Vente en ligne de médicaments : le rappel à l'ordre du législateur français

L'Ordonnance du 19 décembre 2012, symbole de la libéralisation de la vente en ligne de médicaments, semble être contraire aux principes énoncés par la Directive 2011/62/UE du 8 juin 2011, elle-même interprétée à la lumière de la jurisprudence de la CJUE, notamment par son arrêt "Doc Morris" du 11 décembre 2003.

Par une ordonnance de référé du 14 février 2013, le Conseil d'Etat a fait droit à la demande de suspension de l'Ordonnance formulée par un pharmacien de Caen.

Ce pharmacien, pionnier de la vente en ligne de médicaments, avait fait ses premiers pas dans la sphère vertueuse du e-commerce en novembre 2012 et avait ainsi inspiré de nombreux commentaires et articles, ravivant la question de la vente en ligne de médicaments et plus précisément des conditions de la transposition en droit français des dispositions de la Directive 2011/62/UE.

La transposition en droit français a bien eu lieu par une ordonnance du 19 décembre 2012. Mais le texte de transposition, aussi symbolique soit-il, n'a pas accordé aux pharmaciens français connectés toute la liberté qu'ils pouvaient attendre, notamment au regard du droit européen.
Le droit européen distingue deux catégories de médicaments: les médicaments soumis à prescription et ceux qui ne le sont pas. Le droit européen prévoit que les États membres ne peuvent exclure de la vente à distance au public au moyen de services de la société de l'information que les médicaments soumis à prescription.

Le législateur français a cru bon d'ajouter aux médicaments non soumis à ordonnance une sous-catégorie, celle des médicaments dits de médication officinale, présentés en accès direct au public dans les officines, dont la liste est fixée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, et de limiter l'autorisation de la vente en ligne de médicaments à cette seule sous-catégorie.

La solution de l'équation ainsi soumise au Conseil d’État était simple : le régime français de la vente en ligne de médicaments est plus contraignant que celui défini par le législateur européen. 

Aussi, le Conseil d’État a prononcé la suspension de l'exécution de l'article L5125-34 du Code de la santé publique (qui devait entrer en vigueur le 1er mars 2013) "en tant qu'il ne limite pas aux seuls médicaments soumis à prescription obligatoire l'interdiction de faire l'objet de l'activité de commerce électronique ".
Le législateur français semble être vivement invité à revoir sa copie afin de d'ouvrir un peu plus encore les portes du commerce en ligne aux pharmaciens et de se conformer à l'esprit de la Directive applicable en autorisant la vente en ligne pour l'ensemble des médicaments non soumis à prescription médicale.