Co-création : trois exemples pour engager sa communauté

Co-création : trois exemples pour engager sa communauté Popularisée par les DNVB, la co-création gagne du terrain parmi les acteurs du retail. Pour identifier les bonnes pratiques, le JDN revient sur trois réussites d'envergure.

La stratégie de co-création visant à impliquer sa communauté de consommateurs est naturellement ancrée dans la stratégie des DNVB. Pour Nicolas Morschl, fondateur de la marque Bonsoirs, spécialiste du linge de lit, la co-création de marque sert à maintenir la proximité entre la marque et ses clients. Un enjeu de taille pour éviter des campagnes marketing dispendieuses. "Après tout, notre marque se développe grâce à nos clients, il est donc évident pour nous de leur donner la parole lorsque nous sommes en phase de projet de création de produit", justifie-t-il. 

Sur la base de plusieurs critères tels que la fréquence d'achat, le montant et le panier moyen ou encore les interactions positives avec la marque sur les réseaux sociaux, Bonsoirs constitue un pool de clients ambassadeurs. Au total, plusieurs milliers de clients de la marque reçoivent, à intervalles réguliers, des questionnaires sur leurs souhaits de futurs produits et services. "Les retours de la communauté nous permettent ensuite de valider des concepts produits comme les peignoirs ou les pyjamas, illustre le fondateur de Bonsoirs. Ce procédé est une véritable mine d'informations pour l'équipe produits."

Toutefois, la co-création est loin d'être un sujet réservé aux marques digitales. Depuis 2014, la plateforme participative Fanvoice a accompagné plus de 400 projets de co-création auprès de communautés d'entreprises de tous secteurs. Le but ? Propager la co-création à grande échelle au moyen d'une solution digitale. Celle-ci permet également d'appliquer la co-création à tous les pôles d'une entreprise : marketing, RSE, et même ressources humaines. "Nous pensons qu'en engageant au maximum ses clients, ses prospects et ses collaborateurs, une entreprise se rapproche de la vérité et réduit les échecs sur de nouveaux produits, services et fonctionnalités", avance Julie Devinant, directrice générale adjointe de Fanvoice.

Loin d'être un outil pour améliorer son image de marque, la co-création doit avant tout être envisagée pour le bénéfice utilisateur. "Il ne faut pas se tromper d'approche, la co-création valorise l'intelligence du consommateur et permet à une marque de prendre du recul par rapport à son expertise, insiste Julie Devinant. La vision de l'utilisateur final en matière d'emballage, de notice ou de produit accélère in fine la mise sur le marché d'un produit."

Lego Ideas

En matière de co-création, certains acteurs du retail et de l'e-commerce retiennent l'attention par leur initiative. A commencer par la plateforme internationale Lego Ideas créée par le Groupe Lego en 2014, mise à disposition des fans pour partager leurs projets créatifs en briques Lego. Le principe ? Tous les amateurs de la marque peuvent voter pour les idées des autres membres, participer à des jeux concours et des activités Lego. Les projets publiés sur la plateforme peuvent ensuite être sélectionnés et devenir des sets officiels, disponibles dans le commerce, après avoir atteint le seuil des 10 000 votes. 

En 2002, Dan Siskind est devenu le premier fan de la marque à voir son design acheté et commercialisé (#3739 Blacksmith Shop). "D'autres collaborations avec des fans designers ont suivi, notamment pour le développement de la gamme Lego Architecture. En 2008, le groupe Lego, qui souhaitait étendre ces possibilités de collaboration à tous les fans designers, s'est associé à Cuusoo System pour tester la mécanique et établir ce type de relation avec la communauté", détaille un porte-parole du groupe au JDN. "La démarche de Lego est un moyen pour les fans de suggérer eux-mêmes les jouets de demain, salue Julie Devinant. C'est une vision de la co-création qui n'engendre pas de surpromesse puisque le processus de vote et de validation fixe le cadre."

A l'heure actuelle, Lego Ideas rassemble plus de deux millions d'inscrits et compte plus de 3 000 projets actifs. Si près de quatre projets par an se concrétisent sur une moyenne de 25 atteignant les 10 000 votes, le groupe est conscient que sa plateforme de dialogue offre une fenêtre d'ouverture sur des concepts qui ne trouveraient pas leur place dans l'assortiment de la marque. Par ailleurs, le groupe constate que les projets les plus plébiscités trouvent un public au-delà de sa communauté. "Le projet Lego Minecraft, qui s'est plus tard transformé en une gamme complète, a été le plus rapide à atteindre 10 000 votes", rapporte un porte-parole du groupe.

Decathlon Co-Creation

Lancée en 2014, la plateforme du spécialiste de la grande distribution de sport et de loisirs a connu quelques aléas au démarrage. En effet, les innovations produits soumises par la communauté sur cette première version de la plateforme se heurtaient aux contraintes industrielles. Dès lors, à quoi bon mettre en place une plateforme pour engager sa communauté ? "L'exemple de Decathlon est intéressant car il met en lumière les points de friction propres à la co-création", note Julie Devinant. La co-création ne signifie pas seulement innover pour les produits de demain, c'est aussi une possibilité pour répondre à des attentes non satisfaites sur des produits existants", poursuit la directrice générale adjointe de Fanvoice.

Depuis 2019, Decathlon a relancé sa propre plateforme de co-création. D'après Axel Amblard, responsable de la co-création chez Decathlon, le procédé doit permettre d'associer la communauté de personnes la plus pertinente par rapport au projet développé. Experts, pratiquants, internes ou externes, la communauté de Decathlon Co-Creation rassemble plus de 70 000 personnes qui peuvent intervenir en fonction du type de projet concerné. "Par exemple, si je souhaite développer un sac de trail pour homme, j'ai intérêt à mobiliser des hommes de la communauté et non des femmes, et l'inverse est vrai également car les problématiques de maintien liées à la poitrine ne sont pas les mêmes, explique Axel Amblard. Ensuite, si je veux développer un sac de trail pour homme pour une pratique de 100 kilomètres, je ne pourrai pas mobiliser les membres de la communauté qui pratiquent du trail sur 20 kilomètres."

S'il est encore trop tôt pour dresser un bilan de la co-création chez Decathlon, l'enseigne remarque tout de même que les notes attribuées aux produits issus de la co-création sont supérieures aux produits non concernés par cette méthode. Un constat somme toute logique selon Axel Amblard. "Les produits nés de la co-création subissent normalement moins de retours et comportent moins de défauts."

My Starbucks Idea

Active durant dix ans, entre 2008 et 2018, la plateforme My Starbucks Idea est considérée comme un exemple de co-création et d'open innovation réussi. "La direction de Starbucks a repris les idées partagées sur la plateforme pour les appliquer au sein des points de vente comme les éditions limitées de produits, rappelle la directrice générale adjointe de Fanvoice. La marque est parvenue à intégrer les attentes des consommateurs au coeur de sa stratégie." Aujourd'hui, les clients de la chaîne de cafés ne peuvent plus accéder à My Starbucks Idea mais la marque continue à recueillir les diverses remarques sur son compte Twitter et son site internet.