Restauration : reconquérir le numérique pour en finir avec la transformation digitale à deux vitesses

Le monde de la restauration est depuis quelques années en ébullition digitale. A l’instar de l’hôtellerie ou des transports, il n’a pas échappé à la disruption. Une nouvelle génération de start-up enregistre des croissances record en ciblant la livraison, la réservation, l’achat et même la fabrication des plats.

Deux chiffres témoignent de cette révolution : 70% et 275 millions d’euros. Le premier chiffre représente la croissance depuis 2009 du volume des commandes de repas à domicile passées par téléphone, internet ou via une application (Source NPD Group 2016). Le second est le montant de la levée de fonds réalisée par Deliveroo, une plateforme britannique, un des leaders de ce marché. Avec l’émergence de la nouvelle génération connectée, urbaine et habituée à des services en ligne personnalisés et sur-mesure, ce secteur est voué à faire partie du paysage de la restauration française pour encore très longtemps.

 

Un écosystème Food Tech articulé autour de la restauration traditionnelle

Qu’il s’agisse de livraison à domicile, de réservation de table de restaurant ou de logiciels de gestion des réservations, Internet est le mode d’interaction principal de la Food Tech avec les clients finaux. Comme dans toute ubérisation qui se respecte, le revenu de beaucoup de ces acteurs agiles, positionnés en intermédiaires entre le professionnel et le client final, est essentiellement constitué d’une commission prélevée sur le prix des repas confectionnés par un autre intervenant de l’écosystème Food Tech : la restauration traditionnelle.

Cette dernière supporte des charges fixes et variables, ainsi que des contraintes réglementaires bien plus importantes, ce qui explique en partie sa santé fragile. Sur la période allant de 2000 à 2015, le chiffre d’affaires de la restauration traditionnelle a diminué de 13% en volume (source Xerfi Précepta 2016). Afin de redresser la barre et de capitaliser sur le numérique pour doper sa croissance, il est temps pour ce secteur multi-centenaire de reprendre en main sa transformation numérique. Il doit désormais offrir lui-même aux nouveaux consommateurs les services agiles et personnalisés qu’ils sont en droit d’attendre.

 

L’expérience client : un réservoir de croissance à exploiter d’urgence

Les Food Tech qui se positionnent en intermédiaires s’emparent non seulement d’une partie du revenu des restaurateurs, mais également de la relation client et de toutes les données afférentes. Or, face à un environnement économique incertain, ces données sont stratégiques pour améliorer l’expérience client, fidéliser les consommateurs et dynamiser la fréquentation. Notre pays compte 180 000 restaurants et cafés, gérés à 76% par des indépendants. Ces derniers ont observé avec inquiétude les changements en cours dans l’hôtellerie, secteur progressivement devenu prisonnier des centrales de réservation en ligne. Pour les hôteliers, l’ère digitale a ainsi marqué la perte du lien avec le client, au moment même où la relation client, véritable réservoir de croissance, est au cœur de tous les business modèles d’entreprise.  

 

Reconquérir l’indépendance digitale pour transformer les pratiques et devenir agile

Selon l’adage « si tu donnes un poisson à un homme, il mangera un jour, si tu lui apprends à pêcher, il mangera toute sa vie », de nouveaux restaurateurs sont en train de reprendre en main leur transformation digitale. Ils ont décidé de ne plus compter sur des tiers pour offrir l’agilité que les nouveaux clients exigent. Pour ce faire, ils capitalisent sur des solutions faciles d’utilisation et intuitives. Ils utilisent désormais des interfaces de réservation parfaitement intégrées au sein de leur site et qui mettent en avant leur marque. Ils sont ainsi accessibles 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, y compris pour des paiements en ligne. Véritable outil de CRM, ces solutions permettent de capitaliser sur les données clients recueillies pour réaliser des campagnes promotionnelles, proposer des offres sur mesure et améliorer l’expérience client via des services personnalisés, en ligne et dans le restaurant. 


Diminuer les coûts et se recentrer sur le cœur de métier est également un enjeu essentiel. Libérés progressivement de la sonnerie du téléphone et de la paperasse, les serveurs sont plus disponibles en salle pour servir un nombre croissant de clients, de manière encore plus personnalisée. La restauration française fait ainsi sa mue digitale et entre dans l’ère de l’expérience client, demandée par les nouvelles générations de consommateurs connectés. Les plus grandes tables de France comme La Tour d’Argent, les brasseries Bocuse, La Maison Bras à Laguiole et des centaines de restaurants non étoilés ont déjà lancé le mouvement. Ces maisons placent le client au cœur de leur stratégie online et offline, tout en conservant leur spécificité : un talent et un véritable savoir-faire artisanal. La restauration étant un des plus gros employeurs de France, notre économie peut d’ores et déjà se réjouir de ce mouvement de reconquête numérique, qui s’amplifie de jour en jour.