Antoine Grimaud (Payplug) "Payplug, la solution simple et économique pour accepter les paiements par carte"

Pas de frais fixes, pas de contrat monétique ou VAD... En une minute les marchands créent un compte grâce auquel ils accepteront les paiements par carte bancaire, explique son cofondateur.

JDN. Vous avez fondé Payplug en 2012 avec Camille Tyan et lancé le service en mars 2013. A quoi sert-il ?

grimaud2 275
Antoine Grimaud, cofondateur et DG de Payplug © S. de P. Payplug

Antoine Grimaud. Nous sommes partis du constat que les petites entreprises, artisans, brocanteurs et autres indépendants ne disposent d'aucun outil simple pour se faire payer. Il n'existe pas d'alternative aux solutions de paiement traditionnelles que sont la carte bancaire et le chèque. D'un côté, Paypal n'a pas été conçu pour cela. De l'autre, négocier un contrat VAD avec une banque, intégrer une solution à son site et payer un abonnement se révèle souvent bien trop cher et compliqué. Payplug résout ce problème. N'importe quel professionnel sans compétences techniques se crée un compte en une minute et peut ensuite accepter des paiements en ligne, ceci sans frais fixes.

Pourquoi Payplug est-il plus adapté que Paypal à ce type de besoins ?

Pour payer avec Paypal, l'acheteur aussi doit posséder un compte Paypal. Sauf que les marchands veulent pourvoir accepter les paiements des dizaines de millions de Français qui ont une carte bancaire, et pas uniquement du consommateur sur dix qui a ouvert un compte Paypal. Avec Payplug, le payeur utilise notre solution de façon transparente, sans avoir à s'inscrire. On est donc bien loin de Paypal, dont l'utilisation dans ce contexte relève d'un détournement important de sa vocation initiale.

Comment se passe le parcours du payeur Payplug ?

Le scénario majoritaire se déroule sur le site Internet du marchand. Imaginons une association qui vend des t-shirts. Pour chaque article, elle renseigne son prix et récupère une ligne de code à copier-coller pour intégrer un bouton Payplug à la fiche produit. Ce bouton pointe vers un formulaire de paiement traditionnel, que le client remplit pour valider son achat.

Avec quelques compétences techniques supplémentaires, il est possible de faire encore mieux, par exemple en liant un bouton Payplug au panier, afin de permettre les achats de plusieurs articles simultanément. Nous travaillons en outre à ce qu'il soit possible de ne plus sortir du site pour remplir le formulaire de paiement.

Quels sont les autres scénarios ?

A peine moins fréquent est celui de l'email. Il est par exemple très prisé des acteurs du tourisme qui ne disposent pas de site Internet mais peuvent tout de même, grâce à Payplug, accepter les paiements en ligne. Ainsi, une chambre d'hôte, qui auparavant était limitée aux virements et aux chèques, rentre sur son compte Payplug le montant et l'adresse email du client. Le client reçoit l'email avec un lien vers le formulaire, paie, et le marchand est notifié. Souvent, cela se fait même en direct au téléphone, au moment de passer la réservation.

Le troisième scénario, pour l'instant bien moins répandu, adresse les situations de mobilité grâce au SMS. Nous avons développé une application pour les marchands, par exemple en déplacement sur des brocantes ou des foires. Ils envoient par SMS au client leur demande de paiement contenant un lien qui pointe vers le formulaire. A l'heure actuelle il s'agit plutôt d'une solution de dépannage, car l'acheteur doit alors renseigner les informations de paiement sur son téléphone, ce qui est toujours plus laborieux.

"Nous nous différencions par la transparence de nos frais"

Quel trajet l'argent parcourt-il ?

Les fonds issus de la carte bancaire du payeur sont placés sur un compte de cantonnement au Crédit Mutuel Arkea ou sur ING Direct. Nous ne disposons pas d'agrément bancaire, c'est donc MangoPay qui a la main sur ces comptes et qui vire l'argent vers le compte du marchand, sur l'ordre que nous envoyons via l'API de MangoPay. Ce montage peut paraître un peu technique, mais côté utilisateurs, la partie émergée de l'iceberg est totalement intuitive et ergonomique.

Pour quels volumes de transactions votre solution est-elle intéressante ?

De plus en plus de professionnels créent leur site marchand. Il y a des plateformes d'e-commerce très simples qui adressent les non technophiles et les accompagnent très bien dans cette démarche. Aujourd'hui grâce à Payplug, il existe aussi une solution de paiement très facile, qui dispose d'ailleurs de son module Prestashop. Payplug est donc idéal jusqu'à quelques milliers ou dizaines de milliers d'euros de transactions par mois.

