Les étapes du financement des sites marchands passées au crible S'introduire en bourse : une option de moins en moins fréquente

Au cours de leur vie, certaines entreprises passent par la bourse. "Le plus souvent non en tant que sortie, mais pour lever de l'argent", rappelle Jean-Michel Pimont. L'expérience de Rue du Commerce est à ce titre très instructive. "A l'époque, nous aurions préféré une cession industrielle, mais les fonds n'étaient pas d'accord entre eux", se souvient Gauthier Picquart. La cession ne se fait pas et le fonds pro-IPO parvient à imposer l'introduction. A ce moment, l'entreprise qui a été restructurée est gérée de près, elle bénéficie d'une croissance importante et d'une vraie rentabilité, elle fait partie avec Cdiscount des deux gros sites marchands qui montent, le marché du high-tech se porte bien... "En outre, l'IPO de Free en début d'année a ouvert le marché. Notre introduction a lieu en même temps que celle de Meetic, l'appétit du marché est énorme." Séduire les investisseurs ne pose donc aucune difficulté et l'introduction est réalisée en septembre 2005.

a gauche marc menasé, fondateur et pdg de meninvest, et à gauche gauthier
A gauche Marc Menasé, fondateur et PDG de Meninvest, et à gauche Gauthier Picquart, fondateur et ex-PDG de Rue du Commerce © C.Debise / JDN

Seulement, l'e-commerçant affronte immédiatement un mauvais Noël, plombé par la chute du marché de la photo numérique. Pas de quoi entamer sa croissance, mais ses marges chutent et entraînent son cours de bourse vers le bas. "A partir de ce moment, nous n'avons jamais connu de remontée très forte. La bourse s'est toujours montrée un peu défiante jusqu'au lancement de la Galerie en 2007." Pour Gauthier Picquart, les investisseurs ne s'intéressent aucunement du métier de l'entreprise et souhaitent uniquement être rassurés sur la hausse de la rentabilité. "On entre dans une mécanique où on ne peut jamais décevoir les actionnaires." Une fois coté, Rue du Commerce est en outre contraint de publier tous ses chiffres, à une période où ses concurrents peuvent s'en inspirer pour se structurer dans l'ombre.

Malgré ce souvenir très mitigé, l'entrepreneur loue la visibilité considérable qu'apporte la bourse. "Elle offre aussi une liberté forte en matière d'actionnariat", précise-t-il : Alpha a ainsi pu céder sa participation petit à petit, tandis qu'Apax est resté au capital jusqu'à la cession à Altarea-Cogedim en 2011. S'il ne regrette pas cette expérience, Gauthier Picquart met en revanche en garde sur la brutalité et le caractère peu rationnel de la bourse. "Elle peut offrir des effets de levier incroyables, comme cela a été le cas pour Free. Mais une entreprise cotée peut aussi s'effondrer alors que ses fondamentaux sont bons, simplement parce qu'elle traverse une situation difficile."

Une perspective peu fréquente aujourd'hui

S'introduire en bourse est-il encore envisageable aujourd'hui ? Marc Menasé, en tout cas, ne l'envisage pas pour Meninvest. "J'avais déjà beaucoup étudié cette possibilité pour Nextedia. Mais une fois en bourse, les décisions sont câblées sur le marketing financier et non plus sur une logique industrielle. Cela ne m'intéresse donc pas davantage pour Meninvest."

Chez Partech International, Philippe Collombel enfonce le clou : "Il n'y a pas d'introduction en bourse en Europe, car il n'y a pas de marché financier pour la technologie et l'innovation. La seule solution est celle de la sortie industrielle."