TRIBUNE 
PAR MARIE-EMMANUELLE HAAS
.eu : les limites de la procédure de Sunrise
Ouverte du 7 décembre 2005 au 7 avril 2006 pour permettre aux titulaires de droits antérieurs de déposer des noms de domaine en .eu en avant première, la période de Sunrise ne s'est pas passé sans heurt. Premier bilan avec Marie-Emmanuelle Haas.   (13/10/2006)
 
Avocate au Barreau de Paris
Chargée de cours à l'Université Paris I (Sorbonne)
 
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Cabinet Alain Bensoussan Selas
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Le 7 décembre 2005 débutait la phase d'enregistrement prioritaire, dite de "sunrise", d'un nom de domaine en .eu pour les propriétaires de marques déposées. Prévue pour faciliter les démarches des entreprises, ce dispositif ne s'est toutefois pas déroulé sans accroc.

Les statistiques de la période de Sunrise
En effet, au 5 octobre 2006, moins de la moitié des demandes Sunrise sur le .eu ont abouti à un enregistrement. Sur les 2.236.359 noms de domaine enregistrés sous la zone .eu à cette date, 135.880 l'ont été pendant la période d'enregistrement préalable réservée aux titulaires de droits antérieurs dite période Sunrise, entre le 7 décembre 2005 et le 7 avril 2006.

Le .eu tient son rang de septième extension au niveau mondial et de troisième extension parmi les ccTLD (country code Top Level Domain) ou codes pays européens, derrière les zones .de et .uk. Sur les 346.218 demandes d'enregistrements de .eu effectuées pendant la période Sunrise, 135.880 avaient été acceptées au 5 octobre, 15.717 étaient toujours en cours d'examen et 68.410 avaient été rejetées par EURid, le registre en charge de la zone .eu, tandis que 98.543 demandes avaient "expiré", sans pouvoir être examinées, car non conformes.

Si la Sunrise a révélé autant d'erreurs purement administratives - oubli de documents justificatifs, non-respect des délais, erreurs de noms et d'adresses, absence d'identité entre le nom de domaine et la marque (…) - c'est probablement parce que l'Internet reste à tort associé à l'absence de formalisme. Ces rejets génèrent aujourd'hui de nombreuses procédures ADR (Alternative Dispute Resolution) contre EURid, avec des solutions qui se caractérisent par leur diversité.

Les statistiques de la procédure ADR.
La procédure ADR est une procédure extrajudiciaire prévue par les règlements communautaires de 2002 et 2004 sur le .eu et administrée par la Cour d'arbitrage tchèque. Elle a été créée pour permettre un règlement rapide des différends sur les décisions d'EURid d'enregistrer ou de refuser d'enregistrer un nom de domaine, considérées contraires aux règlements communautaires et des litiges sur les enregistrements spéculatifs et abusifs de tiers, en violation de droits reconnus ou établis par le droit national et/ou communautaire.

La première décision ADR, avec l'affaire PST (n°00035) a été rendue le 18 avril 2006. Au 30 juin 2006, 342 plaintes ADR ont été initiées. 77 % de ces plaintes contestent des décisions d' EURid, suivies de décisions en faveur du registre, pour plus de la moitié (60 %). Les 23 % restants sont des plaintes formées contre le titulaire du nom de domaine enregistré, et un quart des décisions sont en faveur du requérant (EURid's Quarterly Progress Report, Second Quarter 2006).

La démarche d'harmonisation de la Cour d'arbitrage tchèque.
Les procédures engagées contre EURid retiennent une attention particulière, en raison de leur nombre et des questions posées. Un des premiers constats est la diversité des décisions rendues, ce qui est contraire au besoin de sécurité juridique des titulaires de noms de domaine et tout simplement de la zone .eu.

En réaction à cette situation, la Cour d'arbitrage tchèque a ouvert le 1er septembre 2006, au sein des experts habilités à rendre des décisions ADR, un débat sur trois thèmes, dans le but de favoriser une certaine cohérence. Le premier thème porte sur l'examen des pièces justificatives des droits antérieurs communiquées pendant la Sunrise et sur le degré d'analyse pouvant être raisonnablement attendu de l'agent de validation auquel le registre EURid a confié cet examen.

Le second thème porte sur la possibilité pour un expert en charge d'une procédure ADR, de prendre en compte des pièces justificatives communiquées après le délai de quarante jours imparti dans le cadre de la période Sunrise, pour examiner si la décision d'EURid est ou non contraire aux règlements communautaires. Cette question fait écho à des procédures ADR au cours desquelles des pièces justificatives complémentaires ont été communiquées pour compléter un dossier incomplet.

Le troisième thème porte sur la possibilité pour les experts chargés de rendre les décisions, de retenir des fondements juridiques autres que ceux formulés par les parties dans le cadre de la procédure.

Le coût de la Sunrise et ses limites.
Résultat : alors que la Sunrise avait un objectif de nature juridique, qui était de préserver les titulaires de droits antérieurs, c'est finalement l'aspect économique qui a guidé les choix techniques du mode de gestion de cette procédure de validation qui a été conçue pour être rapide et peu onéreuse.

Cette donnée économique n'est pas neutre et elle est parfois prise en compte par les experts qui doivent prendre position sur les plaintes qui leur sont soumises, pour justifier que l'agent de validation n'avait pas à procéder à des recherches supplémentaires sur les bases de données officielles pour vérifier l'existence des droits antérieurs revendiqués sans preuve suffisante (affaire n° 01537 Solo).

Si, toujours en termes de coût, on compare le .eu avec la marque communautaire, l'enregistrement d'un .eu pendant la Sunrise et son maintien en vigueur pendant dix ans génère un coût de l'ordre de 450 à 500 euros HT, tandis que les taxes de dépôt et d'enregistrement d'une marque communautaire dans trois classes sont de 1.750 euros pour dix ans. Moindre coût et rapidité sont bien entendu des objectifs raisonnables, mais il s'agit d'en prendre la mesure.

 
 

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