L'Opt-in ? Incontournable
Par Jérôme Stioui, PDG de DirectiNet
-
Jeudi 14 décembre 2001 -
Cher
Monsieur Tenin,
Votre Tribune
dans le Journal du Net m'a fortement interpelé. Elle a dû également
faire sursauter de nombreux professionnels du e-Marketing Direct.
C'est pourquoi je souhaiterais revenir sur votre prise de position.
Votre
comparaison entre la publicité magazine, télévision, affichage,
Internet et l'e-mailing est révélatrice
Les modes de communication
que vous citez n'ont pas besoin d'une réglementation aussi forte
que l'e-mailing. En effet, là où les annonceurs sont naturellement
limités par la barrière à l'entrée financière que représentent
les coûts de création, de production, d'achat d'espace dans les
grands médias, l'e-mailing (sous forme de spam par exemple) représente
un coût quasi nul et laisse la place à tous les excès. Votre comparaison
entre les médias de masse et l'e-mailing n'est pas pertinente.
Créez-vous une boite e-mail gratuite américaine et vous comprendrez
peut-être mieux ce qu'est le spam ! N'importe
quel internaute ou professionnel averti du e-marketing direct
ne peut que se féliciter de la décision prise par le Conseil des
ministres des Télécommunications européens.
En
quoi un e-mail commercial non sollicité est-il plus condamnable
qu'un publipostage non sollicité ?
Assimiler le publipostage ou un prospectus non sollicité à
un e-mail commercial non sollicité, c'est rater toute la particularité
de l'adresse électronique ! Une adresse électronique est bien
plus privée qu'une adresse postale. En effet, la boite aux lettres
postale est ouverte sur le monde : n'importe qui peut y déposer
un tract, un courrier, un objet
La boîte aux lettres électronique,
elle, n'est pas ouverte. Chez DirectiNet, nous résumons cette
différence par une phrase : « votre adresse e-mail se donne (carte
de visite); votre adresse postale se trouve (annuaire) ». Aucun
annuaire fiable d'e-mails n'existe à ce jour.
Le
marketing direct traditionnel est naturellement limité par les
coûts d'une campagne, contrairement à l'e-mailing. A titre d'exemple,
pour 100.000 messages envoyés, un mailing postal adressé coûtera
au minimum 6 francs par message (création, location des adresses
production, affranchissement, routage) soit 600.000 francs là
où un (mauvais) e-mailing peut avoir un coût nul pour l'annonceur.
Pas de production, pas d'affranchissement, des créations en mode
texte, des adresses récoltées à l'aide de moteurs illicites
Si
les législateurs ne les interdisent pas, qui empêchera de tels
abus?
Une
étude réalisée par la Commission européenne avance l'hypothèse
que, sans réglementation, il sera bientôt possible d'envoyer près
de 20 milliards d'e-mails commerciaux chaque jour, soit 60 e-mails
non sollicités par internaute. Et ces abus sont à la charge de
l'internaute ! En effet, pour l'e-mailing, les pollueurs ne sont
pas les payeurs. C'est l'internaute qui paie les communications
nécessaires au téléchargement des courriers électroniques commerciaux
qu'il n'a pas souhaité recevoir, et les coûts grimpent rapidement
.
Un rapport de la Commission des Communautés Européennes évalue
le coût des e-mails commerciaux non sollicités à 30 euros par
an et par internaute pour un montant total de frais de téléchargement
de 10 milliards d'euros par an.
Je
ne suis pas un partisan du «tout opt-in» : je ne remets, par exemple,
pas en cause la norme de l'opt-out pour le marketing direct postal
et je ne suis pas convaincu que l'opt-in soit nécessaire pour
tous les types de cookies. Néanmoins, l'opt-in est la norme incontournable
de l'e-mailing.
Le
débat opt-in /opt-out est tout simplement un débat sur la confiance
Les coûts de téléchargement non désirés et la perte de temps
associée ne laissent pas insensibles les internautes. Dès lors,
une campagne d'e-mailing non sollicitée peut rapidement produire
l'inverse des effets escomptés. Au lieu de recruter de nouveaux
clients, l'annonceur ternit son image, perd des clients existants
et provoque un bouche-à-oreille négatif, dévastateur sur Internet.
Pour
conquérir et fidéliser, il faut avant tout créer un climat de
confiance. Cela passe tout d'abord par le consentement actif et
délibéré de l'internaute pour recevoir des e-mails promotionnels.
Mais cela ne s'arrête pas là, il ne suffit pas de recevoir la
permission d'un internaute, il faut également le satisfaire. Et
donc essayer de le connaître, en lui demandant ses centres d'intérêt,
ses intentions d'achat, son usage de l'Internet
.
Enfin,
en cochant une case où il accepte de recevoir des e-mails promotionnels,
l'internaute ne donne pas un blanc-seing au collecteur. Ce dernier
doit préciser les modalités d'utilisations des données collectées
: objectif, fréquence de communication
Collecter en mode opt-in,
c'est bien. Le rester c'est encore mieux ! Le collecteur doit
à tout moment, donner à l'internaute la possibilité de se désabonner,
de modifier son profil
Dans chaque e-mail commercial, l'internaute
doit pouvoir facilement identifier le collecteur et doit pouvoir
se désabonner en un clic.
Parlons
communication
Vous estimez qu'il n'y a aucune différence entre le vendeur
qui crie dans la rue et l'entreprise qui cherche à vendre ses
produits par e-mail
.Détrompez vous. Pendant que l'un crie dans
la rue, le second hurle sur le MONDE : quel risque décuplé pour
l'image de vos clients ! Et pourquoi aller contre nature
: il est reconnu que si vous parlez distinctement, on vous écoutera
mieux que si vous hurlez
c'est le propre de l'Homme ! Il est
clair dans ce cas de figure, que non seulement l'image de l'annonceur
est en jeu mais aussi sa performance.
De nombreux annonceurs constatent aujourd'hui qu'un e-mailing
opt-in est deux à quatre fois plus performant qu'un e-mailing
opt-out. Grâce à cette technique, ils peuvent atteindre une population
très réactive, car impliquée, pour des coûts inférieurs et des
taux de réponse supérieurs à ceux du marketing direct traditionnel.
Pour
revenir sur la décision du Conseil
Je tiens à remercier le Conseil des ministres européens
pour sa sage décision. Elle tire les enseignements des rapports
d'experts dans ce domaine, prend en compte la spécificité de l'adresse
électronique par rapport à l'adresse postale et préserve les potentialités
du marché de l'e-mailing en Europe. Le média Internet a beaucoup
souffert d'un manque de normes et donc de crédibilité auprès des
annonceurs traditionnels. Avec cette décision, l'Europe va probablement
réussir à sauver un des outils de communication online les plus
prometteurs : l'e-mail. Cette décision est bien plus nuancée
que ce que vous laissez entendre. En acceptant le principe d'un
consentement par défaut (opt-out) pour les e-mails collectés suite
à un acte d'achat (fidélisation), le Conseil des ministres a prouvé
son ouverture et son pragmatisme, notamment à l'égard des problématiques
de la Vente à distance via Internet.
jstioui@directinet.fr
Réagissez
>>