Management   Solutions   Emploi   Développeurs
 
 Linternaute   Journal des femmes   Copainsdavant 
 
 Séminaires   Evenements   Etudes 
Abonnements
 
RECHERCHER
 ANNUAIRES  Sociétés  Prestataires Carnet  Encyclopédie Progiciels Formations Fonds VOTRE HIGH TECH  Guides  Livres Prix Téléchargement 
 Tribune
Internet : le triple défi
par Laurent Fabius
Député (PS) de Seine-Maritime
Ancien Premier ministre et
ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie
 
   
 

 

Le site
Assemblée nationale - Laurent Fabius

Depuis quelques jours, quel climat étrange pour la sixième Fête de l'Internet ! Après l'enthousiasme des débuts et malgré la qualité de cette manifestation, voici que serait venu le temps des doutes, de la nostalgie et du désenchantement.

Je me souviens pourtant de la grande satisfaction que j'avais éprouvée à l'Assemblée nationale lorsque, en 1998, à l'occasion de la première fête de l'Internet, nous avions inauguré notre nouveau site Web. Le succès - jamais démenti depuis - que nous avons connu reste pour moi l'un des signes qu'un exercice renouvelé de la démocratie parlementaire est possible. Plus tard, à Bercy, j'ai mesuré, en lançant le projet ambitieux d'"e-ministère" (en particulier la télédéclaration des impôts) combien les réseaux pouvaient améliorer les relations entre les citoyens et l'administration et accroître l'efficacité des services publics.

Mais l'éclatement, à partir de mars 2000, de la bulle Internet a douché les rêves. Le surendettement des grands groupes de nouvelles technologies, l'infléchissement du taux d'équipement des ménages et le retour accéléré du chômage, tout cela a renforcé le désenchantement. Un effet de mode a pris fin et Internet est définitivement passé dans nos habitudes. Faut-il pour autant accepter qu'Internet rentre dans le rang des technologies et passer à autre chose ? Au contraire. C'est maintenant que l'intervention du politique particulièrement nécessaire. Il faut poursuivre le développement d'Internet en France, en relevant un triple défi.

Un défi technique
La révolution technologique est en train de s'accélérer. Il est indispensable que nos entreprises et notre société restent dans la course. Notre pays doit rattraper rapidement son retard dans l'accès au haut débit pour tous. Le nombre d'internautes en France vient certes de dépasser les 20 millions, mais nous sommes encore en retard pour l'accès à l'Internet rapide par rapport aux Etats-Unis ou à l'Allemagne, avec moins de 2 millions d'abonné. La baisse des tarifs d'accès à l'ADSL et au câble doit être poursuivie pour que se développe un usage approfondi du Web.

Au-delà de la diffusion de l'ADSL et du câble, n'ayons pas peur de nous affranchir des vecteurs traditionnels d'Internet et de diversifier les voies d'accès au réseau. La téléphonie mobile et la télévision numérique en offrent la possibilité. Le rapprochement de la téléphonie mobile, d'Internet et des technologies de localisation - le GPS aujourd'hui, Galileo probablement demain, - offrira aux usagers des services plus pertinents, introduisant de l'information virtuelle dans leur environnement immédiat.

L'apparition des réseaux sans fil, notamment le Wi-Fi, ouvre la voie à une nouvelle expansion des réseaux, à haut et très haut débit, pour les entreprises et pour les particuliers. Il faut faire toute leur place à ces nouvelles technologies, même si elles viennent - c'est vrai - bouleverser une nouvelle fois les modèles économiques fragiles du marché des télécommunications. Je souhaite que le Wi-Fi soit rapidement autorisé sur tout le territoire français et non pas limité à quelques départements. Je souhaite aussi qu'un programme soit lancé pour équiper les écoles et les bibliothèques publiques en accès économique au haut débit.

Le développement rapide de ces nouveaux usages du réseau est une condition pour que les nouvelles technologies pénètrent vraiment notre tissu économique et social et qu'elles nous apportent les gains de productivité et le surcroît de croissance promis.

Un défi social
Quelles que soient les promesses des technologies émergentes, le développement d'Internet reste avant tout un défi social. Internet n'a pas levé les barrières sociologiques, pas plus qu'il n'a effacé les distances. Seul le quart des foyers français est connecté contre plus d'un tiers en Grande-Bretagne et plus de la moitié dans les pays nordiques. Ceux qui se connectent à leur domicile appartiennent aux catégories supérieures et diplômées. 7% des internautes seulement sont des ouvriers alors qu'ils représentent 17% de notre population. La diffusion du haut débit est plus élitiste encore.

La concurrence entre opérateurs et l'éducation des jeunes aux technologies de l'information peuvent contribuer à réduire ces inégalités. Il faut trouver des mesures à court terme pour éviter le décrochage d'une partie de nos concitoyens. Je pense en particulier aux actifs qui, menacés par le retour du chômage, rencontreront des difficultés plus importantes encore s'ils ne maîtrisent pas Internet. Certaines dépenses pour l'emploi ou une majoration de l'allocation de rentrée scolaire pourraient être mobilisées pour soutenir l'équipement informatique des familles modestes. La formation aux nouvelles technologies doit également devenir un volet du dispositif nécessaire de "sécurité sociale du travail" et "de formation toute la vie".

