Ces start-up qui dérangent les acteurs traditionnels Testamento : "Certains notaires ont eu une réaction épidermique"

Le site Internet Testamento n'aura pas eu à attendre longtemps avant de subir la foudre des notaires. Lancé en béta publique en décembre 2013, le site qui propose de créer des testaments en ligne, en quelques minutes et à bas coût, déchaîne rapidement les critiques de la profession. "Vendre cette démarche juridique comme un produit fini sur Internet, laisser croire aux gens à cette simplification et à l'inutilité des conseils de l'officier public, c'est dangereux, contraire à la déontologie, inacceptable", s'indigne à l'époque Me Laurent Mompert, porte-parole du Conseil supérieur du notariat, interviewé par Le Figaro. "On ne rédige pas un testament comme on achète une baguette de pain", souligne quant à lui Me Thomas-David.

virgile delporte, co-fondateur et ceo de testamento.
Virgile Delporte, co-fondateur et CEO de Testamento. © S. de P. Testamento.

Pourtant, les utilisateurs visés par Virgile Delporte, fondateur de Testamento, ne sont pas ceux qui font habituellement appel à des notaires. "L'idée du site m'est venue après un trek en Amazonie avec ma femme. Avant de partir, j'avais rédigé un document faisant office de testament après quelques recherches sur Internet pour protéger nos enfants en cas de problèmes. En rentrant à Paris, je l'ai montré à un ami notaire qui m'a appris que ce testament n'avait aucune valeur légale, parce qu'il était mal rédigé." De là est né Testamento, un système qui permet au grand public d'obtenir un modèle individualisé de testament et de l'imprimer en quelques instants.

"Le site est réservé aux cas qui ne requièrent pas de notaire"

Pour élaborer le projet, les fondateurs se rapprochent de notaires et travaillent avec une étude nationale. "Le contact était facilité car il s'agissait de jeunes notaires, pas réfractaires au modernisme", commente Virgile Delporte. Avant de reconnaître : "Ils ont été un peu longs à convaincre quand même, mais nous les avons rassurés en leur expliquant que le service ne serait destiné qu'à régler des procédures simples, que le projet serait délimité." Au cœur de la démarche : le testament olographe, la forme la plus simple des testaments à rédiger et conserver chez soi. "Il ne requiert pas l'intervention d'un notaire, chacun peut le rédiger. Le problème, c'est que très souvent, des erreurs le rendent juridiquement invalide." Pour un prix allant de 35 à 70 euros, Testamento permet de rédiger son testament sans erreur et en une trentaine de minutes. Dès que le testament s'avère plus complexe, par exemple dans le cas d'une famille recomposée, les internautes sont invités à se tourner vers un notaire.

Le réseau de notaires partenaires en pleine croissance

Les fondateurs du site ont reçu deux types de retours de la part des notaires. "Les mécontents ont eu une réaction classique devant l'innovation : et ont émis des critiques "de principe", car le service n'était même pas encore lancé. Mais d'autres notaires "comprenant la démarche et la cautionnant, ont voulu travailler avec nous", raconte Virgile Delporte. De fait, le site permet, en association avec des notaires, de faire enregistrer la présence de son testament sur le Fichier central des dispositions de dernières volontés (FCDDV), interrogé systématiquement en cas de décès. Une autre option permet de déposer le fichier dans un coffre-fort. Les notaires perçoivent alors des frais de traitement de la part de Testamento. "Notre réseau de notaires est en pleine croissance", se réjouit Virgile Delporte.

Le site peu à peu toléré

Accusé, à leurs débuts, "d'exercice illégal d'une profession juridique", Testamento serait "un peu rentré dans l'ordre des choses". Virgile Delporte déplore "quelques tentatives d'intimidation par voix interposées : des porte-paroles qui laissaient entendre que notre activité est illégale, sûrement pour nous décourager. Mais aujourd'hui, la plupart des notaires acceptent de reconnaître que le service est légal et se contentent de dire qu'on ne peut l'utiliser que dans les cas les plus simples... Ce qui est notre avis aussi !"

Prochaine étape, pour Testamento : ajouter de nouveaux services, mais toujours "d'autres cas simples qui ne nécessitent pas a priori de consultation juridique". Et surtout, se déployer à l'international, en commençant par l'Europe. "Accélérer, embaucher, déployer plus rapidement."