Pour se réinventer, le magasin joue la carte de la gestion connectée 

Le consommateur cherche à se réapproprier le magasin : paradoxalement, le magasin idéal actuel possède de nombreuses caractéristiques inspirées du magasin du passé, dans lequel le commerçant connaissait personnellement ses clients, conseillait et préparait chaque jour leurs produits...

Inaugurée en 1963 en banlieue parisienne, l’ouverture du premier hypermarché en France révolutionne les habitudes de consommation dans l’hexagone. Le succès est immédiat et perdure, si bien qu’aujourd’hui la France est le pays qui compte le plus d’hypermarchés par habitant. Impersonnelles, chronophages, démesurées, éloignées des centres urbains on note aujourd’hui un certain délaissement de ces grandes structures au profit d’autres à taille plus humaine. En effet, les achats s’y réalisent de plus en plus par nécessité et manque d’alternative : Un consommateur sur cinq affirmait en 2010 que faire ses courses relevait d’une « corvée » contre un sur dix en 1986.[1]

Désormais, le consommateur cherche à se réapproprier le magasin. En témoigne la résurgence des petites structures à l’image des supérettes qui renaissent les unes après les autres sous la coupe des grandes enseignes, en particulier dans les centres urbains. Cela traduit l’évolution des habitudes du consommateur urbain : le retour à des structures à échelle plus humaine  (moins de 400m² pour une supérette contre plus de 2.500m² pour un hypermarché) témoigne d’une volonté de replacer l’humain au centre du parcours d’achat. Paradoxalement, le magasin idéal actuel possède de nombreuses caractéristiques inspirées du magasin du passé, dans lequel le commerçant connaissait personnellement ses clients, conseillait et préparait chaque jour leurs produits.

Dans notre imaginaire collectif, « magasin du futur » rime avec voitures volantes et écrans à la Minority Report. Si les voitures volantes ne sont pas –encore– à l’ordre du jour, l’affichage numérique se propage en magasin alors que les investissements des annonceurs augmentent sur ce segment (+20,8% en 2014[2]). La révolution numérique des points de vente est-elle en marche ?

Ecrans interactifs et lunettes 3D pourraient également prochainement fleurir dans certains magasins spécialisés (décoration, mobilier,…). Les clients seraient directement plongés dans un environnement agrémenté des produits proposés. Les cabines d’essayage elles aussi seront bientôt connectées : une puce RFID reconnait le produit porté puis un écran tactile propose d’autres choix de coloris et de tailles au client ainsi que des suggestions de pièces et accessoires complémentaires. 

Les vendeurs en magasin sont avertis et lui ramènent la marchandise demandée. Les nouveaux systèmes de paiement constituent finalement un des grands enjeux du magasin de demain : le mobile étant désormais le meilleur compagnon de shopping des clients, l’enthousiasme pour le m-paiement se fait de plus en plus présent. Un tiers des consommateurs aimeraient ainsi effectuer des paiements plus mobiles, mais se sentent empêchés de le faire par manque de matériels opérationnels dans le commerce[3].

Coté distributeurs, le passage au numérique s’est déjà amorcé depuis plusieurs années dans l’optique d’améliorer le service client. De nombreux vendeurs disposent de tablettes permettant de faire apparaître les fiches produits et même l’historique d’achat d’un client pour mieux le conseiller. Ils ont également la possibilité de consulter les stocks en direct ou ceux des autres points de vente. Grâce à leurs appareils mobiles, les employés peuvent désormais recevoir directement une alerte si un produit vient à manquer par exemple. Pour ce faire les vendeurs ont besoin de produits à la fois ergonomiques, robustes et dotés d’un écran qualitatif. Certaines enseignes optent pour le  principe du BYOD[i]. Un smartphone ou une tablette grand public est alors doté de fonctionnalités spécifiquement liées au point de vente : coque renforcée, lecture codes-barres et batterie augmentée.

Les autres peuvent compter sur de nouveaux PDA spécialement conçus pour coller aux nouveaux besoins du point de vente notamment la gestion des stocks de marchandises. Et bientôt, nous pourrions même voir la technologie vocale, qui a déjà fait ses preuves en entrepôt, s’installer en magasin. Les employés équipés pourraient ainsi gérer différentes missions telles que l’inventaire, le réapprovisionnement des rayons ou encore de la préparation des commandes du Drive à la seule aide de la voix, et donc travailler les yeux et les mains « libres » pour plus de confort. Intégrer davantage d’intelligence logicielle aux opérations va ainsi permettre aux managers d’avoir une meilleure vision du magasin en temps réel pour apporter un meilleur service aux clients.

Aujourd’hui, le magasin n’est plus le dernier maillon de la chaine : le parcours d’achat d’un client se fait via une multitude de canaux et le consommateur est plus mobile que jamais. En 2013, 55% des 18-44 ans affirmaient ainsi privilégier les magasins bénéficiant de compatibilités mobiles avancées[4]. Si de nos jours le M-commerce et le E-commerce gagnent du terrain, il n’en reste pas moins que le magasin physique garde une importante légitimité. Pour preuve, 90% des acteurs de la vente en ligne dans le retail possèdent également leurs propres points de vente physiques[5].

Loin d’être opposées, il faut voir ces plateformes comme des canaux complémentaires, dont les frontières s’estompent. Une complémentarité fructueuse et pérenne passe nécessairement par une adaptation des différentes plateformes. Une étude IDC révèle ainsi que 86% des enseignes estiment qu’il est stratégique d’intégrer l’approche omnicanal[6]. Le magasin physique se doit par conséquent d’évoluer vers une plus grande connectivité et une meilleure connaissance client, faute de quoi il risque, à terme, d’être exclu du processus d’achat.

[i][i] Bring your own device