Lorsque ce volume augmente, les marchands se tournent vers les banques. Car si Payplug se distingue par son absence de frais fixes, nous pratiquons néanmoins une commission plus élevée que les banques. Plus largement, nous nous différencions par la transparence de nos frais. La commission débute à 2,5% et diminue par palier avec l'augmentation du volume de transactions. Donc bien mieux que Paypal qui facture la transaction 25 centimes plus 3,4% du montant, avant dégression.

Comment Payplug est-il financé ?

Nous avons levé un peu moins de 500 000 euros fin 2012 et aimerions relever courant 2014. Nous sommes en train de trouver notre modèle et devons maintenant accélérer. Payplug s'adresse à des professionnels non technophiles, il faut donc aller les chercher, ce qui nécessite des investissements commerciaux. Or des investisseurs nous approchent depuis quelque temps.

Nous resterons pour le moment concentrés sur le marché français. Ce marché est diffus et compliqué, il y a donc déjà beaucoup à faire. Par exemple, pour répondre à une demande fréquente de nos utilisateurs, nous allons bientôt sortir un système traitant les paiements récurrents et les abonnements. Et dans six mois ou un an, nous irons sans doute attaquer d'autres pays.

"1,5 million de petits marchands n'acceptent pas encore la carte bancaire en France"

Qui sont vos clients ?

Actuellement, nos deux gros secteurs pourvoyeurs sont l'e-commerce et l'e-tourisme. Mais nous voyons plus loin que cela. Aux Etats-Unis, beaucoup de petits professionnels se sont mis à utiliser Ribbon, Gumroad, Soldsie... Ces solutions qui généralisent le paiement par carte suscitent une véritable effervescence. De la même façon, Payplug peut également se généraliser auprès des médecins, des photographes, des kinés, des consultants, des entreprises de dépannage...

Quel est votre marché adressable ?

En France on dénombre moins d'un million de petits commerçants qui acceptent les paiements par carte et 1,5 million qui ne les acceptent pas. Si nous ne convainquons que quelques points de pourcentage de ces derniers, ceux qui ont absolument besoin de pouvoir accepter la carte bancaire, nous aurons déjà plusieurs dizaines de milliers de clients supplémentaires. Et nous pensons réellement que d'autres s'y ajouteront, artisans, libéraux, etc., même si cela prendra plus de temps et si nous ne savons pas quelles professions basculeront les premières.

A quel volume de transactions ceci correspond-il ?

On estime à 400 milliards d'euros par an les paiements par carte en France. Ces marchands sont déjà équipés et n'appartiennent donc pas à notre marché. En revanche, les paiements liquides - certes difficiles à mesurer - atteindraient 1 000 milliards d'euros par an et les chèques, extrêmement présents en France, 1 800 milliards d'euros par an.

"La raréfaction des chèques est dans l'air du temps"

Or la raréfaction des chèques est dans l'air du temps. En Europe, depuis 10 ans, les paiements par carte bancaire ont augmenté de 10% par an quand les paiements par chèque diminuaient de 6% par an. En France, il y a 20 ans, on dénombrait 20 fois plus de paiements par chèque que par carte. Aujourd'hui le nombre de paiements par carte est deux fois supérieur au nombre de chèques. Et au-delà de l'évolution des comportements des consommateurs, les banques et les régulateurs ont intérêt à ce que les chèques et le liquide perdent du terrain. Quant aux marchands, ils préfèrent également que leurs transactions soient sécurisées.

A quel rythme l'activité de Payplug s'accroît-elle ?

Nous doublons tous les deux mois le volume de paiements que nous traitons. Et si nous levons des fonds, nous aurons plus de moyens pour accélérer. Notre ambition : proposer la solution de paiement la plus simple.

La barrière à l'entrée de votre activité ne paraît pas élevée. Comment vous protégerez-vous de la concurrence ?

Au vu de la complexité réglementaire et technique de ce domaine, nous bénéficions d'abord d'une bonne longueur d'avance. De plus, il n'y a effectivement pas de forte barrière à l'entrée mais le marché est gigantesque. Ce n'est donc pas grave. Contrairement aux systèmes fermés qui fonctionnent sur un effet de réseau, comme Facebook ou Paypal, deux solutions comme la nôtre peuvent tout-à-fait coexister. Nous n'avons donc pas peur de la concurrence car il existe un véritable besoin de simplification du paiement électronique. Nous démocratiserons nos solutions plus rapidement si nous sommes plusieurs.

Antoine Grimaud est le directeur général de PayPlug. Diplômé de l'Ecole Polytechnique et de Harvard, il a acquis son expertise du monde bancaire au sein de l'Agence Française de Développement, où il a été chef de projet pendant 4 ans et dont il a démarré les activités au Brésil. Il développe ensuite une expérience en capital risque au sein du fond ECP, avant de se lancer dans l'aventure entrepreneuriale. En 2012, il cofonde PayPlug avec Camille Tyan, lui-même issu du monde du Web et ancien de Google.