Stéphane Setbon (Spootnik.com) "Spootnik classe et vend les plus beaux objets du monde"

Réseau social de curation d'objets dénichés partout dans le monde, Spootnik organise des ventes événementielles des articles plébiscités. Le cofondateur de MyFab détaille son nouveau projet.

JDN. En quoi consiste votre nouveau site d'e-commerce Spootnik.com, lancé en décembre en France et au Royaume-Uni ?

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Stéphane Setbon, PDG de Spootnik © S. de P. Spootnik

Stéphane Setbon. L'un des enseignements tirés de l'aventure MyFab, site de meubles fabriqués en Chine que j'ai cofondé et dirigé de 2008 à 2010, est que beaucoup de visiteurs ne venaient pas pour les prix mais pour les produits, même chers, parce qu'on n'en trouvait pas d'équivalent en France. Or il y a beaucoup d'objets extraordinaires dans le monde, qu'on ne connaît pas ou qu'il est très difficile ou coûteux de se procurer. En outre l'offre est saturée et même Google ne permet plus de faire émerger de beaux objets. D'où l'idée d'un site qui donnerait accès à ces produits géniaux.

Comment faites-vous pour dénicher et sourcer ces produits dans le monde entier ?

Nous nous appuyons sur la première facette de Spootnik : un réseau social. Lorsqu'un concept store comme Colette paie dix personnes à faire le tour du monde pour rapporter une sélection d'articles, nous proposons à tout un chacun de "spotter" des objets extraordinaires et de créer rapidement une fiche comportant une photo, un lien vers la marque et une fourchette de prix. Les membres sont invités à "lover" les produits et nous aboutissons à un classement mondial des meilleurs articles dans chaque catégorie.

Est-il possible d'acheter ces produits ?

Spootnik n'est pas uniquement un réseau social. Nous aurions en effet pu nous arrêter là et ne fournir qu'un raccourci vers des produits sympas du monde entier. Mais nous avons poussé la démarche jusqu'au bout. Nous repérons les produits les plus appréciés par nos membres et démarchons directement les marques pour les proposer à la vente. Concrètement, nous organisons chaque semaine une vente événementielle de six jours portant sur une ville - la semaine dernière des produits venus de San Diego, cette semaine Londres, bientôt San Francisco et Rio...-, fréquence que nous porterons bientôt à une ville par jour.

De plus, grâce à la consolidation des commandes, des achats et de la logistique que nous permet ce mode de vente, nous pouvons prendre sur notre marge pour offrir la livraison aux clients, qui ne paient pas non plus de droits de douane. Autrement dit, le consommateur a accès à des produits du bout du monde aux mêmes conditions que s'il se rendait lui-même dans la boutique. Et donc y compris aux articles peu chers. Comme un touriste qui serait particulièrement bien informé.

Comment vous rémunérez-vous ?

Nous prenons, auprès de la marque, une commission de 20 à 30% sur le montant des ventes. En échange, nous prenons en charge tout l'opérationnel. Contrairement aux ventes événementielles classiques, nous ne proposons pas de réduction sur les prix, mais ce n'est pas notre objectif. Spootnik se concentre sur des produits beaux, de qualité et lointains, pour les mettre à la portée des consommateurs.

Comment organisez-vous votre logistique, sûrement particulièrement complexe ?

Le modèle apparaît effectivement très complexe, mais nous l'avons considérablement simplifié en travaillant avec une société partenaire présente dans 45 pays, Globe Express. Les marques nous livrent dans les entrepôts locaux de Globe Express, qui envoie les produits à Lille pour les dispatcher ensuite en Europe. En France et au Royaume-Uni pour l'instant, mais dès cette année sur tout le Vieux Continent.

Qu'est-ce qui incite les membres à "spotter" des produits sur Spootnik ? Leur travail de sélection n'est-il pas plus intéressant pour vous que pour eux ?

C'est une étape nécessaire et nous faisons en sorte que l'étape suivante, la mise en vente des meilleurs produits, ne soit pas décevante et réponde au contraire à leur curiosité et à leurs attentes. En outre, nous vendrons et livrerons bientôt dans la plupart de ces 45 pays.

Mais surtout, savoir où trouver les produits repérés par la communauté dans sa propre ville a déjà de la valeur. Les membres de Spootnik mettent au service des autres leur "savoir-acheter". Certains connaissent très bien les meilleurs endroits pour acheter une chemise, pour d'autres ce sont les chaussures. Avec la même ferveur que les contributeurs de Wikipedia, ils partagent leur passion et leur expertise sur Spootnik, qui peut être utilisé comme un guide des tendances mondiales.

Qu'est-ce qui différencie de Pinterest et Fancy de la partie purement réseau social de Spootnik ?

Nous nous intéressons uniquement aux catégories de produits qui s'achètent : pas de voitures, de beaux bouquets ou de recettes de cuisine. Par ailleurs, Pinterest et Fancy ne classent pas les objets, tandis que Spootnik est un raccourci vers ce qu'il y a de plus beau. En pratique, les gens nous envoient des idées de produits qui marchent chez eux. Il existe beaucoup de marques locales qui finissent par devenir mondiales. Notre idée est de les détecter avant et de proposer le futur Ugg, le futur Montcler... que le "spotter" vous indique où trouver.

Lorsque nous prenons le relai pour organiser les ventes, contrairement au cas MyFab où la conception et la fabrication des produits ajoutait une vraie difficulté, les articles sont déjà trouvés, plébiscités et nous savons où les acheter. Il n'y a plus qu'à les collecter.

Comment êtes-vous financés ?

Spootnik a levé 1,2 million d'euros en septembre 2012 auprès de plusieurs business angels. Nous bénéficions aussi des conseils de l'animateur et DJ Ariel Wizman, qui a beaucoup aimé le projet et nous guide sur l'offre du site et les marques à surveiller de près.

Stéphane Setbon est le cofondateur et PDG de Spootnik. Diplômé de HEC en 2001, il rejoint Rothschild en 2004 en tant que directeur associé. En 2008 il cofonde MyFab, site marchand de meubles direct-usine fabriqués en Chine à la demande. En 2012 il crée Spootnik avec Eric Setbon et Miguel Gomard. La société lève 1,2 million d'euros en septembre 2012, ouvre le site Spootnik.com en beta en octobre puis officiellement en décembre.