TRIBUNE 
PAR C-PURE (Collectif Pour un Usage Raisonné de l'Email)
"Les PME du secteur B-to-B devront-elles renoncer au marketing électronique ?"
Le collectif pour un usage raisonné de l'e-mail, composé d'une vingtaine d'entreprises impliquées dans l'e-marketing BtoB, souligne les effets pernicieux de la LCEN sur son métier.  (08/12/2004)
 
Co-signataires de la tribune :
Charter
(Yann Gozlan)
Comm'Back (Marie-Carmen Martinez)
Data Studio (Brigitte Laporte)
Dolist.net (Lionel Kappelhoff)
Epicea (Jérôme Santelli) Infopromotions (Renaud Chavanne)
Reed (Emmanuel Armand)
 
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LCEN : veillée d'arme pour l'e-mailing (20/09/04)
Publiée au Journal Officiel le 21 juin dernier, la Loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) a délimité le cadre de la "publicité par voie électronique". Il en résulte que la prospection par e-mail à destination des personnes morales (ou B-to-B) est soumise au droit d'opposition (opt-out) alors que celle à destination des personnes physiques (ou B-to-C) est soumise au consentement préalable (opt-in).

Ces dispositions de la LCEN relatives à la prospection B-to-B devaient offrir aux sociétés un cadre juridique adapté aux relations interentreprises, leur permettant ainsi de développer leurs activités en présentant leurs services et leurs offres.

Pourtant, l'avenir de cette dimension essentielle du développement de notre économie se trouve aujourd'hui dangereusement compromis. En effet, depuis l'adoption de la LCEN, certaines voix affirment que, dès lors qu'une prospection B-to-B porterait sur une adresse e-mail contenant le nom et le prénom du collaborateur de la personne morale visée, son assentiment préalable à réception des messages de prospection serait nécessaire.

Une telle interprétation de la LCEN revient à soumettre insidieusement l'essentiel de la prospection B-to-B au régime de l'opt-in, et par là même à faire perdre toute portée au régime dual (opt-in pour les personnes physiques/opt-out pour les personnes morales) voulu par le législateur. Il importe d¹être conscient qu'une telle lecture de la LCEN revient à nier la possibilité de l'e-mail entre professionnels.

En effet, les fichiers d'adresses e-mail professionnelles disposant de cet assentiment sont aujourd'hui très rares sur le marché, comme l'affirment tous les professionnels de ce secteur. Et pour cause. Ces fichiers ont été recueillis sur la base du droit d'opposition, et ne sont donc pas "opt-in". L'explication de cette situation est fort simple : si un particulier peut souhaiter volontairement recevoir un message sur un sujet qu'il affectionne personnellement, cette attirance naturelle et personnelle ne joue pas concernant les offres qui s'adressent par son biais à son entreprise.
 
L'opt-in ne s'applique pas dans la prospection BtoB
 
On peut effectivement s'interroger : est-il raisonnable de penser qu'un individu demandera spontanément à recevoir des informations sur des machines outils, sur des prestations de traitement comptable ou sur un progiciel de gestion intégré ? Au sein des entreprises, ce type d'offres concerne plusieurs interlocuteurs, les décisions d'achat relevant de pratiques collégiales. Personne n'est directement et individuellement concerné par des messages de ce type, qui s'adressent bien à l'entreprise, et non à la personne physique.

Il est alors logique que les diverses tentatives pour recueillir l'assentiment préalable sur des fichiers professionnels se soient soldées par des échecs.

A l'inverse, on peut légitimement considérer que la réception de messages d'information commerciale entre dans le cadre des attributions professionnelles des personnes concernées. Ces messages font partie de la veille technologique et commerciale, et revêtent un caractère utile pour le destinataire. N'entre-t-il pas dans la fonction d'un spécialiste de la maintenance d'être informé des offres de produits et de services touchant sa profession ? Un informaticien peut-il ignorer la sortie d'une nouvelle version logicielle ?

L'alternative évoquée par les partisans de l'assentiment préalable appliqué au commerce interentreprises consiste à exploiter des adresses dites "génériques" (du type fonction@société.com). Mais ce substitut est un leurre. D'abord parce que de telles adresses sont encore rares dans les entreprises. Ensuite, parce que leur efficacité est nulle : la plupart des professionnels du marketing b-to-b s'accordent à leur dénier toute valeur. Et cela se comprend : faudrait-il adresser un message à vente@bnp.com, à drh@edfgdf.fr ?

Sans dire les problèmes techniques et juridiques qui s'annoncent si le recours aux adresses génériques reste la seule solution. S'il est effectivement aisé de comprendre que info@lasociete.com est bien une adresse générique, comment identifier sans risque d'erreur les innombrables variantes au sein des fichiers ? Un ara.concept.info@wanadoo.fr pour une société intitulée Ara Concept Informatique est-il une adresse générique ? Comment l'identifier automatiquement comme tel. Les exemples de ce type foisonnent (tsr44@aol.com, loc@lasociete.fr), sans parler des abréviations, des initiales de personnes, des noms tronqués, et ainsi de suite. Outre qu'il est inefficace, le principe de l'adresse générique est en réalité un véritable casse-tête.
 
La lecture erronée de la LCEN aura des effets néfastes sur les PME innovantes
 
Une telle alternative n'est pas sérieuse et manifeste au contraire une méconnaissance de la réalité et de l'importance de la prospection B-to-B. En effet, une application erronée de la LCEN concernant la prospection B-to-B ferait courir un grave danger à de nombreuses entreprises. D'abord aux professionnels du secteur, de tout rang. Si les fournisseurs de fichiers semblent les premiers concernés, l'extinction rapide de leurs activités affectera rapidement tous les maillons de ce métier. Les agences marketing, de même que les courtiers, devraient voir leurs activités se tarir considérablement. Les prestataires techniques (SSII, éditeurs de logiciels et routeurs) peuvent également s'attendre à une chute brutale d'activité.

Et ce n'est que l'arbre qui masque la forêt. Car les incidences d'une telle interprétation de la LCEN sont bien plus dévastatrices. En définitive, les véritables perdants sont à chercher dans le tissu économique français au sens large, à commencer par les PME innovantes. Ces petites entreprises n'auront pas les moyens d'aller chercher dans les anciens outils marketing une alternative à l'e-mail. Pour des raisons de coûts, de lourdeur, de délais, elles ne pourront se tourner vers des solutions traditionnelles de type postal. Les témoignages ne sont pas difficiles à recueillir, et de nombreux chefs d'entreprises s'interrogent aujourd'hui : comment pourront-ils prospecter demain pour développer leur activité ?

Enfin, comment fera-t-on la distinction entre une opération marketing nécessitant l'usage de fichiers avec assentiment préalable, et l'envoi par un commercial d'un message à sa liste de contacts, laquelle peut facilement contenir plusieurs centaines d'adresses ? Cette pratique est désormais bien établie dans les entreprises françaises, mais la constitution de ces fichiers professionnels de contacts n'a certainement pas été faite avec une demande formelle, susceptible de faire office de preuve, d'assentiment préalable. Les équipes commerciales des entreprises françaises risqueront-elles de se retrouver devant les tribunaux ?

Il est temps à présent de comprendre qu'une interprétation dure et restrictive de la LCEN fait courir un grave danger à l'activité économique française, et de revenir à des positions plus raisonnées. 
 
 

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