Jeremy Stoppelman (Yelp) "Qype sera intégré à Yelp d'ici 12 à 18 mois"

Après avoir racheté Qype, son pendant européen, le site d'avis de consomamteurs Yelp a étendu son emprise sur la marché. Son cofondateur et CEO présente ses projets.

JDN. Pouvez-nous nous présenter Yelp et son concept ?

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Jeremy Stoppelman est CEO et cofondateur de Yelp © S. de P. Yelp

Jeremy Stoppelman. Yelp est né en 2004 à San Francisco, dans l'idée de transposer le bouche à oreille sur le Web. Nous avons donc fait de Yelp la plateforme de référence pour partager ses recommandations sur la Toile. Nos utilisateurs sont plus de 100 millions à se connecter chaque mois sur notre site web pour un total d'environ 36 millions d'avis collectés. Désormais, près d'un million d'avis supplémentaires sont laissés chaque mois par la communauté, soit une croissance spectaculaire si l'on se souvient qu'il nous a fallu presque trois ans pour atteindre notre premier million.

Quel est l'intérêt pour un petit commerce d'avoir son profil sur Yelp ?

Créer votre profil sur Yelp est entièrement gratuit. Cela vous donne accès à un certain nombre d'outils permettant, par exemple, de connaître le nombre de personnes qui ont visité votre profil ou encore de mesurer leur engagement en regardant combien d'entre eux se sont rendus sur votre site Internet. Autant de données qui peuvent se révéler précieuses pour un commerce local.

Comment un commerçant  devrait-il, selon vous, réagir face à des mauvaises critiques laissées sur son profil ?

Un autre avantage d'avoir un profil Yelp est de pouvoir interagir avec sa communauté. Le détenteur du profil va ainsi pouvoir envoyer un message privé pour remercier un client d'une bonne critique mais également répondre à une moins bonne critique. Je crois qu'il est important pour un commerçant de reconnaître ses erreurs s'il en a commis. Il peut le faire de manière publique ou privée selon les cas mais l'objectif ici est de montrer que celui-ci est à l'écoute de ses clients. C'est ce que nous attendons tous en tant que consommateur et c'est ce que doit montrer une entreprise à ses futurs clients qui consulteront son profil.

Comment faites-vous pour lutter contre les faux avis laissés par les commerçants qui essaient de rendre leur profil plus attractif ?

Nous sommes les premiers à avoir entièrement basé notre business sur les avis laissés par les utilisateurs. Nous avons donc tout de suite pris très au sérieux cette question. C'est pourquoi nous avons, dès le début, mis au point un filtre informatique permettant d'identifier automatiquement les avis considérés comme peu fiables. Ces critiques, qui représentent environ 20% des avis laissées sur Yelp, restent visibles mais n'apparaissent pas avec les autres. Elles sont en quelque sorte cachées et il est alors nécessaire de cliquer sur un lien pour les faire apparaître. Nous avons préféré sacrifier ce contenu afin de rendre l'expérience sur Yelp la plus fiable possible. Enfin, nous permettons également à un utilisateur ou un commerçant de nous signaler lui-même un avis malveillant.

Certains hommes politiques sont favorables à la mise en place d'une régulation permettant de lutter contre les faux avis laissés sur le Web, qu'en pensez-vous ?

Aucune régulation ne devrait nous orienter vers une autre direction que celle que nous avons déjà prise. Nous collaborons déjà aux Etats-Unis avec différentes organisations pour lutter contre les avis rémunérés. Durant ces derniers mois, nous avons également collaboré avec l'Afnor aux côtés d'une cinquantaine d'entreprises, notamment sur la question de l'élaboration d'un standard, car nous pensons que la protection du consommateur doit être la première priorité d'un service comme le nôtre.

Que représente le marché français pour vous ?

La France compte parmi nos plus gros marchés à l'international et notre souhait est d'intégrer Qype (le copycat européen acquis par Yelp en Octobre 2012, ndlr) et son contenu au sein de Yelp afin de dynamiser notre trafic en Europe. Ce transfert de contenu devrait intervenir dans les 12 à 18 mois prochains. En regroupant les deux services sous une seule et même marque, celle de Yelp, nous espérons qu'un plus un fera trois et que cette intégration nous permettra d'atteindre un trafic significatif en France.  

Quel est le business model de Yelp ? Un mot sur les résultats de la société ?

Notre modèle de revenus s'articule principalement autour de la vente de publicité aux commerces locaux. Un commerçant peut ainsi payer pour gagner en visibilité sur le site. En termes de résultats, l'indice que nous regardons en priorité est celui de notre Ebitda ajusté. Celui-ci représentait -1,1 million de dollars en 2011 avant de devenir positif en 2012 à 4,5 millions. La progression de cet indice, qui permet d'évaluer la capacité de notre modèle à générer du cash, nous rend très confiant pour la suite.

Comment vous-adaptez vous aux bouleversements provoqués par l'essor du mobile ? Quel part de votre trafic représente-t-il ?

Le mobile est en train de changer la manière dont on utilise Internet. Ce changement, nous l'avions anticipé dès la sortie de l'iPhone en 2008 en développant notre application. Pendant plusieurs années, cette application n'était pas au centre de nos préoccupations, même si nous savions qu'elle représenterait un jour le futur de Yelp. Ce n'est qu'à partir de l'année dernière que nous avons fait de nos applications notre objectif principal.

En termes d'usage, le mobile nous permet de créer une nouvelle relation avec nos utilisateurs. Sur le Web, la plupart des utilisateurs nous trouvent via des moteurs de recherche, Google notamment. Ce n'est pas le cas avec notre application, qui nous permet au contraire d'être directement en lien avec nos utilisateurs, laissant ainsi Google en dehors de l'équation. Aujourd'hui, nous comptons en moyenne 9,2 millions d'utilisateurs actifs mensuels rien que pour nos applications mobiles et environ 50% des recherches sur Yelp sont réalisées à partir d'une de ces applications.

Quels sont vos projets pour la suite ?

Nous souhaitons accentuer notre présence en Europe, notamment grâce à l'intégration de Qype. Nous comptons également poursuivre nos efforts sur le mobile où nous pensons qu'il y a encore beaucoup à faire. Enfin, nous allons accompagner davantage nos annonceurs pour leur permettre d'avoir le plus de succès possible sur notre plateforme.

Après un an passé à Harvard, Jeremy Stoppelman cofonde Yelp en 2004 avec Russel Simmons  qu'il rencontre alors qu'il occupe le poste de VP Engineering au sein de Paypal. Aux commandes de Yelp depuis sa création, il est diplômé d'un B.S en Sciences-Informatiques de l'Université de l'Illinois.