Nenad Cetkovic (Lengow) "Lengow attaque dix pays d'Europe simultanément"

Partenariats, rapidité d'exécution, concurrence... Le nouveau directeur des opérations Europe de la solution de gestion de flux e-commerce Lengow détaille son plan d'attaque.

JDN. Lengow, déjà présent au Royaume-Uni, en Allemagne, en Espagne et au Canada, vient de vous confier les rênes de son expansion européenne. Quelle stratégie allez-vous adopter ?

Nenad Cetkovic. C'est assez simple, nous allons faire feu de tout bois ! Lengow dispose d'une gamme de produits très complète et spécialisée : comparateurs, marketplaces, mobile, Facebook, retargeting, email marketing, SEM... Or on retrouve ces leviers dans tous les pays. Nous allons donc aussi bien adopter une approche directe que signer des partenariats avec des acteurs aux métiers complémentaires aux nôtres, qui ont intérêt à nous présenter leurs clients. Il peut s'agir d'un grand acteur du marketing direct en Suède, d'un acteur de la sécurité e-commerce en Allemagne, d'acteurs du retargeting publicitaire...

Nous recrutons actuellement une vingtaine de personnes qui opéreront 10 pays depuis Paris. Deux équipes de cinq personnes chacune pour le Royaume-Uni et l'Allemagne, ainsi que des équipes plus restreintes pour les autres pays : Suède, Danemark, Pays-Bas, Belgique, Pologne, Italie, Espagne et Portugal. Voire le Brésil, où nous allons d'abord vérifier qu'il existe un écosystème e-marchand suffisant avant de nous lancer. Deux cabinets de recrutement nous accompagnent pour trouver des profils expérimentés issus de ces pays. Nous seront déjà dix fin mars et espérons que l'équipe sera au complet en mai.

A quels concurrents européens faites-vous face ?

Nous avons des concurrents au Royaume-Uni et en Allemagne, mais globalement les marchés que nous attaquons sont plutôt en friche. On compte davantage d'e-marchands qui n'utilisent aucune solution de gestion de flux e-commerce que d'e-marchands qui ont recours à une solution concurrente. Nous avons surtout des concurrents sur des univers très verticaux, actifs uniquement les marketplaces, uniquement eBay... A l'inverse, notre solution permet aux marchands d'avoir une approche globale. Nous pouvons donc être challengés point par point, mais dans la mesure où les marchands ont besoin d'exploiter tous les leviers possibles, nous détenons un avantage considérable.

Pour faire bref, nous ne craignons pas vraiment la concurrence. En France, Lengow s'impose progressivement comme la solution de leadership, agile, complète et simple à customiser. Or ce qui fait notre force dans l'Hexagone est valable dans les autres pays. Par exemple, nous ne prenons pas de commission sur les ventes mais facturons au nombre de références. Le marchand n'a donc pas à se préoccuper des conséquences de l'évolution de ses ventes sur son budget Lengow. Ce principe est vrai partout.

Votre approche est-elle identique sur tous les marchés ?

Justement non. Il n'est pas question d'imposer partout la méthode française. Notre problématique consiste précisément à proposer les leviers spécifiques aux pays que nous attaquons. En Allemagne par exemple, le marché est très focalisé sur la sécurité, la stabilité, la disponibilité du produit, alors que ce n'est pas du tout le cas en Italie et en Espagne. A nous de nous adapter à chaque marché, et à grande vitesse.

Prenons un exemple concret : la Suède. Bon nombre de marketplaces et de comparateurs sont suédois et leur fonctionnement est bien spécifique. Ils peuvent par exemple avoir une offre gratuite standard et faire payer la gestion de flux qu'ils opèrent eux-mêmes. La technologie de Lengow étant flexible et évolutive, elle peut s'adapter très rapidement aux conformations que nous rencontrons dans chaque pays. Il est en effet dans l'intérêt des marketplaces et des comparateurs de recevoir tous les flux sous le même format. Travailler ensemble est donc naturel.

Commercialement, quelle est votre démarche ?

