Prohibition des clauses abusives dans les réseaux sociaux : vers une meilleure protection de l’internaute ?

Les conditions générales d’utilisation des réseaux sociaux sont-elles valables ? Pas certain pour la Commission des clauses abusives qui publie 46 recommandations sanctionnant les abus présents dans les conditions générales d’utilisation imposées aux internautes.

Symbole de la lutte contre les inégalités contractuelles, les clauses abusives désignent les clauses qui créent « un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties aux contrats », c’est-à-dire entre le réseau social et l’internaute (au détriment de ce dernier bien évidemment). Aux côtés du gouvernement et des juges, la Commission des clauses abusives a donc pour mission d’identifier les clauses abusives présentes dans les contrats entre professionnels et consommateurs : lorsqu’une clause est abusive, elle est considérée comme nulle et donc privée d’effet.

Après la croissance exponentielle des réseaux sociaux ces dernières années, la Commission des clauses abusives a donc disséqué les conditions générales d’utilisation proposées par les principaux fournisseurs de services de réseaux sociaux. Même si ces documents ne sont pratiquement jamais lus par les internautes-consommateurs (qui ont de toute manière bien conscience de l’impossibilité d’entamer une négociation avec Facebook ou Twitter…), ils n’en possèdent pas moins une réelle valeur juridique puisqu’ils encadrent l’utilisation du réseau social. Le résultat de l’étude est plutôt édifiant puisqu’une quarantaine de clauses sont déclarées abusives.

D’une part, la Commission des clauses abusives relève une forte absence de lisibilité des conditions générales d’utilisations proposées aux internautes. Ainsi, les conditions générales d’utilisation proposées dans une langue étrangère, les clauses faisant référence de manière imprécise à différents types de documents (charte, politique de confidentialité, politique d’utilisation, règles de communauté), ou les clauses rédigées de manière confuse sont déclarées abusives.

En effet dès lors que le contenu des conditions générales d’utilisation n’est pas aisément compréhensible par un internaute, il est possible de douter de la validité du consentement de l’internaute, faute pour ce dernier de comprendre la réelle signification de ses engagements.

Ainsi, sont également déclarées abusives : (i) les clauses qui présument le consentement des utilisateurs aux conditions générales d’utilisation du seul fait qu’il utilise le réseau, ou encore (ii) les clauses qui confèrent un pouvoir discrétionnaire au fournisseur du réseau (le droit de modifier unilatéralement les conditions générales d’utilisation ou de résilier unilatéralement le contrat par exemple).

D’autre part, la Commission des clauses abusives retient le caractère abusif des clauses affirmant ou sous-entendant la gratuité du service, c’est-à-dire l’absence de contrepartie. Si le bon sens commande de se méfier de la gratuité d’un service en général, c’est particulièrement vrai sur internet où chaque site, moteur de recherche ou réseau social recèle une multitude de programmes ayant pour finalité de capter le maximum d’informations sur l’internaute. Ainsi pour la Commission des clauses abusives, l’utilisateur d’un réseau social qui livre ses données de navigation à l’exploitant du service fournit bien une « une contrepartie qui s’analyse en une rémunération ou un prix potentiellement valorisable  par le professionnel ».

On voit donc que le statut juridique des données reste encore à écrire puisque les règles existantes (droit de propriété ? protection de la vie privée ?) peinent à encadrer de manière exhaustive l’ensemble des usages opérés sur les données de tous types collectées sur internet. Une fois encore, le droit est donc en retard sur la pratique, sans pour autant freiner véritablement la monétisation progressive des données par les internautes.