avance technologique prise par la «wapisation» du site... Bide total, évidemment, dont l'agence doit endosser, après coup, sa part de responsabilité. «Il fallait nous dire que vous n'y croyiez pas.» Mais qui peut croire qu'acheter des fleurs sur internet via un mobile wap est plus facile que d'aller chez la fleuriste du coin… Passons sur l'Erreur média (avec un grand «E») et sur ces coûteuses campagnes télé diffusées à une heure où les vrais internautes sont devant l'écran… de leur PC.

Faut faire vite, ça urge!

Dernière erreur, liée à la nature même des start-up : faire trop vite ! «Mettre tout de suite le paquet» en communication pour être ou rester le premier, pour se créer une notoriété en six mois ou encore… pour conclure plus vite le deuxième tour de table. En oubliant que les sites, comme les marques, ont besoin de temps pour se donner un contenu, un territoire, une clientèle et finalement un patrimoine.

A la décharge des entreprenautes, il faut avouer, enfin, que personne ne savait vraiment, il y a encore trois ans, comment «communiquer» une start-up. Nous avons, nous aussi professionnels de la com, tâtonné, essayé, improvisé. Raison de plus aujourd'hui pour ne pas refaire les mêmes erreurs.

(1) Entreprenaute : traduction française et nouvelle de «yetties», une expression née en 1999 dans la Silicon Valley, pour désigner les « Young Entreprisers of Technologies ».

* : Come'Up est une agence conseil spécialisée dans la communication des start-up.

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