Freelances : commercialiser ses prestations

Le marché des intermédiaires effectuant du placement d'informaticiens freelances est une jungle que le développeur indépendant doit apprendre à connaitre pour éviter les pièges.

Dans un article précédent, nous avons étudié les problèmes juridiques liés à la sous traitance en cascade. Cet article brosse un tableau de la commercialisation des informaticiens indépendants.

Les sites d'intermédiation se proposant de trouver des missions aux informaticiens indépendants sont assez nombreux. Examinons tout d'abord le mythe du site gratuit avec deux réalités économiques incontournables :

- Il est absolument impossible de rentabiliser un site d'intermédiation par la publicité comme cela est possible pour un site ne nécessitant qu'un peu d'hébergement. Le service doit donc être payé par quelqu'un, les acheteurs et/ou les freelances.

- Si un Directeur Informatique est parfaitement prêt à payer une recherche de compétences dans le cadre d'un recrutement de salarié, il est hors de question qu'il en fasse autant pour une recherche de prestataire. On peut le regretter mais c'est pour le moment ainsi : cela ne correspond pas du tout aux habitudes.

La conclusion concernant les sites "gratuits" pour les freelances est claire : les acheteurs ne peuvent être que des intermédiaires, qui eux  acceptent de payer les frais d'annonce, obtenant en retour une rentabilité élevée. Cette déduction est parfaitement corroborée par l'expérience.

Ces intermédiaires sont de deux types. De première main, c'est la SSII en contact avec le vrai client. De seconde main, il s'agit de structures commerciales vendant des bases de CV et cherchant le bon profil freelance (plus familièrement et dans le jargon commercial : "faisant la chasse au pinpin") pour le compte de SSII. Ces structures ont connu un développement important, elles ont souvent un site Internet. Même si la société ne contient qu'un petit nombre de commerciaux, elle est parfois délocalisée (Angleterre) et facilement identifiable à l'ignorance technique absolue dont elle fait preuve.

Il est toujours amusant, en cours d'entretien téléphonique de glisser une énorme ânerie comme par exemple : "Oui, pour ce client j'ai réalisé l'analyse fonctionnelle de sa migration de Java vers Oracle" et de voir son interlocuteur avaler le bobard. Il est vrai que bon nombre de commerciaux de SSII peuvent aussi être piégés de la sorte.

Les freelances expérimentés savent bien que les CV circulent beaucoup. Ils sont souvent contactés par des inconnus, de sociétés non moins inconnues, ayant leur CV en main et voulant connaitre leur disponibilité et leur tarif. Le freelance peut toujours demander comment son interlocuteur a obtenu son CV, la réponse sera invariablement "Vous avez dû nous le faire parvenir il y a quelques temps".

De même ils savent reconnaitre les fausses annonces grossières du genre : "Urgent, cherche 3 chefs de projets", sans aucune exigence technique complémentaire. Par contre il est impossible de détecter une fausse annonce rédigée intelligemment, sauf que de temps en temps ils obtiennent une quasi certitude : les compétences demandées étaient pointues, le freelance les avait toutes, il a envoyé son CV mais n'a reçu aucune réponse. Mission déjà pourvue ? Parfois, mais le plus souvent il ne s'agissait que de remplir une base.

Les sites "gratuits" faisant payer les intermédiaires (non pas à chaque parution d'annonce mais forfaitairement), ils peuvent se permettre de démultiplier les hoax. Les sites favorisent ce phénomène car il leur permet d'afficher des dizaines de nouvelles recherches chaque jour, signe extérieur d'abondance.

Autre indice bien connu pour identifier l'intermédiaire : le freelance n'étant pas disponible, le pseudo acheteur poursuit par "vous ne connaitriez pas un confrère ?". Jamais un vrai client n'envisagerait un seul instant d'utiliser un prestataire potentiel comme prescripteur, mais un intermédiaire le fait toujours.

Pour en revenir aux sites gratuits, il faut noter que la démonstration n'est pas réversible : payer ne peut pas être une garantie de l'absence d'intermédiaires. Il y a un exemple bien connu sur le marché de la haute technologie professionnelle.

Il est également assez distrayant de noter la surenchère sur le nombre de consultants indépendants soit-disant inscrits, souvent cinq ou dix fois plus élevé que le nombre total d'indépendants existants réellement.

Comme on le voit il est difficile pour un informaticien indépendant d'y voir clair dans ce dédale de bluffs. La plupart des indépendants n'essayent d'ailleurs pas. Ils diffusent leur CV librement et étudient les propositions au cas par cas. Bien sur quand ils traitent avec un intermédiaire le marchandage est particulièrement dur. Il est difficile de  rester à un prix "marché" avec un ou deux intermédiaires prélevant chacun sa dîme.