Nous travaillons avec des outils qui nous permettent de repérer, dans chaque pays, les gros acteurs d'une part et les marchands de la longue traîne d'autre part, qui nous intéressent tout autant les uns que les autres. Ensuite, les cycles de vente ne sont pas très compliqués. Nos offres débutent à 100 euros. Le choix de notre solution n'est donc pas très impliquant. Mais le marchand se rend rapidement compte qu'il est structurant, car il voit immédiatement quels leviers sont profitables ou non et comment les faire évoluer.

Quels objectifs vous fixez-vous ?

En 2011 nous avons multiplié par trois notre chiffre d'affaires et nous sommes profitables. La tendance est la même en 2012. Mi-2011 nous avons levé 1,2 million d'euros auprès d'Alven Capital pour financer notre expansion à l'international. Nous avons donc du temps devant nous et allons nous attacher à créer une barrière à l'entrée sur notre secteur en construisant un portefeuille clients très fort.

Nous avons bien sûr des objectifs mais préférons d'abord les tester sur le terrain, les marchés e-commerce de tous ces pays étant très variés. Nous nous fixons de contacter plusieurs centaines de marchands par mois, en particulier en Allemagne et au Royaume-Uni, pour construire en un an des portefeuilles aussi conséquents dans chacun de ces deux pays qu'en France, où nous affichons 600 références pour 1 000 sites marchands. Ce niveau nous permettra d'être profitables dans ces pays aussi.

Et pour cela, vous n'avez pas besoin d'être sur place...

Nous ne nous l'interdisons pas, mais pour avoir géré plusieurs bureaux à l'étranger lors de mes précédentes expériences, je peux vous affirmer que c'est très complexe. Nous avons ouvert un bureau au Canada en octobre dernier en raison de l'éloignement géographique. Dans un deuxième temps, nous pourrions aussi le faire au Brésil, où l'environnement fiscal, légal, administratif et commercial est assez différent. Pour les autres pays, ce n'est pas fondamentalement nécessaire et nous évite beaucoup de complications administratives et comptables. Par exemple, Lengow est basé à Nantes et nous nous promenons beaucoup en France : la simplicité du processus de vente rend inutile une présence à Lille ou à Paris pour couvrir l'Hexagone.

Lengow avait annoncé son ambition d'attaquer les Etats-Unis dès le début 2012. Est-ce pour bientôt ?

C'est Virginie de Malavois, du bureau de Montréal, qui aura cette mission. Lengow va d'abord se rendre sur quelques événements aux Etats-Unis afin de voir comment réagit le marché. Nous sommes par ailleurs conscients qu'il peut être difficile d'attaquer réellement ce pays sans nous y implanter. Mais ce n'est pas notre première priorité. D'abord, notre présence au Canada va nous permettre d'apprendre sur le marché américain.

Pour ma part, je me concentre sur l'Europe. Lengow est une petite société et a donc besoin de trouver des marchés qui se développement rapidement. Typiquement, l'Europe centrale est très intéressante, ce que les Allemands ont réalisé bien plus tôt que les Français. Ainsi, le marché polonais se développe beaucoup plus vite que l'Italie ou l'Espagne. Nous en espérons donc davantage. Autrement dit, nous allons essayer d'être pragmatiques. Et nous procéderons de même pour les Etats-Unis : si nous en avons les moyens, si nous avons un produit qui correspond au marché, si nous pouvons nous lancer en limitant les risques, alors nous le ferons.

Nenad Cetkovic est le directeur des opérations Europe de Lengow. Après une année d'études d'informatique à l'université de Paris 6, il est de 1991 à 1997 directeur éditorial chez Ziff Davis France, puis rejoint IDG France où il édite InfoPC. En 2000 il rejoint LibertySurf et devient directeur général des communautés. De 2001 à 2008 il est DG de 01net, de 01men et des sites de RMC, BFMRadio et BFMTV. En 2009 il est nommé DG France d'Adlink et prend rapidement le poste de DG Europe du Sud d'Affilinet, qu'il occupe jusqu'en 2011. Le 1er mars 2011, quelques mois après avoir lancé son cabinet de conseil et d'investissement pour les start-up Internet, 7ko, il rejoint Lengow.