Pourquoi Cdiscount lance son propre Amazon Premium

Pourquoi Cdiscount lance son propre Amazon Premium Les adhérents au programme pourront se faire livrer gratuitement à volonté pour 19 euros par an. Le JDN décrypte les modalités du service et la stratégie de Cdiscount.

Cdiscount est décidément le champion des services lancés en toute discrétion,. Mi-décembre, le site marchand filiale de Casino avait commencé à expérimenter un nouveau dispositif : le retrait en magasin sous deux heures des produits achetés auprès de marchands cross-canaux qui commercialisent leurs produits sur sa place de marché.

Rebelote aujourd'hui : l'e-commerçant lance le programme "Cdiscount à Volonté". En échange d'un abonnement de 19 euros par an, ses clients peuvent se faire livrer gratuitement leurs commandes. Les produits éligibles sont les articles peu volumineux et peu lourds (moins de 1,70m de côté, moins de 20kg), le montant total de la commande doit valoir 25 euros ou plus et l'offre est réservée à la France métropolitaine. 

Amazon Premium et Asos Premier, des concurrents déjà actifs 

Ce service s'inspire bien sûr fortement du programme Amazon Premium (Prime à l'international), pour sa part facturé 49 euros par an (récemment relevé à 99 dollars aux Etats-Unis) pour des livraisons express illimitées. Le bénéfice pour l'e-marchand est en effet considérable : une fois qu'ils ont payé à l'avance les livraisons, ces cyberacheteurs ont naturellement tendance à effectuer autant que possible leurs achats en ligne sur le site, plutôt que sur des boutiques en ligne où ils auraient encore à payer les frais de port. Ce qui, aux Etats-Unis, les conduit à dépenser sur Amazon 1340 dollars par an, contre 708 dollars pour les clients du site non membres de Prime, d'après Consumer Intelligence Research Partners. Au total, 56% des ventes de l'e-commerçant aux Etats-Unis passeraient par le programme, estimait en décembre le cabinet de recherche.

Asos ne s'y est d'ailleurs pas trompé. Depuis novembre 2013, le site marchand britannique de mode propose aussi à ses clients français de devenir membre VIP en adhérant à son programme Asos Premier. Le principal intérêt pour eux : une livraison express illimitée et sans minimum de commande. En bonus : un accès aux promotions en avant-première, des promotions exclusives et abonnement au magazine Asos. En théorie facturée 19,90 euros, l'adhésion est depuis des mois commercialisée à 15 euros.

Bientôt le même service pour les marchands de sa marketplace ?

Si la souscription à Cdiscount à Volonté est bien moins chère que l'abonnement à Amazon Premium, elle exclut en revanche la totalité des produits vendus par des marchands tiers sur la marketplace de Cdiscount. Pour l'instant en tout cas. C le Marché représentait déjà 16% du volume d'affaires du site en 2013, après seulement deux ans et demi d'existence. Sa rapide montée en puissance pourrait bien conduire Cdiscount à mettre en place un service de stockage et d'expédition pour le compte de ses vendeurs, à l'image d'Expédié par Amazon ou d'Expédié par Priceminister-Rakuten. Leur catalogue deviendrait alors sans doute éligible au programme Cdiscount à Volonté.

Dans l'immédiat, c'est sur un autre aspect que celui-ci prend l'avantage sur Amazon. Comme Asos d'ailleurs, l'Américain confie à UPS les colis Premium. Et ceux qui se retrouvent (souvent) devant porte close sont renvoyés au dépôt d'UPS. Bien moins commode pour les acheteurs que s'ils étaient déposés à la Poste du quartier. Pour sa part, Cdiscount à Volonté inclut :

 la livraison gratuite à domicile en un jour ouvré lorsque la livraison est disponible avec TNT pour les commandes passées avant 11h,

 la livraison gratuite à domicile avec So Colissimo,

 la livraison gratuite en points de retrait Cdiscount, Mondial Relay, So Colissimo et Relais Colis (parfois déjà offerte par l'e-marchand en dehors de sa nouvelle offre).

L'enjeu d'un tel programme : rendre plus de clients captifs

La filiale de Casino ne précise pas ses ambitions pour son nouveau projet. Néanmoins, il procède manifestement de la volonté de l'e-marchand, numéro 2 de l'e-commerce français derrière Amazon, de maintenir son rythme de croissance. En 2013, Cdiscount a enregistré un chiffre d'affaires en hausse de 9,7% à 1,4 milliard d'euros (soit tout de même 8% du chiffre d'affaires total de Casino en France, hors essence). En comptant aussi les ventes réalisées par les marchands tiers sur sa marketplace, son volume d'affaires s'élevait l'an dernier à 1,58 milliard d'euros. Et au premier trimestre 2014, ses ventes ont progressé de 6,1%. Rendre captifs une partie de ses clients apparaît évidemment comme une excellente contribution à sa croissance future. Et conférerait davantage de valeur à Cdiscount le jour où il s'agira de séduire des investisseurs pour une introduction en bourse, que JP Morgan verrait bien se produire dans les 12 à 18 mois.

Enfin, les lancements coup sur coup d'Asos Premier et de Cdiscount à Volonté posent une question plus large. Pour maintenir leur niveau de croissance en restant à l'équilibre financier (ceci en dépit de la hausse des coûts d'acquisition), il leur est devenu de plus en plus indispensable de fidéliser leurs clients. En parallèle, les exigences des cyberacheteurs pour des frais de port aussi bas que possible se font de plus en plus pressantes. En dernier lieu, peu d'e-marchands, à part ceux de la taille de Cdiscount ou ceux qui comme Asos peuvent se targuer d'une clientèle réellement fidèle, peuvent espérer lancer avec succès un abonnement annuel de livraisons illimitées. Beaucoup d'entre eux auraient donc intérêt à s'associer, éventuellement en excluant leurs concurrents directs, pour proposer un programme commun. En bref : à quand un Shoprunner à la française ?