TRIBUNE 
PAR THIERRY LAJOIE
Dématérialisation des marchés publics : évangéliser les entreprises
A l'inverse des collectivités, les acteurs privés ne sont pas encore au rendez-vous de la dématérialisation. Les pouvoirs publics et les opérateurs doivent faire des efforts en matière de promotion et d'optimisation des processus.  (10/08/2005)
 
Thierry Lajoie, Président du directoire d'Achatpublic.com
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Code des marchés publics (article 56)

Depuis le 1er janvier 2005, les entreprises peuvent répondre par voie électronique aux appels d'offres lancés par les personnes publiques (administrations, collectivités, hôpitaux, etc.). Parce qu'elles ne le font pas encore massivement, certains mettent en cause l'utilité du dispositif réglementaire le permettant. Ils se trompent, mais leurs questions ne doivent pas être éludées.

La dématérialisation des marchés publics est déjà un succès
Depuis le 1er janvier 2005, les collectivités publiques se mettent effectivement en situation de recevoir les réponses des entreprises par voie électronique au fur et à mesure qu'elles lancent des appels d'offres. Elles font généralement appel à un opérateur externe, le formalisme juridique de la procédure de passation des marchés publics supposant en effet la mise en œuvre d'une solution permettant le transport et le stockage électroniques des candidatures et des offres d'entreprises, sécurisés par des outils de signature électronique, d'horodatage et de chiffrement intégral, et une disponibilité constante.
Et les collectivités ne se contentent pas de satisfaire à l'obligation de téléprocédure des avis de publicité au Journal officiel ou de réception électronique des réponses : elles s'attachent à dématérialiser tout le processus, notamment en télétransmettant les avis aux medias print et Web et en mettant en ligne ces avis et les dossiers de consultation, ce qui n'est pas obligé. De l'autre côté, les entreprises téléchargent massivement ces avis de publicité et dossiers de consultation.

Des premiers effets positifs...
Ainsi émergent les économies visées par le dispositif réglementaire : la productivité du processus d'appel d'offres augmente, tandis que les prix de marché diminuent. L'accessibilité gratuite des appels d'offres sur le Net accroît en effet le nombre d'entreprises candidates, fût-ce par la voie du papier ; ce qui confirme qu'il n'est pas même besoin de réponses électroniques aux appels d'offres pour que la dématérialisation des marchés publics commence à produire ses effets.

... mais loin de toucher le plus grand nombre
Pour autant, la réponse électronique aux appels d'offres par les entreprises n'est pas encore entrée dans les mœurs. Selon les chiffres enregistrés par Achatpublic.com, qui en est le principal opérateur (1.800 personnes publiques clientes représentant près de 7.000 services publics utilisateurs, environ 10.000 procédures dématérialisées et 50.000 dossiers de consultation téléchargés depuis le 1er janvier), les réponses électroniques des entreprises représentent à peine 3 % du nombre des appels d'offres en ligne.

Instaurer la confiance dans les échanges par Internet
Une entreprise qui transmet une offre par la voie postale à une collectivité ne se pose pas la question du délai d'acheminement ou de la préservation de l'intégrité de son pli, et ne craint pas que ce dernier soit connu de ses concurrentes. C'est que le temps a bâti la confiance qu'on fait au service postal. Comme pour d'autres services transitant sur le Net, le temps fera son œuvre. Pour l'accélérer, il serait cependant judicieux d'encourager la réponse électronique non seulement aux procédures formalisées, d'un montant supérieur à 230.000 euros, mais aussi aux procédures adaptées, d'un montant inférieur. Chacun voit bien qu'une entreprise s'exercera plus facilement à la réponse électronique pour un enjeu financier moindre.

Promouvoir et optimiser le bénéfice de la réponse électronique pour l'entreprise
Le modèle économique dominant repose sur le paiement du service par la collectivité et sa gratuité pour l'entreprise, il a donc focalisé les opérateurs sur la conquête et la satisfaction de la collectivité plutôt que de l'entreprise. Or, pour maximiser son intérêt à la réponse électronique, l'entreprise doit parfois réformer son processus de réponse aux appels d'offres et attend également des opérateurs la mise en place d'interfaces aux logiciels qu'elle utilise.
Aux collectivités, aussi, de prendre une part toujours plus active dans le mouvement à l'œuvre, par exemple en acquerrant, voire en produisant des certificats de signature électronique pour en doter plus facilement les entreprises. Par ailleurs, les pouvoirs publics n'ont pas su intéresser les entreprises à la réponse électronique. Une grande campagne de promotion s'impose !

Simplifier l'offre de réponse par voie électronique
Foin d'hypocrisie ! La dématérialisation des marchés publics est un secteur d'activité concurrentiel, et c'est très bien ainsi. Mais si de trop nombreuses collectivités tiennent à bénéficier d'une solution internalisée, ou externalisée mais à leur seule adresse propre, voire à retenir un prestataire uniquement local pour dématérialiser leurs procédures, on aura institué un frein naturel à la réponse électronique. Car si l'entreprise, française ou étrangère, doit fréquenter des dizaines de plates-formes pour faire acte de candidature électronique, et à chaque fois suivant des processus, des pré-requis techniques, une ergonomie voire des modalités de signature différents, nul doute qu'elle ne s'y sentira pas encouragée.

Bien sûr, la dématérialisation des marchés publics aura besoin d'autres progrès encore, comme les interopérabilités indispensables, nationales (entres l'ordonnateur et le comptable, le contrôle de légalité et le juge des comptes par exemple) ou internationales (la reconnaissance des certificats de signature électronique de chaque pays), qui éviteront la rupture de la chaîne numérique. Mais déjà, elle démontre chaque jour son utilité. Et elle saura le faire plus encore, pour autant qu'elle écoute davantage l'entreprise. 

 
 

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