La distance sociale se double souvent d'une relégation géographique, au détriment notamment des territoires ruraux. Pour encourager l'accès à Internet, nous devons donner aux collectivités locales la capacité de devenir des acteurs des réseaux et non plus seulement des financiers. Un amendement au projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique (LEN), en cours de discussion au Parlement, a été introduit pour accorder une plus grande liberté. Il faut poursuivre et laisser se développer les nombreuses initiatives locales, à Pau, dans le Tarn et ailleurs. Sans être naïf, il sera très difficile d'équiper les zones les plus pauvres et les plus enclavées numériquement si le coût élevé des infrastructures est laissé à la seule charge des collectivités territoriales sans mécanisme de péréquation Le gouvernement ne prévoit aucun financement nouveau pour permettre la couverture de l'ensemble du territoire, en complément des moyens déjà mis en place sous la législature précédente.

Un défi démocratique
Enfin, Internet est à la fois une chance et un défi pour nos démocraties, aspect dont on ne parle malheureusement plus guère. Le gouvernement a fait le choix de traiter en premier la dimension commerciale de l'avenir d'Internet, avec le projet de loi pour la confiance dans l'économie numérique. Il oublie qu'Internet, en même temps qu'un lieu d'échange de biens et de services, est un formidable moyen d'expression pour les individus, pour les citoyens, pour toutes les sensibilités. Une vraie chance pour l'esprit critique et pour les démocraties.

Malgré les 38 millions de sites déjà accessibles, de nombreuses initiatives sont encore possibles dans ce domaine. Internet peut jouer un rôle majeur comme outil de la démocratie participative, au plan local notamment, et de la démocratie sociale. Internet amplifie les capacités de mobilisation de la société civile. Il facilite l'accès au débat citoyen et les relations avec les administrations. Un grand chantier doit également être ouvert entre partenaires sociaux sur l'utilisation des nouvelles technologies dans l'entreprise, pour permettre un approfondissement du dialogue social et la maîtrise des nouvelles conditions de travail des salariés.

Au-delà du commerce, seule la confiance entre les divers acteurs de l'Internet permettra à ces initiatives civiques de se développer. Je pense en particulier à tous ceux qui, intermédiaires du Web, font vivre le réseau au quotidien. Leur collaboration ainsi qu'une bonne compréhension de la complexité de leurs métiers sont nécessaires pour qu'on puisse bâtir une régulation efficace d'Internet et développer les services du Web citoyen.

A ce titre, je partage l'inquiétude des acteurs de l'Internet sur l'article 2 de la LEN voté en première lecture à l'Assemblée nationale. Cet article prévoit que la responsabilité des hébergeurs de sites Web pourra être engagée à partir du moment où ils auront eu connaissance qu'ils hébergeaient un contenu illicite, avant même toute intervention de l'autorité judiciaire, notamment en cas de notification par un internaute d'un contenu contestable. Cette disposition, trop peu précise risque d'introduire de l'insécurité juridique dans un domaine où les contentieux étaient pourtant devenus rares. Les hébergeurs auront désormais une obligation de surveillance a priori des contenus qu'ils accueillent, sous peine d'engager leur responsabilité civile et pénale. Certes il faut être vigilant mais le risque est de voir se développer des comportements d'extrême frilosité, réduisant les espaces de publication mis a disposition des internautes et, donc, la diversité des informations mises en ligne. Il serait utile que les débats sur la LEN au Sénat permettent d'aboutir à une disposition équilibrée.

Innovation, égalité, démocratie : Internet a besoin d'un projet politique d'ensemble, où le citoyen, le travailleur, l'entrepreneur, l'artiste, le consommateur, l'enfant trouvent place, respect et informations. Nous sommes à l'aube du développement des nouvelles technologies pas à leur crépuscule.

[lfabius@assemblee-nationale.fr]

Tribune publiée le 21 mars 2003.
 

Au sommaire de l'actualité - Toutes les Tribunes

  Nouvelles offres d'emploi   sur Emploi Center
Chaine Parlementaire Public Sénat | Michael Page Interim | 1000MERCIS | Mediabrands | Michael Page International


Dossiers

Marketing viral

Comment transformer l'internaute en vecteur de promotion ? Dossier

Ergonomie

Meilleures pratiques et analyses de sites. Dossier

Annuaires

Sociétés high-tech

Plus de 10 000 entreprises de l'Internet et des NTIC. Dossier

Prestataires

Plus de 5 500 prestataires dans les NTIC. Dossier

Tous les annuaires

Nos autres sites Société | Contacts | Publicité | PA Emploi | Presse | Recrutement | Tous nos sites | Données personnelles
© Benchmark Group, 69-71 avenue Pierre Grenier, 92517 Boulogne Billancourt Cedex